Hawkwood

Rubrique consacrée aux seinen, c'est à dire des séries se destinant à un lectorat adulte.
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Koiwai
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Hawkwood

Message non lu par Koiwai » 03 mars 2016, 16:42

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Tome 1 :

1346, France, province de Normandie, cité de Carentan. Alors que la Guerre de Cent Ans a débuté depuis presque dix années, la petite ville, idéalement située, doit faire face aux menaces d'invasion ennemies, mais n'a pas forcément les ressources humaines nécessaires pour s'en sortir. Afin de sauver la cité, son chef a choisi d'engager les membres de la Compagnie Blanche du Corbeau, un groupe de mercenaires dirigé par une certain John Hawkwood...

Les récits puisant leurs sources dans l'Histoire ont le vent en poupe, d'autant plus lorsqu'il se passent en Europe. Ainsi, l'heure était sans doute venue pour Doki-Doki d'avoir son représentant du genre, avec Hawkwood, une série en 8 tomes que l'on doit à Tommy Ohtsuka, mangaka que l'on a découvert en France il y a quelques années avec Slayers : Knight of Aqua Lord chez Ki-oon. Et pour l'occasion, l'auteur a choisi un pan de L'histoire qui n'a pas forcément l'habitude d'être évoqué, et plus encore un personnage historique qui reste méconnu du grand public malgré son statut intéressant : John Hawkwood est en effet considéré comme le tout premier chef d'armée de mercenaires de l'Histoire.

La première partie du volume sert essentiellement à poser les grandes lignes du contexte et les enjeux autour de la petite ville de normande de Carentan, attirant les convoitises de l'envahisseur anglais, et pas que. Au fil de ce début de série jouant sur le conflit et sur une petite traitrise animant encore un peu plus les pages, Tommy Ohtsuka nous offre un premier aperçu de la Compagnie Blanche du Corbeau et de son fonctionnement sous la houlette de John Hawkwood. On découvre alors le sens du combat de cette bande, ainsi que leurs petites stratégies (par exemple l'utilisation de leur carriole de femmes pour endormir la vigilance de l'ennemi)... mais ce sont surtout les motivation de Hawkwood qui intéressent le plus : mercenaire oblige, elles sont purement pécuniaires. Le combattant prend soin de ne pas trop se lier à ceux qui l'embauchent, car il n'est pas dit qu'il ne devra pas l'affronter plus tard si l'ennemi lui fait une belle offre. Et quitte à se battre et vivre uniquement pour l'argent, autant toujours essayer de tirer le plus de profit possible des missions... On comprend vite que John Hawkwood et ses hommes ne sont pas du genre à respecter les règles de chevalerie dans leurs batailles, et c'est bien cet élément qui intrigue le plus.
Car pour le reste, on ne peut pas dire que la première partie du volume pose encore correctement tout ce qu'il faut, surtout concernant l'ambiance, et cette impression vient essentiellement d'un coup de crayon qui, bien que fluide dans les moments d'action et jamais vide, souffre d'un aspect un peu trop propre : pas d'atmosphère vraiment crade, pas d'ambiance de guerre qui prend aux tripes, pas vraiment de sang ou de vraie violence... Pour un manga de mercenaires en pleine guerre du Moyen-Âge, ça ferait presque un peu bizarre. Mais le problème vient surtout, pour l'instant, du manque de charisme des principaux personnages sur le plan physique, à commencer par celui de Hawkwood qui a une dégaine somme toute banale voire passe-partout, malgré son expression faciale plutôt neutre assez réussie.

Pour que l'aspect visuel et même l'intrigue principale décollent un peu plus, il faut donc attendre la deuxième partie du volume, qui est celle posant véritablement des bases un peu plus solides avec l'apparition du prince Edouard III d'Angleterre, à la mine autrement plus efficace dans sa sournoiserie apparente et dans sa soif de guerre pétrie d'ambition, et dont les objectifs de conquête du trône français et de défi envers le Roi de France Philippe VI commencent à bien faire décoller les choses, surtout au vu des dernières pages amenant déjà un intéressant revirement. Via les débuts du conflit amené par Edouard, le mangaka s'applique à conservé un fond historique suffisant pour servir son récit.

Il est donc encore trop tôt pour pleinement se prononcer sur les débuts de Hawkwood, et Doki-Doki semble en avoir bien conscience en ayant eu l'excellente idée de publier les deux premiers tomes de la série simultanément. En attendant, la série a quelques défauts à gommer mais démarre de façon intrigante en nous immisçant petit à petit dans une intrigue sur fond historique qui s'annonce très plaisante.

