Joséphine impératrice

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Koiwai
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Joséphine impératrice

Message non lu par Koiwai » 02 oct. 2013, 23:08

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La fiche sur le site


Tome 1 :

On peut dire qu'actuellement, Yumiko Igarashi, entre divers titres chez Isan Manga et Joséphine impératrice, a le vent en poupe en France. Toutefois, avec Joséphine, c'est la dernière série en date de cette auteure exerçant depuis plusieurs décennies que les éditions Pika nous proposent de découvrir.

Comme son nom l'indique, l'oeuvre nous plonge dans la vie tumultueuse de l'impératrice Joséphine, celle qui fut la principale épouse et égérie de Napoléon, et nous propose de découvrir l'entièreté de sa vie, de sa naissance en Martinique en 1763, à sa mort en 1814. Ce premier tome s'étire de la naissance de Joséphine, alias Rose, jusqu'aux prémisses de la Révolution Française, à une époque où Joséphine ne connaissait pas encore celui qui allait être son plus célèbre mari et l'une des personnalités françaises les plus célèbres. Mais l'on découvrira que dès ses jeunes années, elle eut une vie plutôt mouvementée.

L'auteure du culte Candy Candy étant plutôt adepte des belles romances aventureuses et des destinées folles mêlant mondes bourgeois et tragédies (Georgie nous en est elle aussi témoin), on ne s'étonnera pas vraiment de la voir se pencher sur la vie de Joséphine, un personnage historique visiblement fait pour elle. Pour l'occasion, elle s'est d'ailleurs entourée d'une co-scénariste en la personne de Kaoru Ochiai, et avoue également avoir profité de sa venue à Japan Expo en 2011 pour visiter un maximum de lieux en rapport avec Joséphine.
Et globalement, cela se ressent plutôt bien à la lecture, le premier volume nous offrant des grandes lignes fidèles à la vie de Joséphine : son enfance en Martinique, les drames de sa jeunesse avec la mort de sa soeur Catherine, son arrivée à Paris à un âge encore assez jeune en vue de son mariage avec Alexandre de Beauharnais, la naissance de ses deux premiers enfants, l'échec cuisant de ce premier mariage avec un époux volage, le séjour en couvent à Penthemont... On sent un certain travail de recherche, une volonté de rester fidèle aux grands faits, d'autant que quelques autres figures de l'époque apparaissent un peu, par-ci par-là.

Toutefois, les choses sont plus faibles dès qu'on entre dans les détails. Par exemple, quid du personnage d'Aimée en début de série ? Apparemment, avec un peu de déduction puisque rien n'est précisé, il s'agirait de la dénommée Aimée du Buc de Rivery, un personnage historique qui est une lointaine cousine par alliance de Joséphine, et qui physiquement semble avoir le même âge que notre héroïne dans le manga, alors que normalement elle est à peine née quand elle apparaît. Hum. De même, pour le bien de son récit, la mangaka invente un personnage : Agathon (ou Antoine), beau jeune garçon puis jeune homme qui dans le manga suivra Joséphine pendant toute sa vie en tant que domestique et ami, et qui se pose en narrateur de l'histoire. L'idée est bonne, peut permettre un meilleure immersion, mais a tendance à agacer dès que Yumiko Igarashi s'intéresse de trop près à lui, au détriment de son héroïne.

