Re: Saint Seiya Lost Canvas
Posté : 26 mars 2013, 00:43
Saint Seiya - The Lost Canvas: Tome 1
L'Histoire
D'aussi loin que nous viennent les légendes, elles évoquent celles d'une grande guerre sainte qui se produisit il y a un peu plus de deux siècles entre la déesse Athéna et le dieu des enfers Hadès. Lorsque le monde est la proie des forces du mal, des guerriers arrivent alors pour apporter l'espoir. Ce sont les chevaliers d'Athéna. Revêtus d'une armure liée aux constellations, ils luttent pour maintenir la paix dans le monde. Leur puissance est telle que leur poing peut déchirer les cieux et faire trembler les continents. Depuis des temps immémoriaux, Hadès, le dieu qui règne en maître sur le royaume des morts, les Enfers, a tenté de faire sienne la surface de la Terre gouvernée par Athéna. Dans ce but, il a levé des spectres élus par 108 étoiles maléfiques et tenta maintes fois de conquérir la planète. Lors d'une guerre sainte précédente, Hadès scella lui-même son enveloppe charnelle aux Enfers, son esprit continuant à se réincarner dans différentes enveloppes mortelles lui permettant un avènement sur Terre.
Nous sommes en Europe au XVIIIème siècle. La destruction d'un petit village sera le déclencheur de cette grande guerre sainte !
Deux années plus tôt, les acteurs principaux de la guerre à venir n'étaient encore que des enfants, deux orphelins unis par une amitié sincère et par une promesse qu'ils s'étaient fait quelques années plus tôt. L'avènement de cette guerre sainte allait changer leur destinée...
Commentaires
Tout le monde connait Saint Seiya, cette série shonen qui, sous le nom des Chevaliers du Zodiaque, avait fait les beaux jours du Club Dorothée. Ces histoires de chevalerie moderne où nos héros revêtaient des armures liées aux constellations pour livrer des batailles épiques contre des adversaires toujours plus puissants et faire brûler leur cosmos intérieur, sorte d'ersatz de la Force dans Star Wars. Ah, c'était le bon temps, toute mon enfance... Et il aurait mieux valu que ça le reste !
Il arrive parfois, quand on revoit certaines séries qu'on adorait durant l'enfance, qu'on ait de mauvaises surprises. Qu'on se rappelle d'un truc qui nous paraissait génial dans nos souvenirs et, qu'en le revoyant, c'était pas si génial en fait. Eh bien, je crois que Saint Seiya détient la palme à ce niveau. Rien qu'en voyant les armures en forme de maquettes conçues par Bandai et contenues dans des grosses boîtes, déjà rien que là, ça brise des rêves d'enfance et ça devient atrocement kitsch. Mais quand en plus l'histoire se contente d'une succession de batailles avec un semblant d'intrigue bourré d'idées plus absurdes les unes que les autres (ce vieux pervers de Mitsumasa Kido qui aurait fait des enfants à 100 femmes, et j'en passe) et que les personnages sont plats comme des endives et qu'ils n'évoluent pas d'un chouilla tout le long de la série (qui fait quand même 28 tomes), j'aimais peut-être quand j'étais plus jeune, mais aujourd'hui ça ne passe plus vraiment.
Finalement, Saint Seiya, c'est quoi ? Une série de batailles où il faut castagner les méchants, avancer à la maison suivante et ultimement sauver la princesse Peach (ou presque) des ambitions maléfiques de la méchante tortue ? Génial ! A ce compte là, mieux vaut appeler Mario avec sa salopette de plombier plutôt qu'une bande d'adolescents aux armures complètement plombées (je caricature un peu...).
Donc non, j'ai aimé Saint Seiya, je garde une certaine nostalgie pour ce titre, mais de revoir aujourd'hui cette série (ou le manga) et de me rendre compte à quel point c'est devenu kitsch... Je ne peux plus la revoir autrement qu'en prenant tout au second degré, un peu comme une autre série de super sentais avec des clowns habillés en cosplay avec des pyjamas et des casques de moto sur le crâne. Saint Seiya, c'est fini et bien fini pour moi !
