
Tome 1:
Depuis quelque temps déjà, nous avons pris pour habitude de découvrir chaque mois un nouveau manga venant enrichir la collection "Shônen Up !" de Kazé Manga. Ainsi, ce mois de septembre déjà fort riche en nouveautés ne déroge pas à la règle, puisque l'éditeur nous invite à découvrir Shikabane Hime, l'un des titres les plus appréciés, actuellement, du célèbre magazine Monthly Shônen Gangan (Fullmetal Alchemist, Doubt, Soul Eater...) de Square-Enix. Un titre attendu dans nos contrées, et dont la popularité lui a d'ores et déjà valu deux saisons animées.
Exterminer 108 morts-vivants. Ne jamais abandonner une mission. Ne jamais se plaindre, même face à la mort. Telles sont les trois règles que doivent suivre à la lettre les Shikabane Hime, des jeunes filles mortes dans les regrets dont les cadavres ont été ramenés à la vie par le Kôgonshû, la branche ésotérique du bouddhisme Shingon, pour combattre les Shikabane, autres morts-vivants en tous genres dont les regrets trop puissants les poussent à rester parmi les humains pour leur nuire.
Makina fait partie de ces Shikabane Hime, et accomplit ses missions en compagnie de Keisei, le prêtre qui en a la charge, attendant de pouvoir enfin atteindre le Paradis.
Ce premier tome nous plonge rapidement dans le vif du sujet, avec une première mission, puis une deuxième, assez classiques mais plantant bien le décor. Ainsi, nous découvrons petit à petit comment est régi le Kôgonshû, organisme gérant les Shikabane Hime et leurs prêtres, et les rôles de ses différentes factions. Nous découvrons également la condition de ces jeunes vierges revenues à la vie, chargées de protéger l'humanité en abattant leurs semblables, et que tout le monde au sein du Kôgonshû ne considère pas de la même manière: si certains ont une vraie estime pour elles, d'autres ne les voient réellement que comme des armes, voire comme une éventuelle menace étant donné qu'elle sont elles-mêmes des morts-vivants. De plus, les Shikabane Hime ont une faculté non négligeable: elles sont quasiment immortelles, peuvent donc se régénérer si leurs membres sont tranchés ou si elles sont mutilées, et il semblerait que la seule façon de les détruire soit de les mettre véritablement en pièces ou de leur exploser le cerveau. Et il en est exactement de même pour les Shikabane simples, sur lesquels nous en apprenons aussi vite plus, notamment lors d'une deuxième moitié de volume nous apprenant que certaines de ces créatures possèdent des pouvoirs uniques appelés "Malédiction" qui les rendent plus fortes, et dévoilant d'ores et déjà, dans les toutes dernières pages du tome, un grand méchant cherchant à détruire le Kôgonshû... Quand on vous dit que les choses vont vite !
En ce qui concerne notre duo de héros, il faut bien avouer qu'il reste encore très lisse. Tout au plus avons-nous dans ce premier tome quelques très vagues fragments du passé de Makina.
Résulte de tout ceci un volume sans temps morts, qui va à un très bon rythme, ne s'attarde guère trop sur le background pour préférer se centrer sur l'action. Ainsi, le mélange est bien dosé, et le lecteur n'a pas trop de choses à emmagasiner dès ce premier volume, la fonction primaire de divertissement n'en est que plus efficace.
D'autant plus efficace que le coup de crayon, sans être foncièrement original, est agréable, fluide, fin, expressif, dynamique, et... gore ! C'est sans doute là l'une des grosses caractéristiques de ce début de série: les effets gores sont très nombreux, notamment grâce aux pouvoirs de régénération des morts-vivants, et il n'est donc vraiment pas rare de voir, par exemple, une tête de zombie continuer à bouger bien que son corps ait été détruit, ou notre héroïne recoller la jambe qu'elle vient de perdre... L'effet sur le lecteur amateur de gore est garanti, d'autant que tous ces effets sanglants sont bien rendus. Ajoutons à cela un découpage et des plans bien trouvés, parfois assez cinématographiques, et l'on obtient un résultat définitivement efficace. La bonne surprise est d'autant plus agréable que, là où l'on s'attendait à tomber sur une série bourrée de fan-service, avec jupes s'envolant allègrement pour laisser paraître petites culottes et autres joyeusetés, il n'en est rien. Tout au plus avons-nous droit à un fan-service léger juste suggéré.
