Le coffre aux esprits

Rubrique consacrée aux seinen, c'est à dire des séries se destinant à un lectorat adulte.
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jojo81
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Le coffre aux esprits

Message non lu par jojo81 » 31 juil. 2010, 14:56

Le coffre aux esprits
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Tome 1:
Le coffre aux esprits est scénarisé par Natsuhiko Kyogoku, connu pour mettre en oeuvre des yokai, et dessiné par la talentueuse Aki Shimizu.
Forcément, entre la notoriété du scénariste, le titre et la couverture, je m'attendais à un manga sur les yokai, créatures du folklore japonais. Et ben non ! Ici, pas de yokai ! Mais ce n'est pour autant que ce premier tome déçoit. Au contraire même !
 
L'histoire met en scène au départ deux jeunes écolières. La première, Kanako, est une jeune fille modèle, très appréciée de part son charme et sa situation familiale. L'autre s'apelle Yoriko. Sa mère la dégoute et elle est la cible de moqueries de ses camarades. Contre toute attente, Kanako se rapproche de Yoriko. Au fil du temps, cette dernière tombe amoureuse de de la belle et intrigante Kanako. Mais un jour, la charismatique jeune fille se fait renverser par un train sous les yeux de Yoriko. Suicide ? Accident ? Meutre ? Quel est le secret que cache se drame ?
L'intrigue est bien plus complexe et met en scène plusieurs personnages. L'inspecteur Kiba enquêtera sur l'affaire.
Le coffre des esprits est un manga très bien ficelé. Le titre peut paraitre brouillon et incompréhensible lors de la première parti, mais par la suite tout s'éclaire. Ce thriller semble laisser place au fantastique, mais pour l'instant celui ci ne domine pas. Tout est réunit pour nous intriguer et nous passionner.
 
Côté graphisme, c'est très réussit. Aki Shimizu est connue pour avoir dessiner Bloodsucker ou Qwan. Son trait est fort agréable. Les personnages ont des expressions très marquées et changeantes. Ce qui nous embrouille encore plus dans le bon sens du thème. Au niveau des décors, c'est tout simplement magnifique. Seule ombre au tableau, les tenus vestimentaires de certains personnages qui ne sont pas en accord avec l'époque où ce passe l'oeuvre, à savoir les années 40.
 
Côté édition, Soleil a fait du bon boulot. La couverture est accrocheuse, on a droit à plusieurs pages couleurs, le papier est de bonne qualité. A ce prix, on a vu pire comme édition, donc on ne va pas s'en plaindre. Le seul problème avec cette adaptation est la police des points d'interrogation.  Je n'y accroche vraiment pas !
 
En définitive ce premier tome du coffre aux esprits est très emballant. On ne peut s'empêcher d'être intriguer par ce titre. On attendra très patiemment la sortie du second tome pour confirmer l'intérêt de cette série.
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Koiwai
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Re: Le coffre aux esprits

Message non lu par Koiwai » 01 août 2010, 17:46

Tome 1:

A l'origine du Coffre aux Esprits, on retrouve une histoire de Natsuhiko Kyogoku, romancier principalement connu pour ses oeuvres mystérieuses tournant autour des yokai. Aux dessins, nous retrouvons la renommée Aki Shimizu, auteure de titres très appréciés tels que Suikoden III ou Qwan.