Il y a toutefois une série qui trouve grâce à mes yeux et qui arrive à me faire revivre aujourd'hui les sensations que je ressentais pour la série originale à l'époque: ça s'appelle Lost Canvas, c'est écrit par une certaine Shiori Teshirogi, et on sent tout de suite que c'est un manga fait par une fan pour des fans. Elle a repris cet univers et elle l'a réinventé pour en faire quelque chose de tellement supérieur à l'oeuvre originale que c'en est renversant. Elle a réinventé l'univers de Saint Seiya à sa sauce, avec son histoire, son univers et ses personnages, et on peut vraiment dire qu'elle a modernisé la franchise pour lui offrir une seconde jeunesse et raviver la vieille flamme de ceux qui, comme moi, ne peuvent plus trouver leur compte aujourd'hui avec l'oeuvre originale de Masami Kurumada.
Voici donc le tome 1 de cette nouvelle série des Chevaliers du Zodiaque. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que tous les repères sur lesquels les fans de l'original pouvaient s'appuyer sont balayés d'entrée de jeu. Loin de démarrer dans le feu de l'action, Shiori Teshirogi prend le temps d'installer ses personnages et son histoire et de nous faire redécouvrir un univers à la fois fidèle à ce que l'on a connu autrefois et pourtant assez différent. Ce tome 1 est donc une introduction à Lost Canvas et un prologue aux événements à venir.
On découvre ainsi nos deux personnages principaux, le jeune Tenma, téméraire et bagarreur, et le doux Alone, deux orphelins abandonnés de tous et qui ont survécu en se soutenant mutuellement avec les autres enfants. Ensemble, ils forment une famille. Plus que des amis, ce sont deux frères, si ce n'est par le sang, du moins par le coeur. Alone est un jeune peintre talentueux dont les oeuvres sont remarquées par un mystérieux prêtre affilié à une cathédrale perdue dans la forêt. Cette cathédrale abriterait une peinture qui, selon la légende, ouvrirait les portes de la pénitence aux plus vils des pêcheurs. Alone est intéressé par cette peinture mais, malheureusement, les portes de la cathédrale restent fermées au public. Son plus grand souhait serait de réaliser lui-même une oeuvre qui ouvrirait les portes du salut aux âmes torturées sur cette terre. Le prêtre le dirige alors vers un mystérieux jardin caché au milieu de la forêt dans lequel il devrait trouver une couleur rare qui lui permettrait de réaliser la peinture qu'il souhaite. C'est dans ce jardin, rappelant les Champs Elysées, qu'Alone rencontre la mystérieuse Pandore et que s'ouvre à lui la voie qui l'amènera à devenir la nouvelle incarnation d'Hadès, le dieu des Enfers.
De son côté, Tenma est habité depuis tout jeune par une étrange puissance qui lui permet de ressentir l'univers. Il est repéré par Dohko de la Balance, l'un des 12 chevaliers d'or de la déesse Athéna, qui lui propose de l'emmener au Sanctuaire en Grèce afin de suivre une formation de chevalier pour protéger la justice et la paix sur Terre. Tenma accepte afin d'acquérir le pouvoir de protéger Alone et les autres orphelins lorsqu'il reviendra une fois devenu chevalier.
Tenma et Alone sont alors séparés pendant deux années mais ils se sont faits la promesse de se retrouver un jour. D'ici là, Tenma sera devenu le chevalier de bronze de Pégase et la vision du monde d'Alone aura changé de couleur...
Shiori Teshirogi rompt donc avec la tradition des séries Saint Seiya. Loin de s'engager directement dans une succession de combats, elle prend avant tout le temps de poser son histoire et de développer les personnages qui seront au centre, et cela avant même que la guerre sainte ne commence, que Tenma soit chevalier et qu'Alone devienne Hadès. Car pour que son histoire fonctionne, il fallait d'abord qu'elle arrive à nous faire croire à cette amitié sur laquelle repose tous les enjeux du titre. Et elle y arrive bien: les deux personnages principaux sont attachants et leurs caractères sont bien posés. Les éléments sont bien amenés (rien qui ne sorte d'on ne sait où), les dialogues sont bien écrits et il y a une réelle émotion qui se dégage de ces deux personnages. Cet âge d'innocence ne va bien sûr pas durer et certains événements auront tôt fait de commencer à les changer afin que leurs retrouvailles (brièvement entraperçues au début du tome) ne soient pas aussi chaleureuses qu'on ne l'aurait espéré et marquent véritablement le commencement de la guerre sainte.
