Cherish
La fiche sur Manga-newsDans la première histoire, qui donne son nom au one-shot, Chihiro, une étudiante qui a été élevée par un couple gay, se retrouve chamboulée lorsqu'elle retrouve sur sa route Masanori, son ancien petit ami, qui l'avait laissée tomber après avoir eu vent de sa situation familiale... Ainsi arrive l'heure des explications.
Dans le deuxième récit, intitulé Happiness, Akatsu, employé d'une maison d'édition, tombe amoureux de Kayano, une jeune mère divorcée.
Ainsi, Cherish est en réalité un recueil de deux nouvelles qui se présentent comme les deux premiers travaux de Wataru Yoshizumi, jusque là habituée au magazine pour jeunes filles Ribon, pour le magazine Chorus, flirtant entre shôjo et josei. De ce fait, le contenu de ce one-shot s'annonce un peu plus mature que la plupart des autres titres de la mangaka, voire plus mature que la majorité des shôjo que l'on nous sert habituellement en France.
Ici, adieu les romances lycéennes: la première histoire met en scène une héroïne universitaire, et la deuxième a pour héros un salarié. Qui plus est, deux particularités viennent s'ajouter: Tandis que Cherish met en scène un couple gay, Happiness voit son héros tomber amoureux d'une mère divorcée. Deux thèmes matures, qui ont le mérite de coïncider avec la réalité de notre société contemporaine.
On attendait donc une certaine maturité dans le propos, un abord pertinent de ces deux thèmes. Il n'en sera finalement rien. Dans Cherish, les réflexions sur l'homoparentalité et l'homophobie restent très superficielles, voire inexistantes. Quant à Happiness, il aborde le sujet des mères divorcées avec légèrement plus de pertinence, grâce à un héros à contre-courant des autres hommes se retrouvant dans une telle situation. Si rien n'est très poussé, Akutsu, très ouvert, a au moins le mérite de ne pas repousser la femme dont il s'est épris sous prétexte qu'elle a un enfant, ne lui enlevons pas ce mérite.
En réalité, ce qui déçoit surtout dans le one-shot, c'est l'impression qu'on peut tout y deviner à l'avance, ce qui est surtout dû à la grande facilité des dénouements ou des rebondissements. C'est surtout le cas dans Cherish, où tout partait en réalité d'un bête et facile malentendu. Dans Happiness, quelques énormes hasards et rebondissements largement éculés sont de la partie, pour nous amener jusqu'à un final convenu, mais un peu plus agréable de par le fait qu'il reste assez ouvert.
Scénaristiquement, on doit avouer qu'on s'attendait à mieux, et au final, on a surtout l'impression que Wataru Yoshizumi s'est contentée de reprendre le même type d'histoire qu'elle fait d'habitude pour les transposer dans un contexte vaguement plus réaliste et mature.
Et pourtant, malgré tout, le plaisir de lecture est bel et bien là. Si tout est convenu, l'expérience de Wataru Yoshizumi en matière d'histoires d'amour se ressent à chaque page. Le tout est raconté de manière logique, posée et fluide, et les personnages se révèlent assez travaillés et consistants pour des histoires si courtes. Visuellement, on est heureux de retrouver enfin en France ce trait clair et limpide, typé shôjo sans être exagéré, expressif sans en faire trop. Toutefois, à l'image du fond, la forme reste très sage, convenue, n'ose pas grand chose, et manque un peu de véritables émotions.
Au final, Cherish est un recueil rendu très agréable à lire par toute l'expérience de son auteure, et par son ancrage dans une société un peu plus mature et réaliste qui nous change des amourettes fluettes lycéennes. Malgré tout, si la mangaka rend une copie (trop) proprette qui se suit avec un plaisir certain, on attendait un peu plus de ces deux premiers récits de Yoshizumi dans un magazine plus mature.