Le voyage de Chihiro

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Erkael
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Le voyage de Chihiro

Message non lu par Erkael » 17 mars 2013, 17:04

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S’il était clair que le maître de l’animation japonaise voulait mettre fin à sa carrière avant la sortie de ce film, les spectateurs ne peuvent que remercier de tout cœur l’artiste de ne pas l’avoir fait. Car cela aurait signifié passer à côté d’un chef d’œuvre incontournable, durant lequel Miyazaki emprunte des voies que lui-même n’a jamais frôlées auparavant. Il nous emmène loin, très loin, et ce à partir de pas grand-chose … Chihiro est une gamine têtue, gâtée et boudeuse, qui voyage avec ses parents vers leur nouveau domicile. Triste d’avoir quitté ses amis, elle ne démord pas lorsque son père, pensant emprunter un raccourci, s’arrête devant un étrange tunnel. Curieux, les parents de Chihiro s’y engouffrent, allant à la rencontre d’un village accueillant par le fumet qui se dégage de la nourriture présente … Et surtout inhabité. Tandis que ses parents se restaurent, Chihiro fait un rapide tour d’horizon jusqu’à ce que, à son retour, elle découvre la triste vérité : ses parents, à force de manger, se sont transformés en cochons insatiables. Paniquée, la jeune fille se fait piéger par la nuit, et le défilé de spectres et autres étranges créatures qui remplissent alors les rues. Heureusement, un jeune garçon vient à sa rencontre et lui intime l’ordre d’intégrer les bains pour Dieux de la sorcière Yubaba si elle veut s’en sortir. C’est ainsi que commence le voyage de Chihiro qui, plus que physique, est un véritable parcours initiatique.

A travers le travail qu’elle se doit d’exercer, la jeune fille va apprendre la vie, les règles sociales et sort peu à peu de son monde bien réglé et sans surprise. Elle tente d’intégrer la logique d’un monde surnaturel pourtant pas si éloigné du notre : les bains publics pour les Dieux peuvent être assimilés, après exagération, à notre temps et aux caprices à contenter lors d’un travail, quel qu’il soit. Au fur et à mesure, elle apprend le courage et l’humilité, les responsabilités et la réalité de la vie. Tout cela dans un univers totalement décalé mais étonnamment rationnel. A travers cette héroïne originale et inhabituelle, loin des princesses ou nobles jeunes filles au destin magnifique, Chihiro est un exemple d'une enfant en plein passage vers l’âge adulte, délicate combinaison qui nous rappelle que l’un ne va pas sans l’autre. Au-delà de la discipline et de la rigueur qui est imposée à chaque moment de la vie, Miyazaki prône l’importance de l’individualité, du caractère. C’est là que l’image du nom prend tout son sens : celui qui obéit en s’oubliant n’est qu’un parmi tant d’autres, devenant rapidement une machine sans jugement ni valeurs. Chihiro parvient à s’imposer tout en se soumettant au système, ce qui la place rapidement au dessus de tous les autres personnages du film. Surpassant les idées d’avarice, d’envie, de cupidité et de jalousie qui existent jusque dans le monde des esprits, qui correspond d’autant plus à notre société, Chihiro bouleverse la version manichéenne et binaire du monde, qui a tendance à être présentée dans les dessins animés occidentaux. Une fois de plus, Miyazaki nous prouve qu’il relève avec brio son pari de révolutionner l’animation, en jouant sur la carte du conte, tantôt sérieux, moralisateur et grave, tantôt léger, cocasse, naïf et facétieux. Ici, c’est la métaphore du Sans-Visage qui est caractéristique : cet être ne sait pas ce qu’il veut, il ne peut mettre des mots sur ses envies, il ne fait que suivre Chihiro, amenant à la fois l’intrigue et le rire, le comique et la réflexion. C’est ainsi l’un des protagonistes les plus représentatifs du film.

D’un point de vue plus technique, on ne peut que féliciter le travail de réalisation du studio. La richesse des couleurs, la quantité de détails, associées à des bandes sons d’égales qualités, ainsi qu’à des sous titres français traduits avec soin donnent déjà un certain panache à ce film. Cependant, les musiques accompagnant Chihiro lors de son épopée rendent le chef d’œuvre plus que bien réalisé. Joe Hisaishi a une fois de plus montré son talent, mélangeant les sonorités et les rythmes pour transporter le spectateur au son des pas de l’héroïne. Un peu chère, cette édition ne possède pourtant que peu de bonus, à peine des bandes annonces, certes nombreuses, mais n’égalant pas les bonus du pack collector, véritablement apprécié par les fans.

Que dire de plus sur les émotions qui passent merveilleusement bien au travers de ce film ? Il faut le voir pour le croire, Le voyage de Chihiro ne se résume pas en quelques lignes. Miyazaki nous propose ici un long métrage exceptionnel, offrant un univers fantastique et mystérieux couplé au rêve et au rire. Chihiro nous emmène dans un magnifique voyage, qui se trouve être enrichissant, poétique et percutant. La grande qualité de la narration et des rebondissements, la profusion de détails authentiques et un esthétisme réussi font de ce film un des plus grands de l’artiste. Si la perfection n’existe pas, Le voyage de Chihiro nous en rapproche indéniablement.

CRITIQUE DE NIDNIM
On ne peut pas gagner à tous les coups mais on ne peut pas perdre à chaque fois non plus!

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