Peu après la deuxième guerre mondiale, dans une école pour filles du Japon des années 50, Yoriko Kusumoto, une jeune fille de 14 ans timide, solitaire et dépourvue de la présence d'un père depuis l'enfance, est la cible des moqueries de ses camarades de classe, et mène une vie emplie de désarroi entre une mère hystérique qui la considère comme un démon et un beau-père repoussant. Mais un jour, elle est abordée, à la surprise générale, par Kanako Yuzuki, une élève reconnue pour sa beauté mystérieuse et fascinante qui confine à la perfection. Rapidement, les promenades nocturnes paisibles et romantiques se suivent, et les deux demoiselles se lient d'une amitié très soudée, si bien que Yoriko en vient à se demander si elle n'aime pas Kanako.
Mais pendant cette courte introduction d'une trentaine de pages, quelques éléments mystérieux viennent déjà titiller le lecteur. Qui est exactement la mystérieuse Kanako ? Quel est le sens de la phrase "chacune est la réincarnation de l'autre" qu'elle prononce ? Autant d'éléments qui laissent comprendre d'emblée au lecteur que les deux jeunes filles semblent bien plus liées que par une simple amitié, et que le fantastique sera ici de mise.
Les mystères ne font que commencer, lorsqu'un soir, pendant l'une des expéditions nocturnes des deux jeunes filles, Kanako, en pleurs, se retrouve la minute d'après sous les roues d'un train... Est-là une tentative de suicide ? Un accident ? Ou même un meurtre ? C'est ce que tentera de découvrir l'inspecteur Kiba, présent dans le train au moment des faits. Mais très vite, l'enquête prend des proportions surnaturelles et étranges...

Le moins que l'on puisse dire, c'est que le Coffre aux Esprits intrigue beaucoup dès ses premières pages, un avant-goût nous étant même offert à travers des pages introductives en couleurs, dont l'étrange contenu, à première vue, semble n'avoir aucun rapport avec la trame principale ou même le synopsis proposé par les éditions Soleil en quatrième de couverture.
Et pour cause: si vous vous attendiez ici à une enquête policière traditionnelle, sachez que vous faites fausse route. Tout au long de ce premier tome, les auteurs multiplient sans véritables transitions l'arrivée de nouveaux personnages dont les histoires semblent destinées à venir s'entremêler autour de l'enquête: les mystères liés à Kanako, à son accident et à sa beauté parfaite, l'évolution de Yoriko après l'accident et les différentes facettes de sa personnalité, parfois inquiétantes et qui viendraient presque justifier le fait que sa mère la voie comme un démon, le lien obscur et "éternel" qui semblerait exister entre les deux jeunes filles, les pensées de l'imposant inspecteur Kiba, dont on se demande pourquoi il se sent aussi vide intérieurement, la découverte de corps démembrés ici et là, et les pensées d'un individu obsédé par une poupée... Ce ne sont là que quelques exemples de ce qui vous attend, ce premier opus regorgeant d'autres détails tout aussi mystérieux.

Petit à petit, au fil de la lecture, les principaux personnages, tous torturés, se dévoilent donc, et certains, à l'image de Yoriko, laissent transparaître une folie parfois insoupçonnée, que fait parfaitement ressortir le coup de crayon d'Aki Shimizu, capable de varier subitement et de manière saisissante les expressions faciales des protagonistes. Au final, parmi les principaux personnages de ce premier tome, celui qui nous apparaît comme le plus sensé, ou du moins le plus humain, reste l'inspecteur Kiba, massif et bourru, facilement attachant, et dont l'envie de découvrir les nombreux mystères autour de l'accident de Kanako captera facilement le lecteur. Mais l'on devine également que l'inspecteur cache des choses...

Si la narration décousue, se partageant sans véritables transitions entre la multitude de personnages, peut sembler être un handicap au départ, elle s'avère finalement être l'un des moteurs de l'intérêt du récit, car elle lui offre une ambiance énigmatique saisissante. Ici, aucun élément n'est donné de manière concrète, du moins en ce qui concerne ce premier tome. Et si le lecteur comprend très vite que tous les mystères ont un lien entre eux et que tous les personnages y sont ou y seront mêlés d'une manière ou d'une autre, volontairement ou involontairement, ce sera bel et bien à lui de tenter de rassembler les éléments, de faire des rapprochements logiques pour tenter de comprendre ce qui se trame réellement. Les mordus d'histoires mystérieuses construites comme un puzzle devraient être ravis. Mais qu'on se le dise, il faudra lire l'ouvrage de manière très attentive pour espérer tout comprendre, car dans le Coffre aux Esprits, chaque petit évènement, chaque détail, chaque dialogue semble avoir son importance. Et si, au fil de la lecture, on a l'impression de commencer à comprendre ce qui peut bien se tramer, il faudra s'attendre à de nouveaux rebondissements venant sans cesse enrichir l'ensemble, à l'image de cette toute dernière page qui voit le personnage de la couverture faire sa première apparition. Un tome complet avant qu'il n'apparaisse. Intrigant, vous dit-on.

