Yukito

Rubrique consacrée aux seinen, c'est à dire des séries se destinant à un lectorat adulte.
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Koiwai
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Yukito

Message non lu par Koiwai » 08 mai 2014, 22:49

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La fiche sur le site


Tome 1 :

Dans le quartier de Shinjuku, près du district de Kabukichô et de ses repaires de yakuzas, Ann et son amie Eri cherchent un homme à attirer dans l'un des bars-arnaques de la mafia japonaise. Leur regard s'arrête sur un homme qui semble à moitié perdu, vêtu u peu comme un campagnard. C'est décidé, leur cible du soir, ce sera cet homme. Eri n'a aucun scrupule, mais Ann, elle, le sent : cet homme aux yeux clairs n'est pas comme les autres, et il le confirmera une fois dans le bar. Remarquant à peine qu'il s'est fait arnaquer par les deux jeunes filles, il fait face aux yakuzas sans la moindre intention de payer la somme astronomique qu'on lui demande, en répétant inlassablement la même question : où trouver le clan Tashiro. Il ne sait pas encore que le clan qu'il recherche n'existe plus depuis dix ans, mais une chose est déjà sûre : Yukito, littéralement "l'homme des neiges", froid et impassible, va semer le trouble dans le quartier mafieux de la capitale...

Déjà connue en France pour l'excellent Professeur Eiji, Akiko Monden nous revient avec l'adaptation d'une série de romans noirs du célèbre auteur Arimasa Osawa. L'oeuvre, qui nous plonge au coeur d'une enquête sombre dans le monde des yakuzas, pose son ambiance dès les premières pages, avec un héros qui impose d'emblée sa froideur et sa détermination à retrouver le clan Tashiro, et un milieu yakuza honnêtement dépeint. Ainsi assiste-t-on dès le départ, en guise d'introduction, à l'une des plus célèbres arnaques de Kabukichô, puis voit-on le récit s'approfondir peu à peu au coeur du milieu yakuza, auquel Yukito, pour atteindre son but mystérieux, va devoir se confronter. Au fil des pages, le jeune homme rencontre quelques figures typiques : un yakuza très secret en la personne de Miyamoto, un inspecteur de police un brin désabusé mais serviable gérant comme il le peut les clans de son district (comme il le dit, Shinjuku est son domaine), des mafieux qui ne demandent qu'à être moins tendre si on les prend pour des imbéciles, et bien sûr les jolies jeunes filles trouvant leur beurre dans toues ces manigances, dont une Ann qui ne reste pas insensible à Yukito.

Mais que recherche Yukito ? Pourquoi tente-t-il de retrouver la trace d'un clan disparu depuis 10 ans ? Pas de grosse originalité de ce côté-là, on devine très vite qu'on tient une belle affaire de vengeance filiale déterminée, mais ce scénario de base en profite habilement pour développer toujours plus le milieu où il prend place, l'arrivée de Yukito attirant les regards sur lui, et réveillant des rivalités entre clans, des menaces, des morts et des secrets vieux d'une douzaine d'années, où devraient se révéler les ambitions et envies de vengeance d'autres personnes, et où fleure déjà un nouveau parfum de mort...

L'élément qui pourra irriter le plus concerne la "perfection" de Yukito : beau, élancé, mystérieux, beau parleur, très perspicace et sachant aussi se battre, il possède aussi un côté très pur et naïf lui offrant la note de fragilité qui va bien. Il reste néanmoins un personnage assez fascinant et plaisant à suivre dans sa quête. Il faut également souligner la qualité des dessins d'Akiko Monden, aussi précis et profonds que propres et clairs, ils ont tout pour séduire un large public et entretiennent l'ambiance captivante de la série.

Une enquête sous forme de polar en milieu yakuza, voila comment se présente Yukito. La série démarre bien, l'univers de Shinjuku/Kabukichô étant bien mis en place, et l'intérêt étant déjà bien entretenu par les mystères liés à la quête du héros et au réveil des vieilles ambitions et rivalités mafieuses.