Déjà là, on sent une richesse de narration et de caractérisation des personnages encore inédites dans la saga. Tout n'est pas parfait, la transition d'Alone à Hadès peut paraître un peu soudaine par exemple (encore que la scène en question est l'une des plus marquantes du tome), mais on sent déjà une réelle existence chez ces personnages qui se définit à travers leurs actes et leurs paroles. Rien n'est jamais amené de manière superficielle, leur psychologie est suffisamment travaillée (bien qu'on reste dans certains stéréotypes) et on les voit évoluer progressivement à mesure des événements. Déjà, rien que tout ça, c'est quelque chose que je ne trouve pas dans l'oeuvre originale de Masami Kurumada et qui me permet d'entrer plus facilement dans une histoire. Là, je peux croire à cette histoire, je peux croire à ces personnages et, au final, je pars conquis dès les premiers chapitres.
Maintenant, Saint Seiya ne serait pas Saint Seiya sans ses affrontements épiques et, de ce côté là, je dois dire que ceux qui s'attendaient à retrouver ça en lisant ce premier tome risque de rester sur leur faim. Non pas que les affrontements ne soient pas épiques (quoi qu'ici...), ils vont le devenir assurément. Mais c'est surtout qu'il n'y en a pratiquement pas. Outre trois spectres qui se font directement tabasser par le charismatique Dohko de la Balance (celui-là, il va plaire aussi bien aux lecteurs qu'aux lectrices, mais pas pour les mêmes raisons), l'affrontement principal du tome implique un spectre d'Hadès sans le moindre charisme et qui ne nous donne pas une première bonne impression sur les combats à venir. Déjà, je trouve qu'il y a un côté presque malsain de faire du premier adversaire suffisamment important de la série une sorte de ver avec des tentacules qui arbore une attitude et des paroles franchement ambigues à l'égard de la pauvre Athéna et qui parle de "cosmos incroyablement puissant" en regardant entre les jambes de la jeune fille. Mais c'est surtout que l'affrontement n'est pas intéressant. Cela peut s'expliquer par le fait que Tenma est encore en apprentissage et ne sache pas encore bien se battre ou par le fait que Shion est un chevalier d'or, donc incroyablement puissant (ce qui permet déjà de donner une idée de la différence de puissance liée à la hiérarchie des chevaliers), mais reste que pour le seul combat valable du tome, ce n'est franchement pas terrible et que ceux qui s'intéressent à Saint Seiya principalement pour ses affrontements épiques risquent de rester sur leur faim sur ce coup.
Cependant, si ce premier affrontement est raté, la mise en scène de Shiori Teshirogi est aussi travaillée que sa narration sur l'ensemble du tome. On prend plaisir à suivre l'histoire, à découvrir ces personnages, et on a déjà quelques scènes très intéressantes comme cette réunion des 12 chevaliers d'or réunis "afin de protéger le Sanctuaire et Athéna", une scène qui annonce superbement tous les événements à venir tout du long de la série (et qui nous proposeront un peu autre chose qu'un énième remake de la bataille fratricide du Sanctuaire). Les différentes scènes illustrant les personnages de Tenma et d'Alone sont également très réussies, notamment celle de la cathédrale qui voit la transformation d'Alone en Hadès ou la fameuse scène du jardin des Champs Elysées qui s'apparente au mythe du jardin d'Eden avec le fruit défendu (la couleur rouge véritable) et le serpent (Pandore). A partir de ce stade, le monde va changer aux yeux d'Alone et ça marque le début d'une longue descente aux Enfers pour le personnage, à mesure que sa vision du monde perde de sa couleur et de sa vie pour devenir "noir et blanc" et austère comme la mort. Enfin, un troisième personnage principal survient un peu plus tard et elle n'est bien sûr autre que l'Athéna de la série: Sasha. Celle-ci s'avère être liée à Tenma et Alone par un lien indéfectible qui remonte à leur passé commun. De quoi compléter le casting de ce qui s'annonce comme une formidable tragédie grecque dans l'univers de Saint Seiya.