Pour revenir sur les dessins, dont on a déjà dit qu'il s'avèrent redoutablement efficaces quand il s'agit d'offrir des expressions variées et réussies aux personnages, soulignons également la grande maîtrise qu'a Aki Shimizu de son trait. Chaque personnage revêt un physique qui lui est propre et est instantanément reconnaissable, le trait est fin, précis et détaillé, et les décors largement présents. Quant au découpage et à la mise en scène, ils savent rendre l'ensemble très immersif. Cependant, un détail pourra en rebuter certains: les physiques de certains protagonistes peuvent paraître exagérément caricaturaux, à l'image de la mère laide et sans cesse hystérique de Yoriko, de son écoeurant beau-père dégoulinant de sueur, ou encore du serviteur bossu du centre de recherche. Toutefois, une fois ce détail accepté, on se rend compte qu'il contribue largement à l'instauration d'une ambiance assez malsaine et poisseuse.

Si, après avoir vu l'élégante couverture et lu le résumé un brin simpliste à l'arrière du tome, vous vous attendiez à un manga plus simple que ce qui a été dit, vous avez donc compris que vous faisiez fausse route. Très riche, mystérieux, surnaturel, malsain et beau, ce premier tome ravira les amateurs d'intrigues complexes dont les liens restent encore à dénouer, et pourrait être une excellente expérience pour quiconque a envie de s'engager dans du seinen plus poussé que la moyenne. Au Japon, la série s'est terminée il y a peu avec son cinquième volume, et l'on a donc bon espoir que le rythme ne baisse jamais par la suite. En attendant de le savoir, ce premier volume est un coup de maître dans le genre.

Un tel ouvrage méritait une belle édition, et Soleil ne s'y est pas trompé. Si des moirages persistent par moments, l'impression est dans l'ensemble satisfaisante. La traduction est fluide malgré quelques petites coquilles d'ordre orthographique, le papier est de bonne qualité, et les 8 premières pages en couleurs sont un véritable régal pour les yeux et raviront tout amateur d'Aki Shimizu.
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Koiwai
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Re: Le coffre aux esprits

Message non lu par Koiwai » 07 oct. 2010, 18:55

Tome 2:

Après un premier volume délicieusement mystérieux, ce deuxième tome du Coffre aux esprits se sera fait attendre avec une certaine impatience... Mais pour apprécier pleinement cet opus, il faudra beaucoup s'accrocher, principalement pendant toute la première partie, qui voit Sekiguchi et Toriguchi contacter un certain Kyôgokudô, un divinateur talentueux, pour poursuivre une enquête sur Onbako, le présumé chef d'une secte, qui ne serait pas étranger aux meurtres ayant eu lieu récemment.
C'est donc avec plaisir que l'on découvre enfin Kyôgokudô, l'homme affichant son charismatique visage sur les couvertures des deux premiers volumes. Très vite, l'individu dévoile un esprit affuté pourvu d'un délicieux cynisme, au cour de ce qui se présente comme une véritable joute théorique entre les trois personnages, et pendant laquelle Kyôgokudô présente les différences entre spiritistes, voyants, religieux et doués de pouvoirs. Et c'est ici qu'intervient un petit problème: en effet, le lecteur qui ne s'intéresserait pas le moins du monde à tout ce qui est du domaine du spiritisme, du religieux ou, de manière plus générale, de l'invisible, risque fort de déchanter face à ce long et très dense passage de blabla théorique durant tout de même une bonne soixantaine de pages. L'ensemble est rendu d'autant plus complexe par une traduction pas toujours au point, loin d'être mauvaise, mais ne faisant simplement pas toujours ressortir de manière efficace les termes et les subtilités du débat qui anime les trois protagonistes. Quoi qu'il en soit, cela ne gênera pas trop le reste des lecteurs pour apprécier la pertinence de ce qui est raconté ici par l'intermédiaire d'un Kyôgokudô décidément très intéressant.