Quel dommage, par contre, que l'édition de Panini soit si médiocre... Le papier rêche est une horreur, l'impression souffre de pas mal de problèmes de moirage... A 8,99€ le tome, ça fait mal.
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Koiwai
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Re: Yukito

Message non lu par Koiwai » 07 août 2014, 18:55

Tome 2 :

L'enquête de Yukito lui a permis de remonter jusqu'à un mafieux, Koji Karibe. Mais celui-ci est assassiné juste avant que notre héros ne le retrouve. Près du lieu du crime, Yukito et l'inspecteur Sae ont croisé un homme étrange, blond à la mine dépourvue de sentiments et nommé Niijima...
Au crématorium, lors de la cérémonie funèbre de Karibe, Yukito et Tamao tombent sur le yakuza Miyamoto. Yukito le surprend en train de parler vivement avec Chikamatsu, son supérieur dans le clan Shinyo et lui aussi ex yakuza du clan Tashiro. Il semble que les deux hommes soient en désaccord sur la place de Miyamoto dans le clan Shinyo, et sur la fidélité bornée que Miyamoto offre toujours à Tashiro.
De son côté, Ann, désireuse de venir en aide à Yukito, entre en contact avec Kamoshita, l'homme d'affaire officiant dans le commerce de voitures d'occasion. En le retrouvant dans un bar, la jeune fille découvre par la même occasion le fameux Niijima. A force de vouloir aider Yukito, elle se met elle même dans une situation de plus en plus dangereuse...

La mort de Karibe, la situation dans le clan Shinyo, et les recherches autour du mystérieux et insensible Niijima : au fil de ce deuxième volume, ces différentes pistes se rejoignent comme autant d'éléments permettant à Yukito de progresser dans son enquête. Mais il en est de même pour le yakuza Miyamoto, qui, de son côté, est résolu à remuer un passé bien enfoui pour découvrir toute la vérité sur ce qui est arrivé à Tashiro. Petit à petit, Yukito et Miyamoto en arrivent à remonter un même fil, pour un résultat saisissant dans son ambiance et dans sa clarté. Akiko Monden mène à merveille son récit, en faisant remonter par petites touches les secrets les mieux gardés des manigances animant les clans mafieux de Shinjuku, et en entretenant un suspense habile autour de ses protagonistes. Que Chikamatsu cache-t-il à Miyamoto ? Qui est exactement l'austère Niijima, et quel est son lien avec Kamoshita et avec le clan Shinyo ? Quel terrible passé effraie Tamao ? Et, dans l'ombre, qui tire réellement les ficelles ?
Certaines bribes de réponses arrivent, notamment dans une fin de tome nous plongeant dans une situation toujours plus complexe.

En parallèle, Akiko Monden rend son récit encore plus immersif, en faisant joliment évoluer certaines relations (dont celle entre Yukito et Ann), en offrant un peu d'action mise en scène avec limpidité, et en exploitant certaines ficelles propres à l'univers des yakuzas : la loi antigang compliquant les affaires de mafieux, l'arrivée de la pègre étrangère... Surtout, la mangaka, avec son trait fin, précis et léché, parvient à croquer des protagonistes tous différents et fascinants, qui vivent réellement à travers les pages et ont quelque chose à apporter à l'intrigue. De notre impassible héros au classieux yakuza expérimenté Miyamoto, en passant par un Chikamatsu sur le déclin, une Tamao tourmentée, un inspecteur Sae impliqué, une Ann naïvement éprise ou un Niijima aussi inquiétant que mystérieux, la mangaka offre une superbe galerie de personnages tous intéressants, un point sur lequel elle avait déjà excellé dans sa précédente série, Professeur Eiji.