Ce premier tome de Lost Canvas nous présente donc un début très encourageant pour le titre avec une histoire intéressante, des personnages attachants et profonds et un réel travail sur la mise en scène et sur la narration de la part de l'auteur (et rien que tout ça, ça suffit déjà à le rendre plus intéressant que l'oeuvre originale à mes yeux). Les fans du Saint Seiya original n'y trouveront peut-être pas tous leur compte (du moins pour l'heure), mais Lost Canvas possède déjà suffisamment d'atouts pour offrir un moment de lecture plaisant et prenant et pour raviver la flamme d'autrefois de certains fans déçus par l'oeuvre originale comme j'ai pu l'être. Car Lost Canvas est, à l'heure actuelle, la seule série Saint Seiya qui me permette de retrouver les chevaliers du Zodiaque tels qu'ils étaient restés dans mes souvenirs d'enfance et de me faire redécouvrir les sensations que me faisait ressentir la série animée à l'époque. Il est surprenant de voir qu'à l'heure d'aujourd'hui ce soit une grande fan du Saint Seiya original qui soit le mieux parvenue à saisir cet esprit et à me le faire à nouveau ressentir, alors que Masami Kurumada lui-même s'enfonce actuellement dans une suite des plus médiocres (Saint Seiya: Next Dimension) qui finit d'achever tout ce qui restait de valable dans le manga initial (adieu les combats dantesques et l'aura épique, bonjour l'humour qui vire à l'auto-parodie involontaire, les mises en scène complètement plates et les combats sans âme qui s'achèvent presque aussi vite qu'ils n'avaient commencé).
Enfin, Saint Seiya, comme toutes les oeuvres, appartient à la génération qui l'a connue et cet univers n'a cessé d'évoluer au fil du temps. Lost Canvas n'est qu'une de ces multiples versions qui ont été crées à partir de l'oeuvre initiale, une version plus modernisée et qui se destine peut-être davantage à un autre public plus jeune que celui de l'époque avec un shonen plus dans l'air du temps. Mais c'est en tout cas le Saint Seiya dont j'avais besoin pour faire vibrer à nouveau la flamme du vieux fan et, en ce sens, ce premier tome de Lost Canvas pose efficacement les bases d'un nouveau grand mythe des Chevaliers du Zodiaque.
Verdict: Très bon.
L'Histoire
D'aussi loin que nous viennent les légendes, elles évoquent celles d'une grande guerre sainte qui se produisit il y a un peu plus de deux siècles entre la déesse Athéna et le dieu des enfers Hadès. Lorsque le monde est la proie des forces du mal, des guerriers arrivent alors pour apporter l'espoir. Ce sont les chevaliers d'Athéna. Revêtus d'une armure liée aux constellations, ils luttent pour maintenir la paix dans le monde. Leur puissance est telle que leur poing peut déchirer les cieux et faire trembler les continents. Depuis des temps immémoriaux, Hadès, le dieu qui règne en maître sur le royaume des morts, les Enfers, a tenté de faire sienne la surface de la Terre gouvernée par Athéna. Dans ce but, il a levé des spectres élus par 108 étoiles maléfiques et tenta maintes fois de conquérir la planète. Lors d'une guerre sainte précédente, Hadès scella lui-même son enveloppe charnelle aux Enfers, son esprit continuant à se réincarner dans différentes enveloppes mortelles lui permettant un avènement sur Terre.
Nous sommes en Europe au XVIIIème siècle. La destruction d'un petit village sera le déclencheur de cette grande guerre sainte !
Deux années plus tôt, les acteurs principaux de la guerre à venir n'étaient encore que des enfants, deux orphelins unis par une amitié sincère et par une promesse qu'ils s'étaient fait quelques années plus tôt. L'avènement de cette guerre sainte allait changer leur destinée...
Commentaires
Tout le monde connait Saint Seiya, cette série shonen qui, sous le nom des Chevaliers du Zodiaque, avait fait les beaux jours du Club Dorothée. Ces histoires de chevalerie moderne où nos héros revêtaient des armures liées aux constellations pour livrer des batailles épiques contre des adversaires toujours plus puissants et faire brûler leur cosmos intérieur, sorte d'ersatz de la Force dans Star Wars. Ah, c'était le bon temps, toute mon enfance... Et il aurait mieux valu que ça le reste !