La suite du tome revient dans les tons du premier volume. Après ce passage laissant deviner que l'enquête de Sekiguchi et Toriguchi a elle aussi un lien avec les autres affaires, nous retrouvons ce cher Kiba, qui continue son enquête en cavalier seul, jusqu'à ce que Yoriko affirme se rappeler d’un homme qui aurait poussé son amie. Et pendant ce temps, Kanako, hospitalisée dans un étrange bâtiment ressemblant à une boîte géante, disparaît purement et simplement !
De son côté, le détective privé Enokizu Reijirô se voit confier la recherche d'une personne... qui n'est autre que Kanoko. Mais loin des interrogations des autres personnages, cette demande d'enquête semble plutôt avoir des raisons plus familiales, mais tout aussi étranges... Comment cela sera-t-il lié au reste ?
Ainsi, loin de commencer à s'éclaircir, le récit ne fait que devenir de plus en plus complexe, en rendant certains personnages encore plus étranges et suspects qu'au premier abord, et en laissant clairement deviner, à travers quelques points communs comme ce mystérieux individu gantelé ou la thématique récurrente de la boîte, du coffre, du vide à remplir, que les différentes enquêtes de l'oeuvre ont toutes un lien.

Ce qui reste le plus appréciable dans le Coffre aux Esprits, c'est que malgré la complexité de l'intrigue, les auteurs ne prennent jamais leurs lecteurs pour des idiots. Rien n'est jamais dit clairement sur les différents évènements, c'est au lecteur de rassembler certaines pièces du puzzle, et il est bien aidé dans cette tâche par certains éléments semblant en dire long, à l'image de ces énigmatiques pages 105 à 116, qui clôturent le chapitre 3 en réveillant allègrement notre envie d'émettre des hypothèses. Et suite à cela, on pense volontiers que certains personnages semblent définitivement bien plus impliqués dans l'affaire qu'il n'y paraît.

Après une première partie très théorique et métaphysique qui pourrait en dérouter plus d'un au point de les faire lâcher prise, ce deuxième volume tient ses promesses. Le mystère est bien entretenu, et le lecteur ayant envie d'une oeuvre où il participera activement à l'enquête sera comblé.


[spoiler]J'avais déjà cette impression dans le premier tome, mais moi je dis que l'inspecteur Kiba est bien plus louche qu'on ne pourrait me croire, surtout après les pages 105 à 116 de ce tome. Si je me souviens bien, dans le tome 1, Kiba parlait de sa grand-mère décédée (et il est question d'une grand-mère décédée dans ces pages) et du fait qu'il se considère comme une coffre vide... Bizarre.[/spoiler]
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Re: Le coffre aux esprits

Message non lu par Koiwai » 07 janv. 2011, 16:14

Tome 3:

Kyôgokudô et les autres se réunissent pour tenter d'emboîter les unes dans les autres les différentes pièces de ce grand puzzle constitué des différentes enquêtes, qui semblent toutes plus ou moins liées. Les éléments se rassemblent autour d'Onbako, et petit à petit, une hypothèse se met en place, dépassant tout ce qu'ils pouvaient imaginer...

Ainsi, ce volume se dresse plus comme un tome de révélations que comme un volume continuant de faire aller les méninges du lecteur. A vrai dire, ce dernier pourra ranger ici son esprit de déduction, puisque les hypothèses apparaissent sans qu'il ait besoin de vraiment réfléchir, tout au plus en se concentrant au maximum pour ne pas perdre le fil, puisque tout arrive par la bouche d'un Kyôgokudô très bavard et pas toujours facile à suivre, et dont la grande sagacité, qui peut apparaître exagérée au point de ne plus être crédible par instants, peut en plus avoir tendance à agacer.

