Les récits complets d'Hirata (Kyudo, tueur!, zatoichi,...)

Rubrique consacrée aux seinen, c'est à dire des séries se destinant à un lectorat adulte.
Avatar du membre
né un11septembre
Messages : 2939
Enregistré le : 06 août 2006, 12:38
Localisation : Quelque part en Belgique civilisée

Les récits complets d'Hirata (Kyudo, tueur!, zatoichi,...)

Message non lu par né un11septembre » 02 août 2008, 11:30

HIROSHI HIRATA
SES HISTOIRES COMPLETES

Image
Biographie :
Hiroshi Hirata naît à Tokyo le 9 février 1937. Hiroshi a six frères et sœurs et doit souvent sacrifier ses après-midi de classe pour aider son père au magasin. À l'époque, le manga ne l'intéresse pas encore mais il participe déjà au journal de son collège et voue une grande admiration aux illustrations des romans historiques, particulièrement celles de Kiyoshi Kimata.

Il n'a que 17 ans lorsque, à la mort de son père, il doit abandonner ses études pour subvenir aux besoins de sa famille. Il commence alors à travailler dans une entreprise d'équipement. Grâce à un ami du collège, il publie sa première histoire en 1958 Le Sabre tueur d'amour et de haine (Aizô-hissatsuken) dans la revue Mazô des Éditions Hinomaru-Bunko. La collaboration se révélant fructueuse, il fait paraître six autres histoires dans le magazine.

Fin des années 50, un libraire l'incite à lire "Endiguement de Horeki" qui raconte l'histoire du fief de Satsuma. Intrigué par cet épisode de l'histoire du Japon, il approfondit ses recherches et fréquente librairies et bibliothèques pour étoffer ses connaissances sur l'histoire du Japon. En 1965, il part pour Tokyo à la recherche de travail. À cette époque, il édite des nouvelles des romanciers Renzaburô Shibata et Norio Nanjô. Trois livres paraissent : "Zatoichi", "Histoire de Nisha" (Nisha-den) et "Rivière du Sang" (Chishio-gawa). Fin des années 1960, le gekiga est à la mode au Japon et deux de ses publications, "Misère de la voie du samouraï" (Bushidô muzan den) et "Ecole de sabre kanzashi" (kanzashi kenpô) remportent un grand succès.

Au début des années 1970, la carrière de Hiroshi Hirata prend un tournant décisif. Il devient l'incontournable auteur de gekiga, spécialiste de l'histoire du Japon et des samouraïs. Il commence notamment la série L'âme des samouraïs en 1969, Épouse à vie en 1972 et Prêteur de vie en 1973. Au début de l'année 1973, il voit deux de ses histoires édités en livres reliés et destinés à la vente : "L'âme du Kyudo" et "Prêteur de vie". C'est dans ce même mouvement qu'il s'atèle à une nouvelle série, "Satsuma Gishiden" en 1977 (série qu'il achève en 1982).

En 1978. il voit son œuvre exposée au Comic Convention de San Diego aux États-Unis Son travail sur "Satsuma gishiden" l'épuise et en 1983, il décide de faire une pause. Après une année de pause pendant laquelle il exerce le métier d'électricien, il commence une nouvelle série "36 stratégies de Kuroda". Depuis 1983, il ne cesse de travailler sur de nouveaux projets, il signe son autobiographie en 1990, "Histoire d'un père", et pousuit aujourd'hui son métier de gekiga-ka avec "36 stratégies de Kuroda" et "Le Nouveau prêteur de vie". Hiroshi Hirata est également un maître calligraphe reconnu.

J'étais depuis un moment lecteur assidu de Lonewolf & cub quand j'ai découvert par l'entremise d'une présentation dans l'univers du manga de Groensteen debut des années 90, les dessins de Hiroshi Hirata. L'auteur avait aussi par chance connu la publication d'un graphic novel en anglais intitulé samurai: son of death.
il m'as fallu ensuite plusieurs années pour trouver de nouvelles oeuvres de l'auteur. (je suis allé jusqu'a supplier et soudoyer des representants d'éditeurs japonais à Angouleme pour obtenir une VO de la force des humbles en 1993. C'est dire si je suis aujourd'hui comblé de pouvoir lire et vous présenter des oeuvres d'Hiroshi Hirata 8)

