Mon énorme claque de cette fin d'année, qui me fait penser que je ne défends pas assez cette série !!
Letter Bee 12
Alors qu'il se réjouissait du retour au foyer de Gauche, Lag a aperçu quelques fragments du coeur de son mentor et a compris que ce dernier était encore habité par Noir. En effet, après avoir-reçu la balle-lettre de son élève, le maraudeur découvrit certains souvenirs de son ancienne personnalité et s'en est servi pour tromper son entourage. Mais quelles sont ses réelles motivations ? De son côté, Largo Lloyd est en direction de Bifrost, guidé par Zeal pour pouvoir parlementer avec Lawrence, leader de "Reverse"...
Il arrive quelquefois que le lecteur, assailli dans l'avalanche de sorties, voie son plaisir s'émousser devant l'accumulation et la redondance des titres. Mais, fort heureusement, il arrive parfois qu'une œuvre le sorte de cette torpeur, le ramenant à ses fondamentaux, au cœur de sa passion. S'il ne paye pas de mine par son univers enfantin et féérique, Letter Bee fait pourtant partie de ces séries-là, vous amenant dans un pur moment de magie où le reste du monde ne tourne plus. Pour cela, les ingrédients sont simples, mais si souvent consommés qu'on a pu en oublier la saveur : émotion, intensité, et simplicité.
L'émotion tout d'abord, au travers du début de ce douzième opus si fort en ressentiments, dans un dialogue percutant entre les deux personnages que l'on a appris à aimer dès les premiers temps de la série : Lag et Gauche, qui n'a jamais été aussi Noir. Et pourtant, bien loin d'offrir un volte-face manichéen, le maraudeur démontre un caractère autrement plus ambigu, en exprimant des motivations louables et un cœur qui ne demande qu'à recevoir de l'affection. La scène nous tiraille entre un farouche espoir de réconciliation entre les deux partis, et l'implacable motivation de Noir qui ne peut laisser de place aux compromis. Beaucoup de sentiments se bousculent dans la tête du lecteur en même temps que son héros, Lag, encore plus lacrymal qu'à l'accoutumé (mais de manière justifiée). Le jeune bee devra faire face à des épreuves de plus en plus difficiles que lui réservent la vie, les appréhendant avec une maturité grandissante.
L'intensité, au travers d'un danger planant (au sens propre comme figuré) sur les jeunes facteurs et sur leur monde, avec l'inexorable avancée du Cabernet. Au travers d'une mise en scène presque épique, l'intégralité des effectifs de la ruche postale de Yusari se mobilise pour stopper l'assaut du redoutable insectarmure vers la capitale. Bien loin des missions humaines du tri du courrier, la bataille nous amène vers des aspects bien plus sombres, le monstre laissant bien des victimes sur son sillage. Au même moment, le scénario continue de se consolider, la rivalité entre maraudeurs et bees s'affirment, et les secrets de l'univers ne tiennent plus en place. Tout avance dans une parfaite cohérence, et la spirale de montée en puissance des derniers volumes ne semble plus vouloir s'arrêter, pour notre plus grand bonheur !
Enfin, la simplicité, qui est sans doute l'élément central de la série, là où d'autres oeuvres s'emmêlent dans des considérations grotesques. Derrière les fils d'une intrigue de plus en plus aboutie, Hiroyuki Asada n'en oublie pas le plus important, le cœur, ou autrement dit, la sincérité de ses personnages. Au travers du regard de Lily Comfort, une jeune bee à peine plus âgée que Lag, le lecteur découvre le métier de bee dans sa "normalité", ses difficultés et ses motivations. Personnage immédiatement touchant, Lily est le prisme de tous ces petites abeilles anonymes, qui ne seront jamais appelées à un grand destin, masquées derrière le charisme de notre héros, "l'enfant de la lumière". Et c'est ainsi que le volume vient nous emporter une ultime fois dans toute sa splendeur, nous laissant coi devant sa superbe mise en scène et ses évènements devant lesquels nous sommes bien impuissants.
Ce douzième volume nous rappelle ainsi tous les fondamentaux de la série, tout en continuant à se développer de manière discrète mais cohérente. Sitôt la lecture finie, on se prend l'envie de vouloir la suite, avant de pousser un râle d'agonie alors que la publication française a presque rattrapé l'originale... Et en regardant derrière soi, on se rend compte à quel point cette série est exceptionnelle depuis le début, à quel point il aurait fallu la défendre à sa juste valeur à chaque fois. Merci, Mr Asada, pour ce moment de magie, propice dans cette période de fête, et de nous avoir ouvert à nouveau les yeux sur la qualité de votre œuvre.