Dans les standards de l'éditeur, l'édition de Doki-Doki est particulièrement bien portée par l'efficace traduction de Sébastien Ludmann, qui s'est appliqué à retranscrire une ambiance d'époque assez convaincante via quelques expressions et mots moyenâgeux bien trouvés.
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Re: Hawkwood

Message non lu par Koiwai » 07 mars 2016, 19:41

Tome 2 :

John Hawkwood et ses hommes sont passés sous le drapeau anglais et sous les ordres du prince Edouard. S'agit-il d'une alliance définitive ? Certainement pas, car le mercenaire n'est guidé que par l'appât du gain et ne se bat que pour l'argent, quitte à irriter quelque peu certains Anglais par con absence de réelle loyauté et ses méthodes tout sauf chevaleresques. Mais les hommes de la Compagnie Blanche du corbeau sont pour l'instant bien ralliés à l'Angleterre, et suite à une pénurie de nourriture due aux rats ils se mettent en quête de villages à piller, dans un début de tome offrant à nouveau une belle démonstration de l'aspect sans foi ni loi de ces mercenaires, mais aussi du sens de la stratégie de Hawkwood via la manière dont il prend au piège la compagnie ennemie des chevaliers de Saint-Lô.

Ce début de tome est également un bon moyen de nous préparer à la suite, où le ravitaillement a son importance pour une armée anglaise éloignée de ses terres. Et tandis que l'armée anglaise poursuit sa route vers Caen en saccageant tout sur son passage, le roi de France Philippe VI, retranché derrière les murailles du château de Vincennes, refuse toujours le combat direct et mise sur la guerre d'usure et sur la politique de la terre brûlée pour tenter d'affamer l'adversaire... Cela suffira-t-il pour arrêter les Anglais ? Ou au contraire, le monarque français décidera-t-il enfin de s'engager dans un conflit direct pour ne pas perdre la face en constatant le saccage de la province de Normandie ? On vous laisse découvrir cela, pour plutôt insister sur un récit qui, comme prévu, après un premier volume intéressant mais plutôt introductif, décolle réellement ici.

Il est de bon ton de souligner l'aspect beaucoup plus prenant des quelques batailles qui nous sont proposées ici, et qui exposent efficacement les avances et stratégies adoptées, ainsi que les effusions d'hémoglobine qui sont plus présente. On reprochait au premier tome d'être un peu trop propre, ici c'est moins le cas, et le récit ne fait qu'y gagner en crédibilité, même s'il ne faut pas non plus s'attendre à de l'ultra gore. Tommy Ohtsuka trouve un bon équilibre. De même, son trait épais et incisif peaufine un peu mieux le design des principales figures, et les planches se veulent très dynamiques en jouant essentiellement sur des cases de taille petite à moyenne (les pleine pages sont très rares, par exemple) où ses débattent de guerrier que l'on voit la plupart du temps en plans rapprochés. De ce fait, les décors, eux, sont plutôt rares (un héritage de la carrière d'Ohtsuka dans le comics ?), mais restent présents quand nécessaire et sont dans ces cas-là assez réalistes, à l'image du château de Vincennes par exemple.

Certaines personnalités y gagnent clairement aussi, que celles-ci soient historiques comme Hawkwood, le prince Edouard (qui semble réserve un revirement pour la suite), Thomas Holland ou Charles de Valois (frère de Philippe VI prenant ici une importante décision), ou visiblement inventées comme le dénommé Richard Perrier, capitaine des Saints Chevaliers de Chartres qui détonne quelque peu par son caractère un peu psychopathe sur les bords, sa façon de se tenir sur son cheval et son plaisir à traiter l'ennemi comme de la vermine.

Et puisque l'on parle d'historique, il est plaisant de voir que le mangaka parvient à se réapproprier dans les grandes lignes les personnalités et les faits de l'époque (comme le Siège de Caen) pour proposer un divertissement où il réinterprète une partie du reste à sauce.

Le résultat, à mi-chemin entre récit historique et divertissement guerrier médiéval aux petites allures de Wolfsmund ou de l'âge d'or de Berserk (rappelons que Kentarô Miura s'est lui aussi en partie inspiré de la Guerre de Cent Ans pour cette partie de son manga... et certaines cases où Hawkwood a des airs de Guts sont troublantes), a donc plus d'un tour dans son sac : Hawkwood décolle avec ce deuxième volume, et se paie déjà le luxe, dans ses dernières pages, de positionner son héros dans une délicate situation !
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