Ce topic regroupera tout les one-shot de l'auteur de la série Satsuma.
Zatoichi

Image

Editeur : Delcourt
One-shot (1967)
Format: 13 X 18, 256 pages
Ce volume adapte en manga les 13 ème et 14 ème films de la série de 26 films qui popularisa les aventures de masseur-maitre d’arme aveugle. On ne peut d’ailleurs pas parler ici d’une retranscription fidèle de Zatoichi's Vengeance et de Zatoichi's Pilgrimage. Il s’agit plutôt d’une réinterprétation en gegika mis en scène par Hiroshi Hirata en 1967. Le style de Hirata sur ce volume parait très épuré et encore influencé par le sasuké de Sampei Shirato. La lecture est plaisante pour un travail de commande, mais loin de se hisser à la mesure des autres œuvres de l’auteur. C’est malgré tout une bonne intro au personnage revu récemment interprété par Takeshi Kitano.
Tueur!

Image

Editeur : Delcourt
One-shot (1969)
Format: 15 X 21, 216 pages
Après zatoichi proposé en format réduit par Delcourt, l’éditeur nous présente ici une nouvelle adaptation cinématographique, celle du film hitokiri – le chatiment (1969) ( http://www.filmsactu.com/test-dvd-zone- ... t-1919.htm ) en gegika réalisée par Hirata en 1969 mais en grand format cette fois. L’histoire en elle-même fort interessante, puisqu’elle voit un ronin sans revenus et sans autre moyen de subsistant que la voie du sabre devenir le jouet d’un conflit qui le dépasse, et de loin. Le style est bien plus riche et détaillé que dans zatoichi (suivant probablement là encore le développement de style d’autres dessinateurs comme Kojima et Shirato.)
On appréciera plus particulièrement le soin apporté à tous les aspects de la vie dans ce Japon du milieu du 19ème siècle, témoignant encore du brutal changement subi par ce pays sur les 150 dernières années.
L’âme du kyudo

Image


Editeur : Delcourt
One-shot (1969-70)
Format: 15 X 21, 464 pages
Cette histoire exceptionnellement longue d’Hirata (+ de 400 pages), datant de 1969-70, donne le compte-rendu très documenté d’une course à la performance et à la gloire de deux fiefs rivaux à travers une extraordinaire compétition de kyudo (l’art du tir à l’arc : http://www.kyudo.fr ). Situé dans le temple de Rengeôin à Kyoto au début du 17ème siècle, cette épreuve de kyudo baptisée tôshiya devient rapidement un enjeu politique très onéreux et mortel pour ses participants forcés au seppuku en cas d’échec, et oblige non seulement les meilleurs archers mais aussi les meilleurs fabricants d’arcs à une course au perfectionnement.
Il est en fait bien question de ça, dans ce volume, trouver et répéter la perfection d’un mouvement à travers la philosophie du kyudo. Le récit suivra également l’itinéraire de Kanza décidé à venger la mort de son père.
Toutes la palette des sentiments du courage jusqu’à l’obstination, en passant par l’orgueil et la vanité, y passent en une sorte de reflet aux grandes compétitions actuelles ou l’athlète est encore et toujours une figure de proue nationale que l’on remplace quand elle n’est plus performante.
La force des humbles

Image

Editeur : Delcourt
One-shot (1993 + 1961)
Format: 15 X 21, 304 pages, partiellement en couleur
Hiroshi Hirata, fidele à ses thèmes de prédilection, nous relate ici l’histoire de gens souvent subalternes qui se sont montrés remarquables par leur générosité, leur bon sens ou leur abnégation en 11 histoires courtes d’un ton mi-documenté, mi-romancé.

Le style du dessin est remarquablement détaillé pour dépeindre le mode de vie des seigneurs comme celui des gens du peuple, mais loin de rester rigidement épuré, de temps à autres Hirata s’offre le plaisir de quelques caricatures et de ressort comiques (comme les portraits des 3 prévôts de justice dans la 3ème histoire ou les samouraïs tombant à la renverse de leur position en tailleur sous le coup de nouvelles bouleversantes.)
Hirata se met lui-même également en scène pour expliquer le contexte dans lequel il a écrit telle ou telle histoire ou pour dialoguer avec un des personnages de son histoire.
La dernière histoire du volume est plus ancienne de 30 ans environ et offre un style fort différent du reste du volume, laissant place à un style très estampé mais non moins maitrisé dans la richesse des vêtements ou des décors extérieurs. Cette histoire est en fait une première version de la deuxième histoire reprise dans ce volume.