Il ne faudra donc pas attendre de l'oeuvre une rigueur historique stricte, et à vrai dire on est beaucoup plus proche d'un film de Sissi que d'un documentaire historique. Cela, on le ressent constamment à travers un ton extrêmement romancé, où Igarashi se fait un plaisir de faire ce qu'elle sait faire de mieux... ce qui est également ce qui risque le plus de faire fuir une tranche du lectorat : du bon gros shôjo old-school qui tâche et accumule tous les clichés du genre. Yumiko Igarashi a beau avoir des décennies de carrière, son style n'a pas du tout évolué, est resté profondément ancré dans un style shôjo romantique des années 70, avec des grosses fleurs en guise de décor à quelques reprises, de grands yeux bourrés d'étoiles, une héroïne un peu trop naïve (voire niaise) qui passe du rire aux larmes en un clin d'oeil et pleure souvent pour rien, et des protagonistes globalement manichéens et sans nuances. Alors, certes, voir de nos jours un style graphique qui est autant resté fidèle à lui-même au point de détonner aujourd'hui peut séduire, mais beaucoup de lecteurs risquent toutefois de rester sur le carreau face à certaines exagérations vraiment trop grosses. Sur ce dernier point, notons simplement des cils tellement exagérément surchargés que les yeux des personnages paraissent ouverts même quand ils sont fermés. Outch.

Joséphine impératrice est donc à lire en connaissance de cause : l'aspect historique est plutôt intéressant mais trouve toutefois ses limites dès que l'on creuse un peu trop, et les fans peuvent trouver leur compte dans l'aspect romantique houleux avec manipulations bourgeoises en prime, à condition de s'adapter aux nombreuses exagérations comportementales et visuelles ainsi qu'au manque de nuance des personnages.
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Re: Joséphine impératrice

Message non lu par Koiwai » 31 oct. 2013, 20:20

Tome 2 :

Sa relation avec Alexandre de Beauharnais s'étant dégradée à cause de l'amante de celui-ci, Joséphine vit désormais séparée de son époux. Tentant de reprendre le dessus, elle reçoit alors une lettre venant de Martinique, lui apprenant la mort soudaine de sa plus jeune soeur, et l'état critique de son père. Bouleversée, ne pouvant supporter la situation, Joséphine décide de repartir immédiatement à la Martinique avec ses deux enfants... si elle le peut. Refaisant son apparition, Alexandre souhaiterait garder avec lui le jeune Eugène pour lui offrir une éducation exemplaire, puisqu'il est son héritier. C'est donc uniquement avec sa fille Hortense que Joséphine prend la bateau en direction de son île natale, en laissant derrière elle Agathon, chargé de veiller sur Eugène. Le trajet est l'occasion de faire la rencontre du sympathique Charles Tustier, et de voir la mère et la fille renforcer leurs liens.
Quand elle arrive enfin sur son île, Joséphine ne sait pas encore qu'elle y passera quelques années... et que dans le même temps, l'ombre de la Révolution Française va brutalement arriver sur la France...

Après un début de volume présentant le voyage de Joséphine, le récit entremêle deux axes clairs.

D'un côté, on suit le retour puis le quotidien de Joséphine sur son île natale, où elle retrouve ses parents et de vieilles connaissances qui ont grandi, s'interroge également un peu sur le statut de certaines personnes de basse classe contraintes à travailler avec acharnement sous la houlette des plus riches, et se pose également des questions sur la façon dont elle a pu influencer la vie de la domestique Marion et de son fils, Agathon. Egalement, elle apprend ce qui est arrivé à Aimée, mystérieusement disparue, visiblement embarquée par des pirates, ce qui confirme l'hypothèse du tome 1 selon laquelle il s'agit d'Aimée du Buc de Rivery. Tout ceci est plutôt plaisant, mais, dans le fond, n'apporte pas grand chose, si ce ne sont quelques intermèdes aux événements de plus en plus houleux qui se jouent en France.

