Orange

Rubrique consacrée aux seinen, c'est à dire des séries se destinant à un lectorat adulte.
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Koiwai
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Orange

Message non lu par Koiwai » 10 oct. 2014, 07:25

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La fiche sur le site


Tome 1 :

Début juillet, nous avons enfin pu découvrir en langue française Ichigo Takano - mangaka devenue culte dans son pays en à peine quelques titres - avec Dreamin' Sun, un titre choisi par Akata pour Delcourt avant la fin de leur collaboration. Rien d'étonnant, alors de voir arriver dans le catalogue des éditions Akata l'oeuvre la plus emblématique de l'auteure, Orange, qui s'est forgée ces dernières années une solide réputation, et qui a été accueilli comme il se doit lors de son annonce pendant Japan Expo.

Orange commence pourtant presque comme de nombreux shôjo romantiques. A Matsumoto, grande ville perdue au milieu de la nature de la préfecture de Nagano, Naho, 16 ans, entame sa deuxième année de lycée aux côtés de ses amis Azu, Takako, Suwa et Hagita. Leur quotidien animé s'enrichit de l'arrivée dans leur classe d'un tokyoïte, Kakeru, garçon à première vue un peu distant, mais qui finit par très vite se laisser conquérir par la joie de la petite bande, emmenée notamment par le sociable Suwa. La vie suit son cours, Kakeru s'intègre bien, sympathise facilement, notamment avec Naho, qui tombe irrémédiablement amoureuse de lui.

Vous sentez venir le banal shôjo ? Vous faites fausse route, car il y a un mais, et il est de taille : au moment de la rentrée, Naho a reçu une longue lettre, arrivée du futur, et écrite par elle-même 10 ans plus tard. Celle-ci décrit tous les événements qui vont arriver à l'adolescente dans les prochains mois. La jeune fille a d'abord du mal à y croire, mais elle est rapidement forcée de se rendre à l'évidence : tout ce qui y est raconté est vrai et se réalise : l'arrivée de Kakeru, des petits éléments en apparence anodins qui auront pourtant leur importance comme le choix ou non de participer à un match de softball, l'instant où Naho va définitivement s'éprendre de Kakeru... A travers cette lettre, Naho peut prendre connaissance de son futur des mois à venir, et celle qu'elle est devenue 10 ans plus tard lui demande de changer certaines choses. Car la Naho de 26 ans entretient depuis dix ans de profonds regrets, liés à des décisions qu'elle n'a pas su prendre, à des choses qu'elle n'a pas su voir à temps, à ses sentiments... et à plus grave encore. On n'en dira pas plus pour ne pas gâcher la petite surprise (bon, on s'y attend, mais quand même), mais les enjeux deviennent autrement plus importants dès la fin du premier chapitre.

Avoir la possibilité de changer le cours de sa vie, pouvoir revenir sur son passé pour en effacer les erreurs et les regrets : en seriez-vous réellement capable ? Ichigo Takano pose la question à travers son héroïne, que l'on suit à deux époques différentes.

La Naho de 16 ans a une chance d'influer sur son avenir pour avoir une vie moins remplie de regrets, mais aura-t-elle seulement assez de force pour prendre certaine décision, et le souhaite-t-elle seulement ? Elle ne souhaite d'abord pas connaître son futur, laisse la lettre dans un coin, mais est très vite poussée à retourner la voir par la force des événements, et elle se rendra vite compte de l'importance de sa "mission", qui n'influera pas sur son seul bonheur, mais aussi sur celui de tout son entourage, à commencer par ses amies et par Kakeru. Pour Naho, il s'agit alors de prendre son courage à deux mains, d'oser faire les choix qu'elle n'a pas osé faire dans sa "première chance"... Mais on ne change pas si facilement : Naho, jeune fille qui a toujours été plutôt timide au point de s'effacer, pense aux autres avant elle-même au point d'avoir un fort instinct maternel, aura toutes les difficulté du monde à se changer elle-même et à changer certains événements.
Difficile de ne pas s'attacher à cette jeune fille, héroïne pourtant assez typique, parfois un peu énervante dans son côté passif, mais qui se dévoile beaucoup à travers l'étrange mission qu'elle vit. Malgré son manque d'assurance et son incapacité à franchir certains caps, elle possède en elle une réelle bienveillance et une volonté forte de changer les choses. Elle continue, comme si de rien n'était, sa vie joyeuse et insouciante en compagnie de ses amis, qui sont tous délicieux à suivre. Suwa est un bon garçon qui cache ses sentiments derrière sa sociabilité et sa bienveillance, Azu et Takako sont des amies complémentaires sur lesquelles on peut compter, seul Hagita est un peu plus en retrait car de base plus solitaire, et on espère le voir plus sur le devant de la scène. On suit avec plaisir ce groupe d'adolescents profitant de sa jeunesse, car c'est frais et ça sonne très juste dans les relations. Mais dans ce cadre en apparence si insouciant, Naho est la seule à savoir ce qui va arriver, à connaître l'important bouleversement qui risque de tout changer.