Les histoires en elles-mêmes se veulent distrayante, quoiqu’édifiantes en faisant l’apologie de toutes les vertus nécessaires à un japonais engagé sur la voie du bushido, voulant vivre dans l’honneur, au service de la communauté. Mais on remarque aussi que la plupart des personnalités choisies ont su transgresser les prérogatives de leur condition pour améliorer leur environnement ou la vie de leurs semblables.

L’édition de très bonne qualité offre pour la première fois en français des pages intérieures en couleurs qui sont exprimées à l’aquarelle ou à l’huile de façon très chaleureuse. Cette édition française reprend une nouvelle version d’un manga sorti en 1993 complétée de la dernière histoire datant de 1961. Les pages éditée en couleur ne sont d’ailleurs pas les mêmes que dans l’édition de 1993.

Hiroshi Hirata reste pour les japonais la mémoire des valeurs qui ont fait de cet archipel une puissance économique dans le monde.
Image

Avatar du membre
Blacksheep
Messages : 1787
Enregistré le : 08 avr. 2007, 09:27
Contact :

Re: Les récits complets d'Hirata (Kyudo, tueur!, zatoichi,...)

Message non lu par Blacksheep » 04 sept. 2008, 15:10

L'Ame du Kyudo :

Dans ce pavé de plus de quatre-cents pages, l'auteur de « Satsuma » revient sur un fait divers japonais historique qui conduira à une compétition s'enfonçant vers l'absurde.

Le trait d'Hirata est le même que dans « Satsuma », il tient presque plus de la calligraphie, ou de l'estampe, que du dessin destiné à raconter une histoire. L'auteur nous plonge donc dans le Japon après la célèbre bataille de Sékigahara qui mit un terme à la lutte entre Toyotomi et Tokugawa. Le pays entre alors dans une période de paix. Mais voilà qu'un samouraï désirant tester sa dextérité établit un record invraisemblable dans un temple de Kyoto, record qui conduira les fiefs voisins dans une querelle de démonstration de force jusqu'à la folie : le Toshiya. Ce record est en fait la passage d'une quantité de flèches sur une distance précise avec de nombreuses contraintes d'espace et surtout de temps. Car si au départ il ne s'agissait que de quelques flèches sur 24 heures, leur nombre atteindra bien vite plusieurs milliers. Et afin de satisfaire les puissants des centaines d'hommes vont se prêter à ce jeu, se préparant pendant des mois, des années, pour au final bien souvent y perdre la vie.

C'est donc cet hymne à la volonté de l'homme d'aller toujours plus loin, sans jamais savoir s'arrêter,
que nous offre Hirata. Le titre est assez inégal : on est parfois subjugué par la volonté de ces hommes de se surpasser, on attend comme les spectateurs de l'époque de savoir « combien », puis on se laisse endormir par d'autres passages moins inspirés. Mais la grande réussite du titre est que l'auteur arrive au fil des pages à nous montrer comment cette compétition « sportive » va dégénérer. Tout ça pour une rivalité territoriale, tout ça pour ça : la bêtise humaine dans toute sa splendeur.

En fin de volume on trouve une interview de l'auteur et divers autres textes dont un revient sur l'époque de la réalisation de l'oeuvre, et un autre sur le Toshiya. Très intéressants.
"Dès qu’on tombe amoureux, on devient des menteurs" Harlan Ellison
"Tout homme normal est tenté à un moment de sa vie de cracher dans ses mains, de hisser le drapeau noir et se mettre à trancher des gorges." H. L. Mencken
Image

Avatar du membre
kynoo
Messages : 427
Enregistré le : 25 mars 2007, 18:59

Re: Les récits complets d'Hirata (Kyudo, tueur!, zatoichi,...)

Message non lu par kynoo » 01 oct. 2008, 00:40

Le mouvement gekiga en tant que réaction à un courant dominant m'intéresse beaucoup, et c'est dans ce cadre que je me suis penchée sur Hiroshi Hirata et son âme du kyudo.