Il arrive parfois, quand on revoit certaines séries qu'on adorait durant l'enfance, qu'on ait de mauvaises surprises. Qu'on se rappelle d'un truc qui nous paraissait génial dans nos souvenirs et, qu'en le revoyant, c'était pas si génial en fait. Eh bien, je crois que Saint Seiya détient la palme à ce niveau. Rien qu'en voyant les armures en forme de maquettes conçues par Bandai et contenues dans des grosses boîtes, déjà rien que là, ça brise des rêves d'enfance et ça devient atrocement kitsch. Mais quand en plus l'histoire se contente d'une succession de batailles avec un semblant d'intrigue bourré d'idées plus absurdes les unes que les autres (ce vieux pervers de Mitsumasa Kido qui aurait fait des enfants à 100 femmes, et j'en passe) et que les personnages sont plats comme des endives et qu'ils n'évoluent pas d'un chouilla tout le long de la série (qui fait quand même 28 tomes), j'aimais peut-être quand j'étais plus jeune, mais aujourd'hui ça ne passe plus vraiment.
Finalement, Saint Seiya, c'est quoi ? Une série de batailles où il faut castagner les méchants, avancer à la maison suivante et ultimement sauver la princesse Peach (ou presque) des ambitions maléfiques de la méchante tortue ? Génial ! A ce compte là, mieux vaut appeler Mario avec sa salopette de plombier plutôt qu'une bande d'adolescents aux armures complètement plombées (je caricature un peu...).
Donc non, j'ai aimé Saint Seiya, je garde une certaine nostalgie pour ce titre, mais de revoir aujourd'hui cette série (ou le manga) et de me rendre compte à quel point c'est devenu kitsch... Je ne peux plus la revoir autrement qu'en prenant tout au second degré, un peu comme une autre série de super sentais avec des clowns habillés en cosplay avec des pyjamas et des casques de moto sur le crâne. Saint Seiya, c'est fini et bien fini pour moi !
Il y a toutefois une série qui trouve grâce à mes yeux et qui arrive à me faire revivre aujourd'hui les sensations que je ressentais pour la série originale à l'époque: ça s'appelle Lost Canvas, c'est écrit par une certaine Shiori Teshirogi, et on sent tout de suite que c'est un manga fait par une fan pour des fans. Elle a repris cet univers et elle l'a réinventé pour en faire quelque chose de tellement supérieur à l'oeuvre originale que c'en est renversant. Elle a réinventé l'univers de Saint Seiya à sa sauce, avec son histoire, son univers et ses personnages, et on peut vraiment dire qu'elle a modernisé la franchise pour lui offrir une seconde jeunesse et raviver la vieille flamme de ceux qui, comme moi, ne peuvent plus trouver leur compte aujourd'hui avec l'oeuvre originale de Masami Kurumada.
Voici donc le tome 1 de cette nouvelle série des Chevaliers du Zodiaque. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que tous les repères sur lesquels les fans de l'original pouvaient s'appuyer sont balayés d'entrée de jeu. Loin de démarrer dans le feu de l'action, Shiori Teshirogi prend le temps d'installer ses personnages et son histoire et de nous faire redécouvrir un univers à la fois fidèle à ce que l'on a connu autrefois et pourtant assez différent. Ce tome 1 est donc une introduction à Lost Canvas et un prologue aux événements à venir.
On découvre ainsi nos deux personnages principaux, le jeune Tenma, téméraire et bagarreur, et le doux Alone, deux orphelins abandonnés de tous et qui ont survécu en se soutenant mutuellement avec les autres enfants. Ensemble, ils forment une famille. Plus que des amis, ce sont deux frères, si ce n'est par le sang, du moins par le coeur. Alone est un jeune peintre talentueux dont les oeuvres sont remarquées par un mystérieux prêtre affilié à une cathédrale perdue dans la forêt. Cette cathédrale abriterait une peinture qui, selon la légende, ouvrirait les portes de la pénitence aux plus vils des pêcheurs. Alone est intéressé par cette peinture mais, malheureusement, les portes de la cathédrale restent fermées au public. Son plus grand souhait serait de réaliser lui-même une oeuvre qui ouvrirait les portes du salut aux âmes torturées sur cette terre. Le prêtre le dirige alors vers un mystérieux jardin caché au milieu de la forêt dans lequel il devrait trouver une couleur rare qui lui permettrait de réaliser la peinture qu'il souhaite. C'est dans ce jardin, rappelant les Champs Elysées, qu'Alone rencontre la mystérieuse Pandore et que s'ouvre à lui la voie qui l'amènera à devenir la nouvelle incarnation d'Hadès, le dieu des Enfers.