De l'autre côté, il y a la Naho de 26 ans, que l'on suit aussi avec beaucoup d'intérêt à travers quelques "flashbacks venus du futur", et qui soulève une somme considérable de thèmes forts les regrets face à ce qu'on a fait ou pas, la peur de l'avenir, la mort des proches, le deuil ou le suicide. Des choses auxquelles tout le monde est confronté, et qu'Ichigo Takano met en avant avec une certaine puissance en utilisant comme il se doit la touche fantastique de son histoire. On se demande également ce qu'elle deviendra si sa vie d'adolescente change.

Il se crée alors une dualité originale, tout en contrastes mais complémentaire, entre l'apparente insouciance de la vie des lycéens, et des thèmes matures qui cristallisent les douleurs d'adolescents et de jeunes adultes. Une dualité qu'Ichigo Takano expose à merveille à travers une narration maîtrisée, claire, sensible sans être pathos. Les pensées/conversations par lettre interposée de la Naho de 26 ans pour celle de 16 ans, ou les questions adressées à la Naho adulte par la Naho adolescente, sont autant de jolis instants accentuant le ressenti, ce procédé rappelant notamment beaucoup les paroles et questions que Hachi et Nana s'adressent à travers le temps dans Nana.

Dans son mot de début de tome, Ichigo Takano affirme qu'elle n'est pas douée en dessin... On n'est pas d'accord avec elle ! Son travail graphique contribue grandement aux qualités du récit.De base, son coup de crayon est assez classique, mais il est précis, doux, assez chaleureux, et sait dégager beaucoup d'émotions nuancées chez les personnages. Sa narration est parfaitement mise en valeur via un découpage et une mise en scène sobres mais limpides. Et l'auteur s'applique beaucoup à dépeindre la ville de Matsumoto, qu'elle connaît bien, en croquant des liux inspirés de la réalité et en dégageant comme il se doit le charme de cette cité réputée pour être un endroit où il fait bon vivre.
Originellement débutée dans le magazine shôjo Bessatsu Margaret des éditions Shûeisha, la série a connu quelques tourments dans sa parution en changeant d'éditeur et de type de magazine, l'arrivée chez l'éditeur Futabasha s'étant accompagnée d'une prépublication dans le Gekkan Action, un magazine plus orienté adulte et mixte. Un choix pertinent, car si Orange possède de base une sensibilité plus féminine, son récit a vraiment de quoi parler à tous les publics.

En exploitant parfaitement ce qu'elle met en place, Ichigo Takano croque une histoire touchante et poignante, où les instants de bonheur insouciant se mêlent à merveille à des thèmes forts. On se prend totalement au récit, on se demande comment on réagirait à la place de la Naho adolescente, on se surprend à ressentir des émotions proches de la Naho adulte... Non, la solide réputation de la série n'était pas volée. Seuls les petits aléas que la parution japonaise a connus pourraient freiner un peu, mais maintenant que l'on sait que la série sera courte, il n' y a plus de raison d'hésiter.

En bonus, après les 190 pages du récit principal, Ichigo Takano nous propose de découvrir le premier chapitre (la suite sera dans le tome 2) d'une de ses anciennes histoires, où des jumelles différentes mais inséparables rencontrent un mec visiblement parfait. C'est beaucoup plus classique qu'Orange, l'auteur ne cache d'ailleurs pas qu'elle a dessiné cette histoire principalement pour pouvoir faire des jolies fille et des beaux gosses, mais c'est agréable à parcourir, car bien narré et porté par les quelques tourments de ces deux filles qui se ressemblent comme deux gouttes d'eau.

