La vie de Raffaello Santi, dit Raphaël

Shojo, josei, yuri, yaoï... En d'autres termes voici la rubrique regroupant les genres de manga destinés à un public féminin!
Avatar du membre
Koiwai
Rider on the Storm
Messages : 10736
Enregistré le : 18 avr. 2008, 11:52
Localisation : Lille

La vie de Raffaello Santi, dit Raphaël

Message non lu par Koiwai » 06 janv. 2015, 11:03

Image

La fiche sur le site


L'offre manga a beau rester riche dans notre pays, on ne peut pas dire que le manga "vintage" soit très prisé, et encore moins les shôjo et josei old school, qui sont un peu une "niche dans la niche". Néanmoins, après Moto Hagio l'année dernière chez Glénat, grâce aux éditions Black Box nous avons enfin l'opportunité de découvrir en langue française un autre très grand nom du manga féminin de ces 50 dernières années (50 ans de carrière tout pile en 2014) : Machiko Satonaka, auteure d'une bibliographie très conséquente, dont La vie de Rafaello Santi dit Raphaël est toutefois loin d'être le plus ancien titre puisqu'il date de 1996.

Pour sa première traduction dans notre langue, Satonaka nous offre ici un retour sur la vie de l'un des plus grands artistes de la Renaissance, Raphaël, souvent considéré comme le plus grand peintre de son époque alors qu'il ne vécut que 37 ans. Mais 37 années d'une vie artistique bien remplie, où l'artiste, présentant dès sa jeunesse un fort intérêt pour la peinture hérité de son père, ira jusqu'à mettre ses talents au service de la Papauté, non sans croiser d'autres grands noms de l'époque, comme Léonard de Vinci et Michel-Ange qui seront autant des mentors que des amis.

C'est cette incroyable ascension que nous propose de vivre la mangaka, mais d'une façon bien à elle, puisque si elle reste fidèle aux grands faits ayant marqué la vie du peintre, elle propose une interprétation assez personnelle en montrant comment sa vie privée a pu influer sur sa vie artistique. Ainsi découvre-t-on le parcours du peintre au gré de ses querelles de jeunesse autour de sa belle-mère, de ses relations avec les autres artistes de l'époque et de certains noms importants comme la Papauté ou Chigi, de ses fiançailles arrangés avec la dénommée Maria alors qu'il tombe éperdument amoureux d'une autre femme, Margherita... Chaque étape personnelle semble marquer un renouveau dans sa démarche artistique, la principale évidence restant un amour immodéré our la peinture, qui le poussera à peindre encore et toujours, à ne jamais refuser une demande, jusqu'à l'épuisement.
Machiko Satonaka fait montre de son expérience en matière de narration en mêlant avec beaucoup de clarté et d'intérêt les différentes facettes de son récit, au fil desquelles on prend plaisir à cerner la démarche et les évolutions artistiques de Raphaël, notamment son énorme travail sur la composition de ses oeuvres, véritable renouveau à l'époque. En parallèle, on découvre aussi pas mal de détails sur certains personnages de l'époque, en tête Léonard et Michel-Ange, bien sur, dont l'art est évoqué dans les grandes largeurs, notamment via une opposition assez intéressante entre l'art scientifique de Léonard et l'art passionnel de Michel-Ange. Si bien que le résultat se fait vraiment prenant, y compris si l'on n'est pas spécialement adepte de peinture (j'en suis la preuve : j'en ai un peu honte, mais mon intérêt pour la peinture est proche du néant, j'aurais me^me été incapable de citer une seule oeuvre de Raphaël avant de lire ce manga).

Le principal effort pour le lecteur sera peut-être à faire au niveau graphique, si vous avez du mal avec les aspects un peu trop vieillots. Machiko Satonaka a beau avoir une carrière riche de 50 ans, son style graphique semble avoir peu évolué, et elle offre ici un rendu assez primaire. Si certains personnages secondaires ont un design très sympathique (la dégaine hirsute de Michel-Ange est excellente, Margherita dégage beaucoup de charme...), Raphaël lui-même reste assez lisse. Et si la narration très classique est d'une limpidité sans faille, elle empêche toutefois toute envolée et donne parfois l'impression de raconter les choses sans grand éclat, ce qui fait que Raphaël peine parfois à percer les pages et donne l'impression de rester un peu lisse (au contraire de Michel-Ange, entre autres). Le plus gros problème reste toutefois les reproductions de tableaux, trop sombres... est-ce voulu ? Les décors d'époque, eux, restent assez sommaires mais sont bien présents.

Au bout du compte, malgré ses limites, Raphaël est un one-shot qui vaut sans nul doute le coup, car il offre une très jolie interprétation de la vie du peintre, interprétation encore embellie par les très sympathiques postfaces de l'auteure et de l'historien Haruki Morokawa. Surtout, il s'agit là de la toute première oeuvre traduite en française d'une grande auteure qu'il était assez triste de ne pas pouvoir lire dans notre langue... Merci aux éditions Black Box, en espérant que d'autres titres de Machiko Satonaka suivront !
Image

Répondre