De son côté, Tenma est habité depuis tout jeune par une étrange puissance qui lui permet de ressentir l'univers. Il est repéré par Dohko de la Balance, l'un des 12 chevaliers d'or de la déesse Athéna, qui lui propose de l'emmener au Sanctuaire en Grèce afin de suivre une formation de chevalier pour protéger la justice et la paix sur Terre. Tenma accepte afin d'acquérir le pouvoir de protéger Alone et les autres orphelins lorsqu'il reviendra une fois devenu chevalier.
Tenma et Alone sont alors séparés pendant deux années mais ils se sont faits la promesse de se retrouver un jour. D'ici là, Tenma sera devenu le chevalier de bronze de Pégase et la vision du monde d'Alone aura changé de couleur...
Shiori Teshirogi rompt donc avec la tradition des séries Saint Seiya. Loin de s'engager directement dans une succession de combats, elle prend avant tout le temps de poser son histoire et de développer les personnages qui seront au centre, et cela avant même que la guerre sainte ne commence, que Tenma soit chevalier et qu'Alone devienne Hadès. Car pour que son histoire fonctionne, il fallait d'abord qu'elle arrive à nous faire croire à cette amitié sur laquelle repose tous les enjeux du titre. Et elle y arrive bien: les deux personnages principaux sont attachants et leurs caractères sont bien posés. Les éléments sont bien amenés (rien qui ne sorte d'on ne sait où), les dialogues sont bien écrits et il y a une réelle émotion qui se dégage de ces deux personnages. Cet âge d'innocence ne va bien sûr pas durer et certains événements auront tôt fait de commencer à les changer afin que leurs retrouvailles (brièvement entraperçues au début du tome) ne soient pas aussi chaleureuses qu'on ne l'aurait espéré et marquent véritablement le commencement de la guerre sainte.
Déjà là, on sent une richesse de narration et de caractérisation des personnages encore inédites dans la saga. Tout n'est pas parfait, la transition d'Alone à Hadès peut paraître un peu soudaine par exemple (encore que la scène en question est l'une des plus marquantes du tome), mais on sent déjà une réelle existence chez ces personnages qui se définit à travers leurs actes et leurs paroles. Rien n'est jamais amené de manière superficielle, leur psychologie est suffisamment travaillée (bien qu'on reste dans certains stéréotypes) et on les voit évoluer progressivement à mesure des événements. Déjà, rien que tout ça, c'est quelque chose que je ne trouve pas dans l'oeuvre originale de Masami Kurumada et qui me permet d'entrer plus facilement dans une histoire. Là, je peux croire à cette histoire, je peux croire à ces personnages et, au final, je pars conquis dès les premiers chapitres.
Maintenant, Saint Seiya ne serait pas Saint Seiya sans ses affrontements épiques et, de ce côté là, je dois dire que ceux qui s'attendaient à retrouver ça en lisant ce premier tome risque de rester sur leur faim. Non pas que les affrontements ne soient pas épiques (quoi qu'ici...), ils vont le devenir assurément. Mais c'est surtout qu'il n'y en a pratiquement pas. Outre trois spectres qui se font directement tabasser par le charismatique Dohko de la Balance (celui-là, il va plaire aussi bien aux lecteurs qu'aux lectrices, mais pas pour les mêmes raisons), l'affrontement principal du tome implique un spectre d'Hadès sans le moindre charisme et qui ne nous donne pas une première bonne impression sur les combats à venir. Déjà, je trouve qu'il y a un côté presque malsain de faire du premier adversaire suffisamment important de la série une sorte de ver avec des tentacules qui arbore une attitude et des paroles franchement ambigues à l'égard de la pauvre Athéna et qui parle de "cosmos incroyablement puissant" en regardant entre les jambes de la jeune fille. Mais c'est surtout que l'affrontement n'est pas intéressant. Cela peut s'expliquer par le fait que Tenma est encore en apprentissage et ne sache pas encore bien se battre ou par le fait que Shion est un chevalier d'or, donc incroyablement puissant (ce qui permet déjà de donner une idée de la différence de puissance liée à la hiérarchie des chevaliers), mais reste que pour le seul combat valable du tome, ce n'est franchement pas terrible et que ceux qui s'intéressent à Saint Seiya principalement pour ses affrontements épiques risquent de rester sur leur faim sur ce coup.