J'en ressors avec l'impression d'avoir lu une version XXL de la blague de l'ours et du lapin. Peu de pages suffisent à nous démontrer l'absurdité et la vanité de ce concours, pourtant, inlassablement, à mesure que nous progressons dans le récit nous apprenons qu'une nouvelle fois le record est tombé, alimentant ce cycle infernal qui brise toujours plus de vies sans que la récompense soit à la hauteur des sacrifices consentis.

Avatar du membre
ElfHelm
Messages : 22
Enregistré le : 30 sept. 2008, 16:16
Localisation : loin de là, près d'ici

Re: Les récits complets d'Hirata (Kyudo, tueur!, zatoichi,...)

Message non lu par ElfHelm » 02 oct. 2008, 16:36

Il parait qu'un autre Hirohi Hirata est prévu par Delcourt au cours de l'année 2009...
Il me tarde déjà !! :D
Je suis l'andouille, qui fait l'imbécile...avoir l'air con peut etre utile, l'etre vraiment serait plus facile !!

Avatar du membre
Koiwai
Rider on the Storm
Messages : 10881
Enregistré le : 18 avr. 2008, 11:52
Localisation : Lille

Re: Les récits complets d'Hirata (Kyudo, tueur!, zatoichi,..

Message non lu par Koiwai » 14 févr. 2011, 00:18

Gros up, mais c'est pour la bonne cause ^_^
Image
Alors même que son oeuvre en trois tomes Plus forte que le sabre est encore en cours en France, Hiroshi Hirata, maître parmi les maîtres dans le registre du gekiga, nous revient avec la Loi du Temps, recueil de quatre histoires courtes à travers lesquelles l'auteur aborde avec son style inimitable les affres du temps qui passe mais qui est salvateur pour les esprits en pleins tourments.

Ici, chaque histoire, ancrée à une période différente de l'ère Edo, toujours placée dans une réalité historique finement reproduite grâce à un sérieux travail de documentation, et inspirée de faits réels hormis la quatrième, prend le temps de dépeindre des personnages égarés ou en proie aux tourments. Qu'il s'agisse d'une jeune femme décidée à venger le meurtre de ses parents par le sabre, d'un scribe paisible observant patiemment les actes d'un premier intendant corrompu et égoïste, d'un survivant d'une brigade de jeunes samouraïs qui regrette de ne pas être mort avec ses compagnons, ou d'un homme exerçant son pouvoir sur les paysans de manière tyrannique, chaque héros va être soumis au poids du temps, qui finira par faire oublier les tourments ou par faire prendre conscience des fautes commises. Ici, le temps est salvateur, permets aux personnages de mûrir, d'évoluer. Et tandis que l'une prendra conscience que sa vengeance n'apportera que de nouveaux problèmes, un autre pourra se forger à travers les années pour finir par changer l'Histoire, ou un autre encore finira par surmonter ses problèmes et retrouver la force de vivre.

Le temps se ressent également d'un point de vue historique. En ancrant ses histoires à différentes périodes, Hirata peut mettre un peu en avant ce que les siècles ont pu apporter, ce qui se ressent notamment très fortement dans la troisième histoire, ancrée en pleine période d'industrialisation, alors que le Japon commence à s'ouvrir et à muter.

Apportant une nouvelle dimension à l'oeuvre de Hirata, le thème du temps est ici parfaitement représenté à travers le style unique de l'auteur. Comme souvent avec l'auteur, la narration, posée et portée par la forte présence d'un narrateur extérieur aux histoires, coule comme un passionnant récit historique. Les dessins, détaillés, sont francs, crus, ont pour vocation d'être réalistes et n'épargnent rien de ce qui pouvait se dérouler à l'époque. Et, bien évidemment, l'esprit du bushido, sans lequel un manga de Hirata ne serait pas tout à fait un manga de Hirata, est omniprésent.

En somme, La Loi du Temps, abordant de belle manière son sujet, constitue un one-shot abordable et d'excellente facture parmi l'oeuvre de l'auteur.

Côté édition, Akata/Delcourt nous offre un travail on ne peut plus satisfaisant. Le papier, la traduction et l'impression sont de qualité, les clés de compréhension sont peu nombreuses mais à nouveau très utiles, et quelques pages bonus nous proposent de découvrir les échanges de mails entre Hirata et son directeur éditorial pendant les deux années ayant servi à la création des différentes histoires, ce qui permet d'en apprendre un peu plus sur la genèse de celles-ci, mais également sur la manière de fonctionner de Hirata et de son éditeur, tout ceci confirmant la minutie du mangaka.
Image

Avatar du membre
Kakunoshin Niitsu
Maître potier
Messages : 548
Enregistré le : 23 sept. 2009, 15:55
Localisation : Aoiya

Re: Les récits complets d'Hirata (Kyudo, tueur!, zatoichi,..