L'édition proposée par Akata est plaisante, malgré quelques petits couacs très succincts. Le papier et l'impression sont de bonne qualité, malgré un petit effet de transparence des pages peu gênant. La traduction est très fluide et prenante même si quelques rares erreurs d'inattention s'y sont glissées (un "persipace" au lieu de "perspicace", une répétition du "a bien du mal" dans le résumé de couverture...). Et la couverture est superbe... mais très fine, donc faites attention de manipuler votre tome avec soin !
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Koiwai
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Re: Orange

Message non lu par Koiwai » 19 déc. 2014, 08:55

Tome 2 :

Depuis qu'elle a reçu une lettre arrivée du futur et écrite par elle-même dix ans plus tard lui demandant de changer certains événements à venir, Naho s'applique à ne pas répéter certaines erreurs, non seulement pour effacer certains regrets à venir, mais aussi pour éviter les drames qui bouleverseront sa vie et celle de ses amis, à commencer par la mort de Kakeru, le garçon qu'elle aime.
Petit à petit, celle qu_i est si timide et réservée apprend à prendre sur elle, pour suivre les recommandations de la lettre. Elle le fait pour elle, bien sur, mais aussi pour la Naho plus âgée de dix ans, et pour Kakeru et les autres. Et à force de bouleverser certains petits événements, elle se rend compte que, petit à petit, les événements commencent à s'écarter des prédictions. L'avenir est-il en train de changer ? Kakeru sera-t-il sauvé ?... Et cela a-t-il réellement un impact sur la Naho du futur, mariée à Suwa et mère de famille ?

C'est cette dernière question qui anime surtout le début du volume, via un cours sur les hypothèses d'un voyage dans le temps et de ses conséquences. Evidemment, on se demande pourquoi le professeur donne un cours là-dessus, et nul doute qu'il y a un truc louche derrière ça, mais dans l'immédiat on reste surtout captivé par les hypothèses qui se mettent à jaillir en Naho. Sa façon de changer peu à peu l'avenir a-t-elle vraiment une utilité pour la Naho du futur ? A partir du moment où les choses ont changé, leur univers ne se serait-il pas séparé pour éviter les contradictions ? Ichigo Takano reprend à son compte certaines hypothèses propres à la science-fiction, et le fait de façon prenante et maligne, de par l'impact que cela a sur son histoire.

Cette question reste ensuite bien présente, mais c'est évidemment le quotidien des adolescents qui prend le dessus. On continue de suivre une Naho décidée à sauver Kakeru et à modifier l'avenir, mais qui doit encore fournir beaucoup d'efforts pour oser certains choix. Mais son entourage est aussi là pour elle. Ses deux amies sont vraiment géniales dans leur façon de prendre soin d'elle, de veiller à ce que tout se passe bien dans sa relation avec Kakeru, tout comme Suwa, que l'on sait amoureux d'elle et marié à elle dans le futur, montre une abnégation et une envie exemplaire de la voir avant tout heureuse. Ce petit groupe de personnages reste une grande réussite tant elle semble soudée... y compris Hagita, qui reste dans un rôle u peu trop comique pour l'instant, mais se fait plus présent que dans le tome 1 et sait lui aussi se montrer protecteur quand il le faut.
La narration de Takano, maîtrisée, est aussi limpide et touchante dans les événements qu'elle est immersive dans la forte introspection sur Naho, qui forcément s'interroge beaucoup à chaque fois qu'elle découvre un peu plus la lettre. Sa volonté et ses doutes sont très bien retranscrits, on la sent évoluer, prendre conscience de certaines choses comme la bienveillance que Suwa a toujours montrée envers elle, s'interroger sur la façon dont elle pourrait sauver Kakeru... et de ce côté-là, les choses ne sont pas faciles, car elle sent bien que Kakeru, sous ses allures assez heureuses, a lui aussi de graves regrets, et cache de profondes douleurs qu'il lui faut parvenir à extérioriser. Naho devra redoubler d'efforts pour parvenir à lui faire ouvrir son coeur, ce qui aboutit sur nombre de scènes marquantes, dont celle du feu d'artifice à la piscine, ou celle où le jeune garçon semble enfin se confier un peu plus. Mais tout ça sera-t-il suffisant ? Via les doutes constants de notre héroïne qui malgré ses efforts n'a pas pu changer certains faits importants, on devine que rien ne sera simple. Le suspense perdure, tout comme cette ambiance partagée entre les petites joies du quotidien, la mélancolie des regrets et le suspense dramatique. D'autant que l'on découvre les circonstances exactes du décès de Kakeru, on ne peut plus graves.

