Dēmokratía

Rubrique consacrée aux seinen, c'est à dire des séries se destinant à un lectorat adulte.
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Wang Tianjun
Roi céleste
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Dēmokratía

Message non lu par Wang Tianjun » 16 mars 2015, 17:03

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Dēmokratía

Fiche sur le site

Tome 1
Bienvenue dans Dēmokratía.
Si cette application est apparue sur votre ordinateur, c'est que vous avez été sélectionnés pour faire partie d'une aventure d'un nouveau genre. Votre mission, si vous l'acceptez, consistera à contrôler à distance les faits et gestes d'un robot à l'apparence humaine plus vrai que nature, en compagnie de 2999 autres pilotes. Chaque action de l'androïde sera choisie à la majorité, parmi les propositions suggérées par la communauté. Quel sera votre premier choix ?

Après le succès public et critique d'Ikigami, Motorô Mase est de retour aux éditions Kazé Manga avec son nouveau titre, toujours en cours de parution au Japon : Dēmokratía. Comme pour son succès précédent cette nouvelle œuvre se base sur un concept simple mais très efficace : nous y suivrons les aventures de Mai, une femme-androide guidée à chaque instant par un panel de joueurs. L'idée latente derrière ce concept est d'observer le comportement d'un être dont les actions ne découlent pas d'un simple libre-arbitre, mais d'une somme d'avis, de ressentis et de vécus différents, le tout pour aboutir aux « bonnes » décisions, car « majoritaires », sans compter que Mai pourra bénéficier des connaissances de tous ses pilotes pour agir de la manière la plus efficace.

« Un être absolu, plus « humainement correct » qu'aucun humain ! »

Une nouvelle fois, le mangaka a soigné son background, même si cela induit une phase d'exposition un brin longuette, où l'on découvre les deux cerveaux à l'origine du projet. Mais nous rentrons bientôt dans le vif du sujet, dès lors que l'application est lancée et que ses utilisateurs essaient de produire les premières actions de Mai. Si ces premiers pas sont hésitants, le panel ne tarde pas à prendre des initiatives, par sa curioisité naturelle.

C'est alors que l'on comprend une des subtilités du système : si la majorité s'impose souvent sans trop de surprises, les votes permettent aussi de mettre en avant des propositions plus inattendues. Autrement dit, les créateurs ont laissé de la place pour que puissent s'exprimer les éclairs de génie au milieu de la neutralité de la masse. A l'instar d'Ikigami, Motorô Mase va nous présenter ces quelques personnes dont les avis spontanés va faire basculer la route de Mai : l'élève subissant la pression des études, le supérieur hiérarchique devant gérer un employé dilettante ou la jeune femme traumatisée par un accident. Et comme pour le précédent titre de l'auteur, les petites histoires personnelles contribuent à la grande, Mai ne tardant pas à faire une rencontre troublante...

Le lecteur suspendra volontairement son incrédulité sur certains points (le temps de réaction de Mai, par exemple) pour se focaliser sur le cœur même du récit. Après s'être attaqué à un régime totalitaire dans Ikigami, Motorô Mase nous pousse à réfléchir aux limites de la démocratie. Sous couvert d'un concept paraissant idéaliste de prime abord, le système se fissure très rapidement pour faire apparaître différents courant de pensée : ceux pour qui tout cela n'est qu'un jeu ou qui se protègent derrière la majorité pour se croire dans le vrai, les courants dominants contre les idées novatrices,... un véritable exercice de style, mettant en pratique des siècles de théorie politique, à l'échelle d'un seul « individu ». On pourra regretter que le récit s'oriente rapidement vers le sensationnalisme, mais ce péril est peut-être une étape dans cette déconstruction des bienfaits de la majorité. Mais il est encore un peu tôt pour le dire... en attendant, ce premier volume remplit parfaitement son office, exposant le concept et développant ses premiers questionnements.

Graphiquement parlant, nous sommes en terrain conquis. Motorô Mase développe une galerie de portraits assez réaliste. On regrettera peut-être que l'auteur peine à se renouveler dans la création de nouveaux visages. Dans cette foule, Mai se distingue aisément par un regard vide et un manque d'expressivité, trahissant les réflexions de ses guides. D'un autre côté, la vision informatique de Mai et les visages masqués numériques apportent un sentiment d'inconfort, presque d'angoisse. L'édition est quant à elle de qualité, et rappelons que Kazé Manga nous offre une couverture réversible, pour profiter de la jaquette originale où d'une jaquette spécialement réalisée pour l'édition française.

En définitive, ce premier volume de Dēmokratía est assez prometteur. Si toutes les subtilités du récit pourront être assez lourdes à ingérer, le concept est suffisamment prenant pour que l'on décide de pousser l'aventure un peu plus loin. Derrière la curiosité technologique, ce nouveau titre est une nouvelle expérience à grande échelle ou l'individu peut prendre le pas sur la majorité, et où les histoires personnelles seront capitales. Laissez-vous tenter par l'expérience !
"Ah.. je suis en train.... de tomber en morceaux..."
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