Ce qui est plus intéressant, c'est donc bel et bien ce que l'on suit en France : l'arrivée de la Révolution Française, que l'on vit globalement à travers les yeux d'Agathon. Et ce personnage non-historique, inventé par Yumiko Igarashi, prend alors tout son sens, car à l'heure où Joséphine n'est pas un témoin des événements, le jeune homme devient ici un excellent moyen de vivre la Révolution de l'intérieur. D'autant que le statut d'Agathon, domestique faisant donc partie de la basse classe (celle du peuple qui se révolte), mais également très attaché à certains nobles (sa Joséphine en tête), en fait un témoin des événements tout à fait intéressant, en ceci qu'il est partagé entre les deux camps et pose donc un regard assez nuancé sur la Révolution. D'un côté, son amitié avec le cuisinier Jean et son amante la domestique Sylvie sera un excellent exemple de l'horreur que vivaient les pauvres face à la dominations des aristocrates. De l'autre côté, ses brèves retrouvailles avec Sophie, la gamine qui s'était éprise de lui dans le tome 1 et qui a désormais bien grandi, seront un excellent exemple des extrémités injustes qu'a pu avoir parfois la Révolution, où nombre d'innocents furent massacrés. Enfin, Agathon sera aussi amené à croiser la route d'acteurs importants de la Révolution, à commencer par Saint-Just, l'un des leaders des événements, donc la mangaka s'applique à faire ressortir toutes les inquiétantes extrémités. Plus tard, c'est Robespierre qui apparaît, et sans rentrer dans les détails, Igarashi expose de façon plutôt claire les enjeux liés à cet homme allié à Saint-Just, qui fut le principal instigateur de la Terreur et de ses exécutions en masse à la guillotine.

Ce deuxième tome se révèle donc étonnamment riche, un brin nuancé dans la vision de la Révolution Française, qui est présentée dans tout ce qu'elle a apporté de bon, mais aussi de mauvais. Après un premier volume plutôt plaisant mais un peu maussade, on ne s'attendait pas forcément à un tel regain d'intérêt, d'autant que Yumiko Igarashi emballe volontiers le tout dans sa patte shôjo, sans non plus en faire trop cette fois-ci. Bien sûr, son coup de crayon très old school et exagéré est toujours là, et quelques éléments très faciles sont de la partie (Agathon qui avait pressenti le retour de Joséphine et se pointe là où il faut quand il faut, comme par magie, pour l'accueillir... Mais bien sûr...). Enfin certains relents de romance tragique sont un poil too much (les soudaines retrouvailles avec Sophie malgré ce qu'elles apportent, puis les retrouvailles de Joséphine et Alexandre en fin de tome), mais dans un contexte où la mangaka n'occulte pas les drames (le sang et la violence sont là), ils se révèlent étonnamment prenants.
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Re: Joséphine impératrice

Message non lu par Koiwai » 30 mars 2014, 12:28

Tome 3 :

La Terreur touche à sa fin avec l'assassinat de Robespierre et l'exécution de bon nombre de ses alliés, dont Saint-Just, l'ami d'Agathon. Rose est libérée, retrouve ses deux enfants, et, par l'intermédiaire de son amie Thérésa promise au dénommé Jean-Lambert Tallien, retrouve la vie mondaine de Paris et devient l'une des figures des grands salons de la capitale.
C'est dans ce tout nouveau cadre qu'elle est bientôt amenée à rencontrer une jeune, timide et petit général destiné à devenir : Napoleone di Buonaparte. Elle se souvient à peine de son nom, mais lui a le coup de foudre pour elle, à tel point qu'il demande de l'aide à Agathon pour la faire sienne. Rose ne sait pas encore que quelque temps plus tard, elle épousera cet homme qui la propulsera au premier rang de l'histoire française.

La rencontre entre Rose/Joséphine et Napoléon : pour une auteure comme Yumiko Igarashi, qui raffole des histoires d'amours occidentales ultra embellies et avec belles robes à la clé, c'est du pain béni, et la mangaka se lâche donc... un peu trop, au point d'oublier un peu en route le contexte historique qu'elle avait si bien dépeint pour la Révolution dans le deuxième volume.