Avec ce deuxième volume, Yukito confirme tout son potentiel. L'histoire avance doucement mais sûrement, avec clarté et de manière immersive, en faisant peu à peu remonter de nombreux secrets, y compris les mieux gardés, et en entretenant une aura de mystère fascinante. La série n'a sans doute pas fini de nous régaler.
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Re: Yukito

Message non lu par Koiwai » 13 avr. 2015, 15:26

Tome 3 :

A la recherche de nouveaux éléments concernant la mort de son père, Yukiro décollé pour sa ville natale d'Akita, non sans avoir pris note de l'ultime recommandation de Miyamoto : se méfier de l'inspecteur en chef Kurebayashi...
Une fois sur place, il retrouve son grand-père matagi chez qui il loge, et poursuit ses investigation en retraçant l'enfance de Niijima.
D'un côté, son enquête continue de révèle de nouvelles vérités terribles sur les événements horribles qui ont pu conditionner Niijima. De fil en aiguille, il se retrouve également sur la piste d'Oda, un policier participant secrètement à un trafic de drogue avec les Russes...
De l'autre côté, ses retrouvailles avec son grand-père le poussent à faire la connaissance d'un homme qui aura une importance capitale pour la suite des événements : Harunobu Mukai, second du clan Yamato, le clan le plus important du pays...

S'il y a clairement quelques grosses ficelles (comme par hasard, le client du grand-père de Yukito est un yakuza de première importance...), Akiko Monden gère toujours aussi bien son adaptation de l'oeuvre d'Arimasa Osawa, les investigations de Yukito révélant petit à petit les vérités sur Niijima/Nitta, sur le trafic de drogue des Russes et sur le commerce de voitures de Kamoshita. Les éléments se dévoilent les uns après les autres et se rejoignent, pour un résultat cohérent où Yukito n'est plus très loin de lever le voile non seulement sur une affaire de grande ampleur, mais également sur la mort de son père.

En parallèle, la situation continue d'évoluer aussi du côté du clan Shinyo, où Miyamoto et Chikamatsu se confrontent à l'occasion de la passation de pouvoir, tandis que la cabale policière contre les yakuzas se poursuit...
Le parallèle entre Miyamoto et Yukito est intéressant : bien que faisant partie de milieux que tout oppose (la police d'un côté, les yakuzas de l'autre), ils sont tous deux droits et restent fidèles à leurs principes, cherchant simplement à "venger" leur "père (qu'il soit biologique pour Yukito, ou non pour Miyamoto). Et leur parcours ne fait que confirmer qu'il y a des hommes droits et des pourris autant dans la police que chez les yakuzas...

Le trait fin et un peu froid de la mangaka, lui, continue de nous immerger efficacement dans ce récit policier, de même que les renvois bien dosés aux origines matagi de notre héros.

Après trois tomes, Yukito reste une très bonne lecture, malgré l'édition médiocre de Panini qui est plombée par un papier trop rêche et une encre qui reste sur les doigts.
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Re: Yukito

Message non lu par Koiwai » 30 avr. 2015, 07:40

Tome 4 :

Au bout de son enquête à Akita, Yukito a appris l'identité de l'éminence se cachant à la tête du complot ayant provoqué la mort de son père : le haut placé Kurebayashi, celui qu'il considérait en quelque sorte comme un second père. Mais il lui faut désormais savoir s'il s'agissait d'un accident ou d'un meurtre programmé, et c'est avec la ferme intention de rencontrer Kurebayashi qu'il retourne à Tôkyô. Mais il était prévenu : son retour à la capitale va attirer sur lui les menaces de mort, ses ennemis se dévoilant toujours plus. Kamoshita n'est certainement pas prêt à ce qu'on fouille dans ses affaires, et Niijima rôde toujours...

Au fil d'une enquête toujours bien menée, Yukito continue de remonter petit à petit la piste sur la mort de son père, qui se rapproche plus que jamais de la quête de Miyamoto pour faire tomber le clan Shinyo et Chikamatsu. Quel fut le rôle de Chikamatsu il y a 10 ans lors de la mort du père de Yukito et la tentative d'assassinat de Tashiro ? Celui de Kurebayashi ? Quel rapport a Kamoshita avec tout ça ? Les pièces de puzzle continue de s'emboîter brillamment, avec clarté, tout en permettant de révéler toujours mieux les facettes des personnages : le passé tortueux du sinistre Niijima qui reste plus que jamais l'antagoniste le plus inquiétant de la série, son lien presque fusionnel avec Karibe, son absence d'émotion le confinant à une sorte d'inhumanité, l'identité réelle de Kamoshita, la relation de Miyamoto et Tamao, les manigances de Kurebayashi pour maintenir un équilibre entre police et yakuzas et contrôler tout le monde...