Message non lu par Kakunoshin Niitsu » 14 févr. 2011, 23:59

J'ai découvert Hirata assez récemment avec Ma voie de père.Un petit coup de coeur.Une série de très courtes histoires où l'auteur philosophe sur tout et parfois n'importe quoi mais toujours de façon intéressante .Puis son coup de crayon est simplement sublime.

Pour la loi du temps je l'ai commandé à mon libraire, le sujet de base est universel et j'ai hâte de pouvoir le lire.^^
Image
Quand les hommes ne peuvent changer les choses, ils changent les mots.

Avatar du membre
Kakunoshin Niitsu
Maître potier
Messages : 548
Enregistré le : 23 sept. 2009, 15:55
Localisation : Aoiya

Re: Les récits complets d'Hirata (Kyudo, tueur!, zatoichi,..

Message non lu par Kakunoshin Niitsu » 24 mars 2011, 22:51

Je reviens poster mon avis sur le dernier Hirata. :)

La loi du temps est un recueil d'histoires de Hiroshi Hirata au titre doublement évocateur.Dans un sens le temps qui passe, permettant la réflexion et l'analyse des meilleurs choix à faire ou pouvant également servir à une profonde remise en question.D'un autre la loi d'une époque, de ses règles souvent cruelles avec leurs conséquences sur la population et l'honneur exacerbé des Bushi (guerriers).Les quatre récits de ce manga seront l'occasion pour le maître du gekiga de nous présenter différentes destinés et d'explorer en parallèle des deux axes principaux divers thèmes : De la vengeance en premier lieu puis en suivant l'ordre des chapitres la responsabilité de chacun face aux exactions d'un supérieur en passant par l'acceptation de la mort (et de la vie) en choisissant une nouvelle voie à une époque difficile, pour terminer avec l'introspection d'un tyran après avoir subit la révolte des paysans qu'il martyrisait.

Des récits à la violence très présente.Réalité du Japon d'autrefois comme le montre l'auteur avec ces chapitres basés sur des faits réel dans l'histoire du pays.Cela fait de ce manga, clairement un titre pour lecteur averti.L'auteur livre quatre épopées poignantes.Nous faisant comprendre l'importance des décisions et surtout des actes sur sois et sur autrui, nous ne pouvons que rester admiratif face à la vie de certains de ces hommes et de ces femmes qui peut inviter à relativiser sur les difficultés que nous pouvons rencontrer dans notre existence actuelle.

Il vivait des jours tranquilles reste mon chapitre préféré (chacun aura le sien).La vie de ce greffier qui prête son image à la couverture (sublime) est un bel exemple.Appliqué dans son métier, fidèle à son seigneur et vivant la vie paisible à laquelle il aspire avec son épouse.Il assistera impuissant à l'ascension fulgurante d'un intendant usant de son pouvoir pour assouvir ses pulsions sexuelles.Devant l'inaction des Bushi et les drames se succédant, il va choisir d'agir en acceptant pleinement le sort qui lui est promis.Ce récit comme les autres est servit par un dessin travaillé et réaliste, appuyé par une grande documentation de la part du mangaka.

Pour finir le bonus original en fin de volume est très appréciable ! Un échange de mail entre maître Hirata et son éditeur.Il est amusant de constater l'insistance de ce dernier pour pousser l'auteur à rendre ses planches avant les dates limites (avec Hirata cela semble nécéssaire).Une présence également importante dans la recherche de livres historique indispensable à la réalisation de ce one-shot.La traduction semble ici impecable et donne une raison de plus pour se procurer cette oeuvre ! Avec ce titre Hiroshi Hirata devient un incontournable dans ma mangathèque et l'envie de découvrir ses autres travaux se fait ressentir comme j'avais pu le faire avec Jiro Taniguchi autrefois.
Image
Quand les hommes ne peuvent changer les choses, ils changent les mots.

Avatar du membre
Koiwai
Rider on the Storm
Messages : 10881
Enregistré le : 18 avr. 2008, 11:52
Localisation : Lille

Re: Les récits complets d'Hirata (Kyudo, tueur!, zatoichi,..

