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Tome 1 :
Après l'excellente surprise Mirai Nikki et Hanako et autres légendes urbaines qui s'avérait sympathique, les éditions Casterman nous amènent la dernière oeuvre en date de Sakae Esuno, toujours en cours au Japon : Big Order, série d'action dans la pure veine de ce qu'a fait l'auteur avant.
"Cette histoire commence par la fin du monde."
Eiji Hoshimiya est un lycéen qui n'a que peu de foi en ce monde, si bien que dix années auparavant, il a souhaité la fin de celui-ci. Et son souhait s'est en partie exaucé. Le monde tel qu'on le connaît a chuté, ravagé par un cataclysme, et a laissé place à de nouvelles bases où sévissent les Orders, des humains dotés de pouvoirs qui leur ont été conférés suite à un voeu qu'ils ont fait plusieurs années auparavant. Seulement quelques milliers de spécimens existent, mais leur nombre semble se multiplier constamment, si bien que leur existence-même est considérée comme une menace par beaucoup.
Dans ce nouveau monde où le Japon, ravagé, est désormais dirigé par un organisme administratif de l'ONU via différentes divisions, Eiji poursuit sa vie, soignant jour à après jour Sena sa petite soeur gravement malade, et tentant de vivre avec en tête l'idée qu'il est à l'origine de ce nouveau monde... Mais est-il réellement celui qui a engendré tant de malheurs ? Daisy, une étrange entité, une jeune fille volant dans les airs et rendant régulièrement visite au jeune garçon depuis plusieurs années, semble en savoir long sur le sujet... Mais a-t-elle seulement envie de dévoiler toutes ses informations ?
La situation d'Eiji va toutefois être définitivement bouleversée par l'arrivée dans sa classe d'une nouvelle élève, Rin Kurenai. Pour Eiji, c'est le coup de foudre quand il voit cette belle jeune fille. Mais Rin lui prouvera vite qu'elle est loin d'être aussi douce qu'il y paraît, et qu'elle est là dans un but bien précis, qui ne sera que le déclencheur d'événements inattendus...
Après les pouvoirs conférés par les téléphones portables dans Mirai Nikki, place aux pouvoirs conférés par les voeux ! Avec Big Order, Sakae Esuno reste dans un registre qu'il connaît bien, se servant de sa pointe d'originalité pour offrir un récit d'action intriguant sur plus d'un point.
Il faut d'abord signaler ce concept des pouvoirs conférés par les voeux. Chaque Order a un pouvoir bien a lui, qui découle logiquement du souhait qu'il a autrefois formulé et l'on assiste alors à la découverte des premiers pouvoirs. Celui du dénommé Fran est on ne peut plus classique, celui de Rin également mais est exploité sous un angle peu courant avec régulièrement des pointes d'humour, mais c'est bel et bien le pouvoir d'Eiji qui bluffe de par son concept assez original et porteur de grandes promesses. Les premiers combats exploitent parfaitement les pouvoirs, ceux-ci faisant tout le sel des scènes d'action, ces dernières étant représentées assez pauvrement mais se révélant, grâce à cette bonne exploitation des pouvoirs, riches en rebondissements.
Toutefois, cette simple idée de pouvoirs ne saurait suffire sans un fond intrigant, et de ce côté-là, le premier tome de Big Order fait fort en laissant déjà place à de nombreuses avancées et révélations qui pourtant ne forment encore qu'une longue introduction. A partir de l'arrivée de Rin, les choses s'enchaînent à un rythme soutenu et dévoilent au fur et à mesure des bases ambitieuses... et forcément assez haut perchées, Sakae Esuno oblige. On voit donc se préciser des informations importantes sur les premiers pouvoirs en place, sur ce qu'avait souhaité exactement Eiji dix ans auparavant, sur le rôle de notre héros auprès de sa petite soeur, sur l'objectif de Rin, sur les objectifs énigmatiques des Orders du decemvirat lancés à la poursuite du jeune garçon... Et très vite, des relations très délicates se mettent en place, à commencer par celle liant bien malgré elle Rin à Eiji. Un lien contraint, très instable, qui pourrait se briser à tout moment, et qui s'annonce bien tordu comme il faut, un peu à la manière de ce qu'offrait le couple Yuki/Yuno dans Mirai Nikki.
Globalement, on a donc un premier volume très riche, qui met énormément de choses en place et semble n'entrer dans le vif du sujet que dans les toutes dernières pages, annonciatrices d'un trip ambitieux et de grande ampleur. Et pourtant, difficile de se réjouir totalement lors de la lecture, tout aussi rythmée celle-ci soit-elle, car des défauts sont là, à commencer par ce rythme, justement, beaucoup trop rapide, qui nous balance très vite dans le vif du sujet sans passer par des présentations détaillées de l'univers et des personnages, alors peu attachants. Le mangaka se dépêche un peu trop de tout mettre en place pour ensuite pouvoir attaquer les choses sérieuses dès le tome 2, les petits raccourcis sont très nombreux, et cela se ressent malheureusement un peu trop. Egalement, il y a toujours ce style graphique loin d'être irréprochable, assez pauvre malgré des visages bien marqués et souvent emprunts de folie, et trop enclin aux bons gros clichés physiques (sérieusement, certains membres du decemvirat ont vraiment des dégaines à la ramasse et injustifiées... sans doute juste pour faire plus cool). Enfin, que penser du manque de renouvellement du physique d'Eiji et Rin, copies quasiment parfaites des deux héros de Mirai Nikki ?
Dès le premier tome, on sent Sakae Esuno parfaitement dans son trip, tout comme il l'était dans Mirai Nikki. Bien que cette longue introduction soit trop rapide et bourrée de raccourcis, l'auteur exploite déjà bien son concept de pouvoirs, met beaucoup de choses en place autour de son univers, de ses personnages, de leurs relations instables et du destin complètement fou qui attend Eiji, et intrigue sans difficulté quant aux intérêts de certains (le décemvirat et Daisy en tête). A présent, il reste à voir comment l'auteur va développer tout ce bordel organisé.