L'autre gros problème de ce volume est son ancrage toujours plus profond dans la spiritualité et l'histoire japonaise, avec, notamment, des références à des ouvrages littéraires historiques et mythologiques comme le Kojiki, un ancrage qui risque fort de rebuter celles et ceux qui ne connaissent aucun des nombreux termes sur ces sujets, d'autant que l'éditeur ne semble pas avoir jugé utile d'apporter ne serait-ce que quelques notes explicatives succinctes pour les principaux d'entre eux. Au final, les lecteurs qui étaient déjà rebutés par les joutes théoriques spirituelles et religieuses du deuxième volume risquent ici de déchanter complètement.

Quant aux autres, à défaut de pouvoir se régaler en émettant des hypothèses comme dans les deux premiers tomes, ils devraient rester fascinés par le contenu riche et dense, très dense, de ce qui est narré, ainsi que par les révélations et hypothèses très solides émises par Kyôgokudô, d'autant que la beauté des dessins d'Aki Shimizu, sa mise en scène posée et son don pour les dialogues bien sentis continuent d'offrir au titre une ambiance et un charme uniques. A présent, on attend surtout de voir ce qui nous attend par la suite. Les hypothèses de Kyôgokudô sont d'une solidité à toute épreuve, mais il reste encore deux tomes, et gageons que beaucoup de surprises nous attendent encore, à commencer par le bouleversement de la fin de ce volume.
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Re: Le coffre aux esprits

Message non lu par Koiwai » 24 août 2011, 14:15

Tome 4:

Petit à petit, les pièces du puzzle se rejoignent et se ferment autour d'Onbako, par l'intermédiaire d'un Kyôgokudô que l'on croirait omniscient tant il fait preuve de perspicacité. L'annonce de la mort de la jeune Yoriko vient de tomber, et le temps joue désormais contre nos enquêteurs. L'heure est alors venue pour Kyôgokudô d'aller affronter verbalement Terada, le faux devin, pour avancer vers la vérité...

Huit mois après le troisième tome, l'heure est enfin venue de découvrir la suite du Coffre aux Esprits. Après un tel laps de temps entre deux volumes, inutile de dire que replonger dans une oeuvre aussi dense, spirituelle et riche en personnages est assez difficile. Il faudra donc attendre un petit moment pour réussir à bien se rappeler qui est qui, qui fait quoi et quels sont les différents enjeux. La tâche est d'autant plus ardue que la première partie du tome se consacre à une impressionnante lutte psychologique entre Kyôgokudô et Terada. Le tout est très bavard, les références littéraires et spirituelles pleuvent à nouveau, et l'on regrette toujours autant l'absence de notes de traduction qui auraient vraiment pu être utiles dans certains cas. En somme, si l'on ne s'accroche pas, la lecture, pourtant intéressante, risque une nouvelle fois de devenir trop barbante pour beaucoup de monde.

Après ce passage, la série semble être dans sa dernière ligne droite. Les démons de Terada se révèlent, et tout accuse Kubo Shunkô. On était alors loin d'attendre ici un coup de théâtre relançant totalement la série. A un volume et demi de la fin, l'enquête semble devoir être totalement reprise.
On se demande bien comment tout ceci va tourner, et si toute la vérité va pouvoir être levée d'ici à la fin de la série. Mais c'était, une nouvelle fois, sous-estimer le personnage de Kyôgokudô, qui, pendant toute la deuxième partie du volume, va encore faire parler ses incroyables capacités de perspicacité et de déduction pour commencer à lever le voile sur les problèmes et le rôle des différents personnages, les uns après les autres. Suzaki, Mimasaka, Yôko... chacun des protagonistes renferme en lui des secrets bien gardés, et Kyôgokudô va se faire un plaisir, les uns après les autres, de leur extraire leur démon...