Message non lu par Koiwai » 27 nov. 2014, 13:44

Image

La fiche sur le site


Hiroshi Hirata, l'un des grands gekikaga sur le thème du samouraï, est indissociable en France du nom d'Akata. Après nous l'avoir fait découvrir via de multiples oeuvres publiées au fil des ans chez Delcourt, les éditions Akata reviennent sur cet artiste pas comme les autres avec L'argent du déshonneur, épais ouvrage de près de 400 pages servi dans une édition de toute beauté, avec préface, très intéressante postface de l'auteur lui-même, biographie mettant bien en avant ses thèmes de prédilection, impression irréprochable sur papier de haute qualité, traduction claire avec un langage adapté, de bons choix de police et un très beau travail sur les onomatopées... Les conditions parfaites, donc, pour découvrir ce qui est sûrement l'un des titres de Hirata qui a le plus de chose à dire (et c'est dire !).

Comme quasiment toujours avec Hirata, on plonge au coeur de l'univers du Japon féodal et du bushido, univers que l'artiste a encore et toujours à coeur de décortiquer autant dans ses facettes dures et cruelles que dans son esprit, celui des bushi et de leur sens de l'honneur et du sacrifice fort. Mais ici, l'esprit du bushido, cette voie du guerrier si souvent droite dans ses convictions, se voit meurtrie, corrompue par ce qui est encore de nos jours l'un des pires fléaux de l'humanité, l'argent.

Nous sommes dans la première moitié du 17ème siècle, vers les années 1630, à une époque où se sont répandues les "contrats sur sa tête", qui voyaient les samouraïs battus au combat, sur le point d'être décapités, pouvoir avoir la vie sauve en signant de leur main ensanglantée une promesse économique au vainqueur (en gros : de l'argent contre la vie sauve). Hanshirô Kubidai est un "recouvreur de dettes", bushi qui, pour se sauver lui-même, est chargé de récupérer l'argent que doivent les hommes ayant signé de tels contrats. Chapeau enfoncé sur un visage que l'on ne voit jamais pleinement mais que l'on devient désabusé, il observe, dans chacune des 7 nouvelles composant le livre, à quel point l'argent a pu détruire la vie et l'honneur des anciens guerriers.

Les différentes nouvelles sont de longueur variable, pouvant aller d'une trentaine à une centaine de pages, mais si elles partent toutes sur la même base (Kubidai vient récupérer la dette), elles s'avèrent très différentes les unes des autres. Les raisons ayant poussé les guerriers à sauver leur tête sont diverses, vont du simple désir de ne pas mourir à l'envie de sauver d'autres personnages, comme le vieillard du récit les 11 Salopards qui se voit extrêmement mal récompensé. A l'arrivée, même des années plus tard, ces demandes d'argent de cet argent devenu au coeur de tout, rattrape de terrible manière ceux qui y sont lités, créant le conflit entre maîtres et disciples, obligeant l'épouse à se sacrifier pour son mari, décimant des familles décidant de retourner leur arme contre eux tant l'espoir n'est plus là. Certains sombrent dans les pires bassesses et vont totalement à l'encontre des préceptes qui les animaient avant, d'autres tentent finalement de racheter leur honneur... mais n'est-il pas déjà trop tard ?

Hiroshi Hirata offre des récits sans concession, dominés par une violence physique bien présente mais, comme toujours avec lui, réaliste et servant avant tout la dureté de ses récits. Les ambiances s'avèrent néanmoins assez variées, l'horreur presque poisseuse des "11 Salopards" par exemple, précédent le superbe "Pleine Lune du Huitième Mois", qui commence d'une manière familiale assez paisible, presque tendre, avant de basculer dans l'effroi. Mais au bout du compte, le message reste toujours celui d'une dignité humaine bafouée ou détruite par le pouvoir de l'argent. Le tout fait brillamment écho à notre monde contemporain, où le pouvoir de ce fameux argent semble toujours plus poussé jusqu'à atteindre des sommets inquiétants.

Comme souvent, Hirata nous offre alors une oeuvre d'une puissance rare, qu'il vaut mieux lire à petites doses pour bien en profiter (d'autant que c'est tout de même dense), et qui s'impose comme un indispensable de l'auteur.
Image

Répondre