Enfin, on reste séduit par l'écriture aboutie du scénario, où Takano exploite parfaitement ce qu'elle a mis en place, en offrant un réel impact à chaque événements, à chaque décision. Par exemple, sa demande d'aller voir le feu d'artifice en tête à tête avec Kakeru a ses conséquences sur l'ouverture du jeune garçon, tout comme les événements non changés (à commencer par le fait que Kakeru soit rentré avec tout le monde le premier jour de classe) ont ici un écho dramatique à cause de ce qu'ils ont enclenché.

La seule chose qui pourrait irriter un peu certains lecteurs concerne le personnage d'Ueda, sans doute assez cliché dans son mauvais rôle (mais peut-être nous réserve-t-elle quelques surprises ?). A part ça, Orange confirme ses nombreuses qualités. Après un premier tome prodigieux, le second volume confirme la qualité d'un récit développant à merveille son scénario et ses nombreuses thématiques.
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Einah
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Re: Orange

Message non lu par Einah » 30 janv. 2015, 18:35

Tome 1

Imaginez-vous recevoir un jour une lettre écrite par vous-même mais provenant du futur ? Vous avez dit étrange ? Impossible ? C’est pourtant ce qui arrive à Naho le jour de ses 16 ans. Ce 6 avril, elle reçoit une lettre écrite par elle-même âgée de 10 ans de plus. Les années ont passé et sa « moi du future » est remplie de remords et est rongée par les regrets. Pour pouvoir ne plus avoir de regrets, elle décide de mettre dans cette lettre tous les événements qui se dérouleront et notamment parle de l’arrivé du nouvel élève, Kakeru Naruse. Cette Naho du futur tente ainsi d’influencer la vie de la jeune Naho pour se libérer du poids de ses erreurs passées. Cette dernière écoutera-t-elle celle du futur ? Et surtout croira-t-elle à ce qu’elle lit dans ce courrier ? Et si la jeune Naho décide de changer ce qu’elle vit, quels seront les conséquences de ses actes dans l’avenir ?

Au début de notre lecture, nous sommes comme la jeune Naho complétement dubitative. Comment une lettre peut-elle arriver du futur ? D’un futur de 10 ans qui plus est ? Même si ce point un peu surnaturel n’a aucune réponse dans ce tome, l’auteur nous emmène complétement dans son monde et son histoire. Nous faisons tout d’abord la découverte de la jeune Naho, âgée tout juste de 16 ans. Elle se montre très discrète et manque indéniablement de confiance en elle. En effet, même pour des petites choses du quotidien, elle n’ose pas dire à ses amis ou son entourage ce qu’elle souhaite ou désire vraiment. Elle s’accommode toujours de ce qui lui arrive. Recevoir cette lettre, finalement, bouleverse son quotidien car elle sera amenée à faire d’autres choix pour ne pas avoir de regret et devra se faire violence pour exprimer ce qu’elle ressent. Qui dit shojo dit histoire sentimentale et la jeune Naho ne reste pas indifférente au nouvel élève Kakeru qui montre de l’intérêt pour la jeune fille.
Mais l’auteur ne se focalise pas essentiellement sur la jeune Naho, elle nous livre également le vécu de la Naho âgée de 26 ans. Ces deux univers créent une véritable alchimie et l’auteur suscite notre curiosité sur comment les événements et la vie ont pu amener Naho et ses amis à en arriver là, 10 ans plus tard. En effet, il y a une autre raison qui a poussé la Naho du futur à envoyer ces courriers à celle du passé. Elle veut protéger une personne qui lui est très cher et pour qui il se passera un tragique événement. La jeune Naho a maintenant de plus lourdes responsabilités sur ses épaules et essayera de tout faire pour empêcher le tragique destin d’arriver.