Face à tout ça, on appréciera la bonne exploitation des quelques soutiens de Yukito, dont Miyamoto, l'inspecteur Sae, et Ann qui montre qu'elle a clairement évolué depuis l'époque où elle sortait la nuit. Mais le coeur de Yukito est celui d'un matagi, un chasseur solitaire : c'est en restant fidèle à ses principes droits et en évitant de trop exposer ceux en qui il tient qu'il ira affronter les adversaires, quitte à devoir donner de sa personne quand la situation l'exigera. La droiture et la détermination de notre héros restent eux aussi très bien campés.

A un tome de la conclusion, Yukito confirme à nouveau ses qualités de polar aussi immersif qu'efficace, d'autant qu'Akiko Monden s'applique bien à retranscrire milieu policier et milieu yakuza en tant que deux facettes d'une même pièce, et que son trait maîtrisé dépeint à merveille cet univers aussi classieux que sauvage.
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Re: Yukito

Message non lu par Koiwai » 07 août 2015, 14:20

Tome 5 :

Au fil de sa tumultueuse enquête, Yukito a fini par remonter la piste du meurtrier de son père, et les choses semblent concorder vers un homme : Kurebayashi, celui-là même qui endossa pour lui le rôle de père spirituel. Pour prouver sa culpabilité, le jeune homme doit désormais capturer le dénommé Kamoshita, petite frappe trempant dans des affaires en rapport avec, encore eux, les yakuzas. A cette occasion, Yukito est fait prisonnier, et Kamoshita lui révèle alors une information bousculant à nouveau les choses : il est l'ancien partenaire de son père, mais aussi son meurtrier ! Où se situe la vérité ? L'heure est venue pour Yukito de lever tous les mystères de cette affaire... et il doit faire vite, car le danger arrive de partout. Le yakuza Wakamatsu est déterminé à le tuer, et engage Niijima dans ce but. Le tueur élimine d'abord Kamoshita et, pour coincer Yukito, choisit de s'en prendre à Ann...

L'heure du grand final de Yukito est arrivée dans un dernier tome qui file à une vitesse folle en entretenant à merveille la tension. Elégant et apte à plaire autant aux femmes qu'aux hommes grâce à sa finesse et à sa puissance, le trait d'Akiko Monden apporte une ambiance à la fois classieuse et brutale à ce polar qui, jusque dans ses dernières pages, est mené de main de maître.
Il faut dire qu'en se basant sur l'oeuvre originale d'Arimasa Osawa, la mangaka a déjà un scénario tout tracé, et elle prend soin de ne jamais s'égarer de cette optique. En résultat un récit qui ne comporte aucune errance et n'a rien à jeter. Les dernières vérités se dévoilent, le suspense de ce dernier opus est constant et ne se fera pas sans quelques morts et sacrifices souvent marquants voire touchants, en tête le tout dernier de l'oeuvre. A chaque nouvelle avancée, Akiko Monden continue d'utiliser au mieux les caractéristiques de son récit (le lien entre police et yakuzas qui sont un peu les deux faces d'une même pièce, le statut de fils de matagi de Yukito...), et s'applique parfaitement à dévoiler en profondeur ses personnages, chacun ayant bel et bien un rôle qui lui est propre. Aucun n'est à jeter. De Yukito, notre héros, à Ann qui devient son soutien amoureux, en passant par Kurebayashi, le bon policier Sae... sans oublier le charismatique yakuza Miyamoto et ses relations avec la belle Tamao ou avec son frère ennemi Wakamatsu...

Si vous êtes à la recherche d'un bon polar (genre beaucoup trop rare en France en manga) utilisant notamment à bon escient les liens entre police et yakuzas, Yukito est la série qu'il vous faut. Seulement cinq tomes, pour une histoire rondement menée, qui ne s'égare jamais et qui est visuellement excellente.
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