Cependant, si ce premier affrontement est raté, la mise en scène de Shiori Teshirogi est aussi travaillée que sa narration sur l'ensemble du tome. On prend plaisir à suivre l'histoire, à découvrir ces personnages, et on a déjà quelques scènes très intéressantes comme cette réunion des 12 chevaliers d'or réunis "afin de protéger le Sanctuaire et Athéna", une scène qui annonce superbement tous les événements à venir tout du long de la série (et qui nous proposeront un peu autre chose qu'un énième remake de la bataille fratricide du Sanctuaire). Les différentes scènes illustrant les personnages de Tenma et d'Alone sont également très réussies, notamment celle de la cathédrale qui voit la transformation d'Alone en Hadès ou la fameuse scène du jardin des Champs Elysées qui s'apparente au mythe du jardin d'Eden avec le fruit défendu (la couleur rouge véritable) et le serpent (Pandore). A partir de ce stade, le monde va changer aux yeux d'Alone et ça marque le début d'une longue descente aux Enfers pour le personnage, à mesure que sa vision du monde perde de sa couleur et de sa vie pour devenir "noir et blanc" et austère comme la mort. Enfin, un troisième personnage principal survient un peu plus tard et elle n'est bien sûr autre que l'Athéna de la série: Sasha. Celle-ci s'avère être liée à Tenma et Alone par un lien indéfectible qui remonte à leur passé commun. De quoi compléter le casting de ce qui s'annonce comme une formidable tragédie grecque dans l'univers de Saint Seiya.
Ce premier tome de Lost Canvas nous présente donc un début très encourageant pour le titre avec une histoire intéressante, des personnages attachants et profonds et un réel travail sur la mise en scène et sur la narration de la part de l'auteur (et rien que tout ça, ça suffit déjà à le rendre plus intéressant que l'oeuvre originale à mes yeux). Les fans du Saint Seiya original n'y trouveront peut-être pas tous leur compte (du moins pour l'heure), mais Lost Canvas possède déjà suffisamment d'atouts pour offrir un moment de lecture plaisant et prenant et pour raviver la flamme d'autrefois de certains fans déçus par l'oeuvre originale comme j'ai pu l'être. Car Lost Canvas est, à l'heure actuelle, la seule série Saint Seiya qui me permette de retrouver les chevaliers du Zodiaque tels qu'ils étaient restés dans mes souvenirs d'enfance et de me faire redécouvrir les sensations que me faisait ressentir la série animée à l'époque. Il est surprenant de voir qu'à l'heure d'aujourd'hui ce soit une grande fan du Saint Seiya original qui soit le mieux parvenue à saisir cet esprit et à me le faire à nouveau ressentir, alors que Masami Kurumada lui-même s'enfonce actuellement dans une suite des plus médiocres (Saint Seiya: Next Dimension) qui finit d'achever tout ce qui restait de valable dans le manga initial (adieu les combats dantesques et l'aura épique, bonjour l'humour qui vire à l'auto-parodie involontaire, les mises en scène complètement plates et les combats sans âme qui s'achèvent presque aussi vite qu'ils n'avaient commencé).
Enfin, Saint Seiya, comme toutes les oeuvres, appartient à la génération qui l'a connue et cet univers n'a cessé d'évoluer au fil du temps. Lost Canvas n'est qu'une de ces multiples versions qui ont été crées à partir de l'oeuvre initiale, une version plus modernisée et qui se destine peut-être davantage à un autre public plus jeune que celui de l'époque avec un shonen plus dans l'air du temps. Mais c'est en tout cas le Saint Seiya dont j'avais besoin pour faire vibrer à nouveau la flamme du vieux fan et, en ce sens, ce premier tome de Lost Canvas pose efficacement les bases d'un nouveau grand mythe des Chevaliers du Zodiaque.
Verdict: Très bon.