Et c’est là que l’auteur consolide son scénario. Si nous avions la possibilité de modifier le passé pour ne pas avoir de regrets, est ce qu’on le ferait ? Naho est confrontée à ce dilemme et devra apporter ses propres réponses et choix en tout état de cause. Mais à vouloir changer le passé, quelles conséquences y aura-il sur l’avenir de Naho mais aussi de ses amis et de Kakeru ? Est-ce que le bonheur de l’un veut dire le malheur de l’autre ?

Concernant les graphismes, l’auteur a un style soigné et a des traits emprunts au shojo avec des visages ronds et des yeux bien mis en évidence. Les trames sont bien travaillées ce qui dégage à la lecture des passages remplis de douceur mais également d’autres de tristesse. Quant à l’édition, elle est correcte.

« Orange » sort des sentiers qu’empruntent habituellement les shojo classiques en nous proposant une histoire un peu plus originale. L’auteur arrive à nous susciter des interrogations sur nos choix et nos regrets, tout en nous emmenant dans son univers. En passant par des moments d’insouciance à d’autres remplis de tristesse, ce premier tome nous fait vivre des instants purs et sincères.
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Re: Orange

Message non lu par Einah » 11 avr. 2015, 12:49

Tome 2 :

Naho est très attachée à Kakeru et elle ne peut imaginer un futur existant sans lui. Elle décide donc de suivre les recommandations de ses lettres et de tout faire pour venir en aide à Kakeru. Même si ce n’est pas dans son caractère, Naho en vient à passer outre ses sentiments de gêne et de crainte, et arrive à aller de plus en plus vers Kakeru. Petit à petit, ces changements commencent à avoir des conséquences sur l’avenir. Mais suffisent-ils pour sauver Kakeru ?

Ichigo Takano continue à développer son intrigue et nous donne des explications sur les voyages dans le temps. Dans le cas d’un voyage dans le passé, sa théorie est que même si nous modifions les événements connus du passé, nous ne modifierons pas le futur que nous connaissons. Mais, nous créerons une nouvelle ligne de temps, comme un monde parallèle. En résumé, la Naho du futur qui a envoyé la lettre ne saura jamais que Kakeru est sauvé, bien sûr s’ils y arrivent. Cette révélation, même si elle n’est que théorique, chamboule Naho car la douleur et la tristesse de sa moi du futur qui l’a prévenu, ne s’effacera jamais.

Le triangle amoureux est présent mais il n’évolue pas comme nous avons l’habitude dans les shojo. Ici aucun duel, aucune confrontation. Suwa s’efface et accepte que Kakeru se rapproche de plus en plus de Naho au risque de n’avoir peut être jamais de futur avec elle. Or, nous savons avec qui est Naho dans le futur. Quant à Naho, elle n’a d’yeux que pour Kakeru et alors qu’elle est de nature introvertie et timide, osera se rapprocher de Kakeru jusqu’à l’inviter en tête à tête. Petit à petit Kakeru s’ouvre mais c’est au compte-goutte qu’il délivre ses souffrances et ses propres regrets.

Ce deuxième tome est touchant et continue à nous interpeller. La Naho du futur, outre le fait de vouloir sauver Kakeru, regrette-t-elle sa vie actuelle ? Accepte-t-elle d’être ce qu’elle est devenue ? Et qu’en est-il de sa relation sentimentale future ? Est-elle heureuse avec le Suwa du futur ? Tant d’interrogations que suscite la lecture de ce deuxième tome malgré que nous soyons submergés par les sentiments et la détresse de Kakeru. Un tome riche en révélation que ce soit par les lettres de Naho ou bien par les propres mots de Kakeru.
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Re: Orange

Message non lu par Koiwai » 04 août 2015, 14:31

Tome 3 :

Naho tombe des nues suite à l'aveu de Suwa, qui a lui aussi reçu une lettre de son alter ego du futur, et dans la foulée elle cerne mieux les sentiments que son ami entretient pour elle. Désormais, elle doit faire des choix qui la troublent forcément, car si Suwa sera forcément un allié de choix puisqu'il a aussi pour mission de sauver Kakeru, notre héroïne se demande si elle peut si facilement utiliser Suwa pour parvenir à ses fins, alors même que ce dernier est amoureux d'elle...

