Goyô

Rubrique consacrée aux seinen, c'est à dire des séries se destinant à un lectorat adulte.
Sorrow
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Goyô

Message non lu par Sorrow » 21 févr. 2010, 21:30

Goyô
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Auteure : Natsume Ono
Éditeur : Kana
Nombre de volumes VO : 6 (en cours)
Nombre de volumes en francophonie : 5 (en cours)
Traductrice : Pascale Simon


Masanosuke est un rônin, c'est-à-dire un samouraï sans maître, congédié par son daimyô à cause de sa trop grande timidité…
Contraint d’errer de ville en ville, à la recherche de moyen de subsistance, il fait la rencontre de Yaichi, un jeune homme mystérieux assez débauché.
Lorsque Yaichi lui propose de devenir son garde du corps, Masa ne se doute pas que Yaichi est en fait le chef d’une bande de brigands, les Goyô, spécialisés dans les enlèvements contre rançon !
Masanosuke ne sait trop que penser, mais il est en même temps fasciné par les Goyô et leurs singularités.
La bande compte en tout quatre membres : Umezo, le tenancier de la taverne où la bande se réunit, O-Take, la fille de la bande dont Umezo est amoureux, l'informateur Matsukichi et l'énigmatique Yaichi. Progressivement et presque malgré lui, Masa est embarqué dans les affaires louches des Goyô. En même temps que le lecteur, Masa découvrira un peu mieux les différents membres de cette bande de ravisseurs peu commune.
(résumé Manga-news)


L'habit ne fait pas le moine. Ou dans le cas de Goyô, le sabre ne fait pas le samouraï.
En effet, un manga prenant place dans le Japon de l'ère Edo n'est pas forcément un titre historique.
Un samouraï n'est pas toujours, contrairement à la vision populaire romanesque, un guerrier fier et sans peur.
Et ce n'est pas parce que les personnages sur la couverture ont des têtes de zombies qu'il s'agit d'un titre pour goths dépressifs.

Depuis quelques temps déjà, Kana s'attache à nous proposer des titres un peu différents et de qualité, en dehors du shônen mainstream. L'éditeur enrichit ainsi sa collection Big Kana avec Goyô, l'histoire de Masanosuke Akitsu (Masa), un ronin manquant cruellement de confiance en lui (malgré de grandes capacités au combat), timide, introverti et à l'air toujours triste. Pas vraiment l'image qu'on se fait d'un samouraï. C'est ce qu'a dû penser son maître au moment de le congédier, et ses employeurs suivants aussi. Découragé à force de ne pas trouver de travail mettant en avant ses compétences à cause de la faiblesse de son caractère, il rencontre alors par hasard Yaichi. Homme mystérieux, intriguant et dégageant un fort charisme, il est l'exact opposé de Masa. Pourtant, celui-ci va se prendre d'affection pour le ronin, et l'entraîner peu à peu dans son monde, celui des brigands ravisseurs de gens. Car c'est bien ce qui se cache derrière ce nom, Goyô (qui désigne la feuille à cinq lobes de l'érable japonais lisse), un groupe de bandits, au demeurant fort sympathique. Masa va donc devoir faire un choix : vivre honnêtement dans un monde où il est rejeté à cause de son caractère, ou bien pénétrer dans un univers où se trouvent des gens avec qui il se sent bien, où il pourra acquérir de la confiance en lui, mais qui risque de lui coûter son honneur de guerrier ?

Loin d'être un titre où les combats à coup de sabres font rage, Goyô est avant tout la chronique d'un groupe de personnes. Natsume Ono, l'auteure, nous conte la vie quotidienne de ces bandits amicaux, aux pensées et au passé souvent bien mystérieux, ainsi que la façon dont Masa s'intègre parmi eux. Le titre est donc surtout constitué de dialogues, qui sonnent très justes, sur les problèmes de conscience du ronin timide, les méthodes employées pour les enlèvements, et la découverte progressive des différents membres des Goyô. Des personnages d'ailleurs bien pensés, intéressants, voire fascinants, ils dégagent tous un fort charisme et sont entourés de mystères.
Ce manga est donc à envisager comme une sorte de tranche de vie prenant place dans le Japon du moyen-âge, mais qui aurait pu avoir pour cadre n'importe quelle époque sans pour autant que la trame ne soit affectée, sur un ton sérieux et bien mené tout en restant très dynamique, et avec un fort fil conducteur. L'histoire se révèle prenante, les personnages profonds et bien construits,... il n'en faut pas plus pour accrocher à Goyô.

Mais là où le titre divisera les foules, ce sera probablement au niveau du graphisme. Sans être complètement hors-norme, le trait de la mangaka a très certainement du caractère et de la personnalité, et pour cette raison, ne plaira pas à tout le monde. On peut y trouver des ressemblances avec le trait de Kei Toume, dans cette tristesse et nostalgie qui se dégagent des dessins, et certaines planches font penser à des tableaux très japonais. Mais dans tous les cas, le graphisme tient pour une grande part dans l'ambiance très forte, unique et sérieuse qui se dégage du titre. Et l'époque des samouraï se prête étonnamment bien au style de l'auteure. Tous cela rend Goyô encore plus intriguant et accrocheur.

Oeuvre au titre mystérieux, au graphisme plein de personnalité, à l'histoire solide et aux personnages charismatiques, Goyô s'avère donc une très bonne surprise. Dans un genre où on croyait que devait toujours absolument être mis en avant l'art du sabre et le Bushidô, le titre de Natsume Ono vient insuffler un vent de renouveau et une vision différente, plus humaine et proche de la réalité du commun des mortels de cette époque, le tout sur un ton contemplatif, tranquille, passionnant et plein de caractère. Un titre à essayer absolument si l'on veut lire quelque chose d'à la fois divertissant, différent, et mature.

Note sur l'édition : Le travail de Kana est, je dois l'admettre, de qualité. Un très bon travail sur le logo de la jaquette, une bonne qualité d'impression, une traduction fluide, un papier moins transparent que d'habitude... Rien à redire, du bon boulot sur ce titre.
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