Tachiguishi

C'est au célèbre Mamoru Oshii, réalisateur du non moins culte Ghost in the shell, que l'on doit Tachiguishi. Et si le réalisateur nous a habitués à des oeuvres complexes et difficiles d'accès, ce film-là est clairement celui qui mérite le plus le titre d'OVNI.
Tout part d'une idée originale: suite à la deuxième guerre mondiale, le Japon tente de se relever. Mais au marché noir, des voleurs pour le moins atypiques font leur apparition: les fast food grifters, dirigés par Mongaze Ginji, ne cessent de développer de nouveaux subterfuges et techniques pour manger dans des restaurants sans payer.
Voici la base de l'histoire, qui, va par la suite s'étendre sur plusieurs décennies et révéler de véritables as de cette manière de vivre.
A cette histoire originale vient s'ajouter une réalisation tout aussi originale: raconté à la manière d'un documentaire, Tachiguishi se targue d'être tourné en "superlivemotion", savant mélange de prises de vue réelles, d'animation et d'infographie. Au final, plusieurs milliers de photos ont été utilisées pour la réalisation de ce film, qui, pour clore l'aspect technique en beauté, est doté d'un casting des plus originaux, composé de plusieurs célébrités et amis d'Oshii. On y retrouve notamment Kenji Kawai (compositeur des BO de plusieurs films du réalisateur), Shoji Kawamori (réalisateur d'Escaflowne), Mitsuhisa Ishikawa (PDG du célèbre studio Production IG), Toshio Suzuki (producteur des films de Oshii et du studio Ghibli)...
Avec autant d'éléments originaux, et avec Oshii aux commandes, on s'attend forcément à un divertissement de grande qualité. La chute n'en est que plus dure. Car l'originalité ne suffit pas à faire un bon film, et cette fois-ci, Oshii semble l'avoir oublié.
Dans un premier temps, c'est bourré d'optimisme et de curiosité que l'on commence à regarder le film. L'histoire intrigue, l'humour complètement décalé surprend et fonctionne, et l'originalité de la réalisation nous explose aux yeux. Du moins, au début. Car plus le film avance, plus l'intérêt du spectateur diminue, jusqu'à finalement atteindre l'ennui total.
La faute à quoi ? A plusieurs choses, à commencer par la façon dont est racontée l'histoire. Présenter le tout comme un documentaire, bonne idée, mais que le tout soit raconté pendant 1h40 par une voix off complètement monotone, omniprésente vu que le film est extrêmement bavard, finit par avoir raison de notre bon vouloir. On ajoute à cela un humour décalé basé sur le blabla et les expressions des différents acteurs sur les photos, qui fonctionne dans un premier temps, mais qui finit par tourner en rond et par lasser. A cause de cette monotonie qui prend très rapidement le dessus, il devient vite impossible de s'intéresser pleinement à l'histoire en elle-même, qui devient peu à peu confuse et soporifique pour le spectateur qui peinera à garder l'oeil ouvert.
Malgré tout, peut-on se raccrocher à l'originalité du "superlivemotion" ? A vrai dire, pas vraiment. Car si le procédé est intéressant, il finit lui aussi par lasser rapidement, en plus d'être finalement assez mal utilisé: peu de mouvements, beaucoup de photos fixes, pour un résultat qui finit d'enfoncer le film dans la monotonie. Bien souvent, Oshii se contente d'accumuler les photos de ses amis improvisés acteurs, si bien que l'ensemble prend vite l'apparence d'un trip personnel totalement hermétique.
Au final, Tashiguichi est un film très personnel, trop personnel, qui aura raison de l'attention d'une grosse majorité du public, que l'on soit fan de Mamoru Oshii ou pas. Une fois de plus, le réalisateur de Ghost in the Shell nous surprend, mais pour la première fois, en mal.
Dommage, car à côté de ça, l'édition collector 2 DVD que nous propose We Anim est excellente. Le son et l'image sont de très bonne qualité, le packaging plus que sympathique, et le DVD bonus est très riche, avec notamment une interview d'Oshii de presque 30 minutes, et des vidéos très intéressantes sur les effets spéciaux et le making-of, pour plus de deux heures de bonus. Pour le coup, on est tenté de dire que les bonus sont plus intéressants que le film lui-même.