Mais l'interrogation ne durera pas longtemps, et la réponse viendra de Suwa lui-même et du comportement qu'il adoptera auprès de Naho. Un comportement proche de celui d'un grand frère, toujours là pour aider la jeune fille à franchir les étapes trop difficiles pour elle... Pour l'aider tout simplement à sauver celui qui doit l'être, sans forcément chercher autre chose en retour. L'amitié et la bienveillance au-dessus des sentiments amoureux : les deux premiers tomes étaient déjà nourris par cette idée, mais ce troisième volume le pousse encore plus loin de la plus belle des manières à travers un Suwa admirable, qui fait partie de ces trop rares personnages humanistes et porteurs d'espoir que l'on aimerait voir plus souvent dans le paysage français du shôjo (même si concrètement, Orange est désormais publié dans un magazine seinen, énième preuve que les frontières sont minces et ne veulent plus dire grand chose).
Plus discrets, Azusa, Takako et Hagita sont néanmoins toujours là pour veiller eux aussi sur leurs amis, et c'est finalement au meilleur moment possible qu'ils viennent nous offrir un nouveau rebondissement bien amené dans les toutes dernières pages, donnant hâte de découvrir la suite !

En dehors de ces si saines, vraies et brillantes relations entre les personnages, l'intrigue sur le changement du futur de Kakeru se poursuit, étape après étape. Si l'on enlève les ultimes rebondissements autour d'une Ueda décidément top caricaturale et qui est presque de trop dans la série pour l'instant (aura-t-elle un autre rôle plus tard ?), on suit avec beaucoup d'intérêt les nouvelles et importantes évolutions de ce volume, à commencer par celles liant Naho et Kakeru. C'est avec une infinie bienveillance, toujours dans cette ambiance douce et mélancolique, que l'on voit ce dernier changer peu à peu au contact de ceux qui sont là pour lui. Les choses semblent de plus en plus positives, malgré des doutes qui sont toujours présents en Naho. Parmi ces doutes, la peur de se diriger petit à petit vers l'inconnu. Car à force de voir les événements changer autour de Kakeru, la lettre du futur ne sera-t-elle pas bientôt caduque ? Naho ne devra-t-elle pas, ensuite, arrêter de compter sur ce bout de papier, prendre sur elle et faire les choix par elle-même, ne serait-ce que pour changer elle aussi ?
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Re: Orange

Message non lu par Koiwai » 11 août 2015, 18:15

Tome 4 :

Discrètement soutenue par un Suwa qui a choisi de mettre en berne ses propres sentiments, Naho s'est rapprochée de Kakeru, et tous deux se sont enfin avoués leur amour, même s'il ne sont toujours pas en couple. Elle a le sentiment que Kakeru va enfin pouvoir être sauvée... mais y arrivera-t-elle seule ? La question ne se pose même plus, car si elle pouvait déjà compter sur l'aide de Suwa, elle sait désormais qu'elle pourra aussi compter sur ses trois autres amis, Azu, Takako et Hagita, qui ont avoué avoir eux aussi reçu une lettre de leur "moi" du futur. Et c'est ensemble qu'ils décident de prendre une voie légèrement différente des conseils de leurs lettres, en participant tous à la course de relais...

Après le soutien tout en abnégation et admirable de Suwa dans le tome 3, les choses prennent une tournure encore plus positive avec les révélations des trois autres amis concernant leurs lettres. On aurait pu trouver ça un peu gros, en réalité c'est suffisamment bien amené en plus de rester cohérent, et ça ne fait que renforcer encore plus les bienveillants et profonds liens unissant la petite bande. De plus, cela permet aussi de mettre un peu plus en lumière Hagita, Izu et Takako. La relation qui s'installe entre les deux premiers amène une certaine fraîcheur, de même que les petites frasques comique de ce cher "binoclard". Mais tous trois monteront aussi un soutien sans faille dès qu'il s'agira de soutenir Naho dans ses sentiments ou Kakeru dans ses tourments.