Bien sûr, la mangaka n'oublie pas de reposer les bases de l'Histoire de France autour des principales figures : Tallien, Barras, et évidemment Napoléon Bonaparte et la manière dont il va devenir un général de premier ordre. Mais au-delà de ces quelques éléments et des grandes lignes tout justes évoquées (par exemple la guerre contre l'Angleterre et les révoltes anti-révolutionnaires venant d'Italie ou d'Autriche, simplement nommées), Igarashi préfère éviter d'entrer dans les détails et occulter certaines réalités historiques qui briseraient son souci de romantisme dans la relation naissante entre son héroïne et Napoléon. La richesse historique de l'époque passe donc en grand partie à la trappe, au profit des soirées mondaines avec robes à froufrous et de l'histoire sentimentale, ponctuée de quelques rebondissements à vocation humoristique ou plus dramatique, mais dans tous les cas assez vains. Pendant que Napoléon joue les jolis coeurs maladroits en étant épaulé par un Agathon qui est plus que jamais l'oeil du lecteur, le témoin privilégié de ce qui se passe, on assiste à des petits rebondissements assez insipides, comme la fuite d'Hortense qui ne veut pas d'un nouveau père, ou la visite de la médisante famille du général. C'est bien mignon, mais c'est vain.

Cette fois-ci, l'équilibre entre romance naïve et Histoire est beaucoup moins bien équilibré. Yumiko Igarashi se laisse un peu trop aller dans ce qu'elle préfère, au point de trop déformer le contexte de son histoire et de survoler pas mal de choses importantes. Les amateurs de romances mondaines et jolies robes devraient trouver leur compte, les autres risquent fort de rester sur leur faim.
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Re: Joséphine impératrice

Message non lu par Koiwai » 06 août 2014, 13:57

Tome 4 :

Suite et fin, dans ce quatrième volume, du destin incroyable de Joséphine de Beauharnais raconté par Yumiko Igarashi. Un dernier volume qui, après la mariage de Joséphine avec Napoléon, s'applique à reprendre les grands événements historiques qui ton marqué la carrière politique et militaire de celui qui devint l'Empereur des Français, pendant que, de son côté, son épouse gérer le quotidien familial, lui aussi ponctué d'épreuves.

Entre ces deux aspects, la mangaka trouve un certain équilibre.
D'un côté, elle n'omet aucune des grandes étapes de l'ascension de Napoléon, de la campagne d'Italie jusqu'à la fin de son règne, en passant par la fin du Directoire, son sacre, la création du code civil... Un parcours où Igarashi offre un rôle toujours plus important à Agathon, son personnage inventé pour les besoins de la série, le jeune homme se retrouvant en facteur important de la réussite de Napoléon, en agissant notamment dans l'ombre.
De l'autre côté, on suit évidemment le parcours de Joséphine, l'éducation de ses enfants, le mariage de ceux-ci, son amour pour le château de Malmaison ou pour les fleurs, et les manigances de la famille de Napoléon, à laquelle elle doit faire face. Sans oublier, bien sûr, les évocations les plus grandioses de son destin : son couronnement en tant qu'Impératrice des Français, les nouvelles d'Aimée... et le soutien indéfectible qu'lele a toujours apporté à Napoléon et que ce dernier lui a toujours apporté, malgré la distance qui les a souvent séparés.

Ce que Yumiko Igarashi retranscrit le mieux est sans doute cet amour passionné unissant Joséphine et Napoléon, au-delà de toutes les épreuves, car en dehors de ça, même, si la mangaka s'applique à évoquer beaucoup de choses, elle reste très artificielle dans son traitement, mais comment pouvait-il en être autrement ? Evoquer tout le parcours commun de Joséphine et Napoléon en un petit tome relevait de l'impossible, et le tout reste donc décrit simplement en surface, avec au passage quelques légères imprécisions historiques (rien de grave) et des libertés prises pour les besoins du récit, à commencer par tout ce qui concerne le fictif Agathon.

Au final, globalement, Joséphine Impératrice aura été une lecture plaisante, Yumiko Igarashi, malgré des faiblesse évidentes, ayant su trouver un équilibre entre Histoire et fiction pour croquer avant toute chose et de façon un peu fantasmée un parcours presque idyllique, qui peut laisser rêveur : l'un des destins de femmes les plus incroyables de l'Histoire de France.
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