Sorte de croisement improbable entre Gunslinger Girl et High school of the dead, la psychologie fouillée de l'un et le fan-service à outrance de l'autre en moins, Shikabane Hime s'annonce comme un divertissement gore a priori assez simple, ne cherchant pas à révolutionner quoi que ce soit, mais bien mené et remplissant sans problème sa fonction première.
Cependant, un bémol est à noter, concernant des dialogues parfois fades et poussifs. Est-ce la faute à la traduction ou au texte d'origine ? Le mystère reste entier...
En tout cas, en dehors de ce doute, l'édition que nous propose Kazé Manga est de bonne facture. On saluera notamment les onomatopées, entièrement traduites, cohérentes et bien intégrées.
Tome 2:
Keisei se retrouve face à un premier gros ennemi, qui a laissé sa Shikabane Hime Makina dans un piteux état: Akasha Shindô, un ancien moine de Kôgonshû, qui semble créer des Shikabane en poussant des adolescents à se suicider. L'ennemi est d'autant plus dangereux qu'il affiche clairement son objectif: détruire totalement le Kôgonshû! Bien qu'il soit aidé de deux autres membres du Kôgonshû, Rika et Saki, en attendant le rétablissement de Makina, la tâche s'annonce difficile pour Keisei, d'autant qu'Akasha semble désormais appartenir à une redoutable organisation énigmatique: la Multitude...
Avec ce deuxième volume, l'action bat à nouveau son plein, toutefois moins gore que dans le premier tome, mais rendue encore plus prenante par un style graphique qui commence déjà à s'affirmer. Le rythme reste donc soutenu, l'action bien retranscrite et rendue riche par des ennemis ayant des techniques de combat propres.
Mais l'intérêt principal du tome concerne la mise en place, petit à petit, d'une histoire plus élaborée qu'on n'aurait pu le croire au premier abord. De nouveaux personnages apparaissent, certains, comme Rika et Saki, ayant déjà un certain charisme, on attend de voir quel rôle jouera Ôri, le jeune frère de Keisei, qui ignore tout du travail de son aîné mais semble sur le point de le découvrir, la hiérarchie du Kôgonshû se précise légèrement, et les mystères autour de Keisei s'accentuent, notamment quand il déclare ne pas vouloir perdre sa famille une seconde fois... Qu'a-t-il donc vécu par le passé ?
Mais les principaux points gagnant en intérêt concernent clairement Makina et la mystérieuse organisation qu'est la Multitude... Ainsi, le passé dramatique de notre héroïne se dévoile, laissant entrevoir le massacre de sa famille par un étrange groupe se faisant appeler les 7 Etoiles, dont elle cherche désormais, avant tout, à se venger. On apprend également que le charismatique Akasha appartient à la Multitude, organisation encore très mystérieuse, mais qui semble particulièrement puissante, ne serait-ce que par le fait qu'on y retrouve plusieurs factions d'ennemis redoutables... à commencer par les fameuses 7 Etoiles ! Ainsi, la quête vengeresse de Makina se voit directement reliée à la Multitude, et on attend avec impatience de voir quelles conséquences aura cet état de fait.
Dans sa construction, Shikabane Hime rappelle un peu, pour le moment, des titres comme Soul Eater ou autre Kekkaishi: après une introduction plutôt prometteuse qui nous présentait des héros charismatiques, les choses se précisent, les différents éléments de l'intrigue se mettent petit à petit en place, chaque rebondissement en appelle des nouveaux venant enrichir le fond, des personnages alliés et ennemis apparaissent en laissant entrevoir des factions bien plus riches et complexes qu'on n'aurait pu le croire au premier abord, des liens se dévoilent ou tissent peu à peu entre ces divers protagonistes, et on a d'ores et déjà l'impression que l'auteur sait parfaitement où il va. Shikabane Hime commence donc très bien, et s'annonce comme un excellent divertissement, servi dans une édition toujours aussi plaisante, entre une traduction dynamique de bonne facture et des onomatopées totalement traduites et parfaitement intégrées.