Car le futur a beau changer peu à peu, les tourments de Kakeru, eux, sont toujours là. Le jeune garçon a beau s'ouvrir plus, on le sent encore meurtri par la disparition de sa mère, et il faudra bien toute la persévérance de ses amis pour qu'il se relève. De nombreuses paroles fortes et justes sur son sentiment de culpabilité ou sur l'importance du temps présent arrivent. On apprécie aussi de découvrir les parents de chacun de nos jeune héros. Et la grand-mère de Kakeru, figure bienveillante, apporte elle aussi des considérations pleines de sens.

La relation de Naho et Kakeru se ira-t-elle plus loin ? Le jeune garçon prendra-t-il pleinement conscience qu'il n'est pas seul, qu'il peut compter sur ses amis, et qu'il se doit d'adopter une mentalité différente pour satisfaire s amère si elle le voit ? On vous laisse le découvrir à la lecture de ce tome qui, une nouvelle fois, brille dans les émotions qu'il suscite et dans l'abord de ses sujets sentimentaux et dramatiques. Quoi qu'il en soit, à un tome de la fin, on sent qu'il y a encore beaucoup de choses à développer, que ce soit autour de Kakeru, de sa relation avec Naho, ou de ce que Suwa ressent au plus profond de son être.
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Re: Orange

Message non lu par Koiwai » 25 mars 2016, 12:02

Tome 5 :

La date fatidique du 15 février, jour du suicide de Kakeru, approche doucement mais inexorablement, et Naho, désormais pleinement soutenue par Suwa et les autres qui ont eux aussi reçu une lettre, a le sentiment que l'avenir de Kakeru est bel et bien en train de changer. Peu à peu, le jeune garçon est parvenu à ouvrir un peu son coeur, et même s'il conserve encore de nombreux tourments liés à son sentiment de culpabilité concernant la mort de sa mère, des événements comme la fête du sport permettent d'entrevoir de la joie chez lui. L'espoir de le sauver est là... mais dans la vie, rien n'est facile, et quelques paroles malheureuses peuvent vite réveiller les pires douleurs. Alors que le Jour de L'an arrive et que la petite bande se réunit pour l'occasion, la lettre affirme que ce jour-là, après une discussion, Naho et Kakeru se disputeront sans plus jamais avoir le temps de vraiment se réconcilier après... Naho et les autres seront-ils réellement capables de changer le futur ? Et si oui, quel futur changeront-ils ?

A l'approche de la conclusion d'Orange, ce cinquième et dernier volume commence de façon marquante, avec une confrontation moins heureuse entre Naho et Kakeru, qui vient relancer un tant soit peu le suspense quant à la conclusion du récit. Les pensées de Naho, les larmes commençant à couler de ses yeux ronds et purs, son sentiment de voir échapper tout ce qui avait été construit sont autant d'élément qu'Ichigo Takano fait ressortir avec force sans avoir besoin d'en faire trop, et on se demande dès lors quelle tournure vont prendre les choses.

Mais avant la dernière ligne droite, un autre passage vient apparaître. Un passage nous centrant pleinement, pour la première fois, sur le point de vue de Kakeru. Celui qui a fini par se suicider. Dans les grandes lignes, Takano retrace tout ce qu'on a vu dans la série, en mettant cette fois l'accent sur ce que le jeune garçon pouvait bien penser de cette bande d'amis qui l'a accueilli, du drame lié à sa mère, de son sentiment de solitude dans ce drame dont il se sent coupable. Peut-il réellement réussir à se débarrasser de ses regrets ? Hormis sa grand-mère sans qui il serait entièrement seul, manquera-t-il vraiment à quelqu'un s'il disparaît ? Quand on pense ainsi, le moindre petit élément, comme la réapparition du téléphone de sa mère et de ce qui y est écrit, peut vite faire basculer quelqu'un...
L'intérêt de ce passage et du fait de l'amener maintenant ? Accentuer l'intensité dramatique, bien sûr, mais pas uniquement. Car en nous refaisant vivre certaines choses du point de vue de Kakeru, Ichigo Takano nous montre à quel point il peut être délicat et difficile de réellement comprendre l'autre, et la scène de dispute du Nouvel An en est un excellent exemple. Alors que Naho se sent coupable à cause de ses paroles, est-ce vraiment ainsi que Kakeru la voit lui aussi ? Ou est-ce envers lui-même qu'il fait des reproches ? Une chose est sûre, en tout cas : pour veiller sur ceux qu'on aime, il ne faut rien lâcher.

C'est exactement ce que Naho et les autres feront. Les voir persister dans leur désir de sauver Kakeru, jusqu'au bout, est un bonheur naturellement émouvant où se mêle la mélancolie des regrets et la peur de voir celui qu'ils aiment disparaître.
On aurait pu avoir un petit regret sur le rôle un peu plus secondaire des amis de Naho, mais non, car ils ont été joliment mis en avant auparavant et on sait bien tout ce qu'ils ressentent eux aussi. Izu et Takako restent des amies d'une grande bienveillance qui s'appliquent à soutenir notre héroïne, tandis que Hagita, sous ses airs un peu plus lointains, conserve sa capacité d'analyse et amène également des réflexions intéressantes sur la possibilité ou non de changer l'avenir. Quant à Suwa, on sait bien tout le sens du sacrifice qu'il est en train de montrer, sacrifiant ses sentiments pour le bien de son ami et de celle qu'il aime.
Entourée de ces amis aussi touchants que sincères, Naho n'a plus qu'à faire ce qu'elle doit faire : ne pas avoir peur d'aller de l'avant. Et la narration introspective de Takano fait à nouveau des merveilles tant, sans étirer les choses, elle cristallise toutes les craintes de la jeune fille via des pensées fines et bien placées. La peur de placer des paroles malheureuses, de voir tout ce qui a été construit disparaître soudainement. La crainte de blesser l'autre et de se blesser soi-même. La difficulté de s'accepter, d'effacer ses regrets, ou de faire en sorte de ne pas en avoir. Autant de problèmes humains qui font le quotidien de nombre de personnes, pour un résultat où l'ultime message de la mangaka est de ne pas avoir peur de se confronter aux autres et à soi-même afin de ne pas avoir de regrets, et de ne pas oublier la valeur de la vie et de l'être humain. Car même si l'on ne peut pas changer le passé ou modeler le futur, c'est bien nous qui construisons l'avenir.

Et les Naho, Suwa, Izu, Takako et Hagita du futur, dans tout ça ? Rassurez-vous, ils ne sont jamais oubliés et viennent faire régulièrement écho dans le récit, Ichigo Takano parvenant même à amener à travers eux des explications succinctes mais suffisantes sur la façon dont ils ont envoyé les lettres (preuve d'un récit construit depuis le début, les mots d'un certain professeur vus il y a quelques tomes ont leur importance), sur les incohérences qu'entraînerait le changement de leur passer, et sur l'importance du concept des mondes parallèles.

Au bout de 5 volumes brillamment mené, Orange ne déçoit donc aucunement. Ichigo Takano a pu mener son récit comme elle le souhait d'un bout à l'autre, sans s'égarer, et délivre un récit fort, porteur de nombreuses valeurs humaines, et s'achevant de façon aboutie n laissant une impression indélébile. Les 4 premiers tomes n'étaient pas une illusion : voici bel et bien un futur classique dans sa catégorie.

Pour fermer de dernier tome, on retrouve également le dernier chapitre de la mini-série "Un printemps dans les étoiles", bonus qui sera venu ponctuer chaque tome et qui s'avère fort sympathique à suivre.

Enfin, notons qu'Akata a décidé de mettre les bouchées doubles pour marquer comme il se doit cette série qui fera sans nul doute date dans son catalogue, en proposant en marge de l'édition simple du tome 5 une édition limitée qui, pour 2€ de plus, est vendue avec un coffret. On peut d'abord remercier l'éditeur d'avoir proposé ce coffret avec uniquement le tome 5, afin de ne pas frustrer les fans de la première heure ayant déjà les 4 premiers volumes. Quant au coffret lui-même, il vaut sans mal ses 2€ supplémentaires : le carton est bien épais, les illustrations sont différentes des couvertures et bien choisies, leur qualité d'impression est au top, il n'y a pas de jour ni de sensation que les tomes sont trop serrés une fois les 5 volumes dedans... l'objet est superbe.
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