Ainsi la fin du volume se fait-elle beaucoup plus accessible, car beaucoup plus linéaire. Mais ces qualités amènent d'autres défauts. Ici, le caractère que l'on croirait omniscient de Kyôgokudô tend à irriter. Sans plus jamais réfléchir par lui-même, le lecteur voit déballées sous ses yeux toutes les vérités, les unes après les autres, se contentant de les assimiler, et ce qui faisait la force du début de la série disparaît. Cet aspect est d'autant plus dommage que la façon dont Kyôgokudô comprend tout donne l'impression de grosses facilités scénaristiques.

Pour autant, difficile de bouder son plaisir à la lecture. Après une première partie de tome pas forcément très accessible, la deuxième partie est d'une fluidité exemplaire au niveau des révélations apportées (au vu de la narration linéaire, le contraire aurait somme toute été très décevant), et le trait fin, expressif et détaillé d'Aki Shimizu fait des merveilles dès qu'il s'agit de créer l'ambiance.

Le Coffre aux esprits reste une lecture délicieuse pour quiconque accroche au style et à l'ambiance, mais difficile de ne pas avouer que l'on en attendait un peu plus, surtout au niveau de la construction narrative.
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Re: Le coffre aux esprits

Message non lu par Koiwai » 22 oct. 2011, 12:45

Tome 5:

Tous les acteurs sont à présent réunis au laboratoire de Mimasaka, pour les ultimes révélations, qui occuperont tout de même l'ensemble du volume, portées par les interminables blablas de Kyôgokudo, plus que jamais analyste pertinent. Et comme dans le précédent volume, c'est justement ce qui déçoit le plus dans cette série: ce personnage d'une incroyable pertinence, que l'on croirait omniscient tant il est capable de dévoiler la vérité et d'appuyer ses raisonnements en se basant sur... rien du tout, finalement. Et en somme, il paraît donc difficile d'y croire, tant les nombreuses informations semblent sortir un peu de nulle part.

Les faiblesses de la série, à présent évidentes, ne s'arrêtent pas là, puisque malgré la grande linéarité de ces révélations sur l'intrigue se découpant en plusieurs actes, les lecteurs les moins attentifs devront beaucoup s'accrocher pour comprendre toutes les explications de Kyôgokudo, et même en restant scotché par l'oeuvre, on risque fort de passer au-dessus de nombreux éléments et références à la limite du compréhensible. Est-ce la faute à l'auteur du roman lui-même ? A Aki Shimizu qui a été incapable de bien tout faire ressortir ? A l'édition de Soleil Manga, dépourvue de notes de compréhension qui auraient pu être utiles et parsemée d'erreurs ? Sur ce dernier point, il faut bien avouer que les nombreuses fautes d'orthographe, la traduction pas toujours claire et, surtout, la confusion dans les noms des personnages par moments (Sekiguchi/Toriguchi au détour d'une page, Yôko/Kanako sur une autre) ont de quoi déstabiliser un récit où la traductrice elle-même ne semble pas avoir tout compris.

Pour en revenir à l'omniscience de Kyôgokudo, on regrette également que celle-ci mette de côté la majorité des protagonistes secondaires, dont on a l'impression qu'ils ne servent globalement à rien hormis au détour d'une ou deux pages, qu'il s'agisse de Sekiguchi, de Toriguchi, d'Enokizu, ou même de l'inspecteur Kiba, lui qui était si intéressant au départ. Au fil de tergiversations dont on ne comprend réellement que les grandes lignes (ce qui, ironiquement, suffit pour comprendre la conclusion de l'histoire... Le récit aurait-il été inutilement complexifié par des éléments finalement anecdotiques ? Il faut croire), le seul Kyôgokudo a le beau rôle de percer à jour les différents actes d'une tragédie devenant petit à petit de plus en plus morbide, malsaine, glauque, atteignant des sommets dans ce domaine via les révélations sur Yôko et Mimasaka. On a le sentiment d'avoir une oeuvre osée, allant au bout de ses idées dérangeantes, et dans ce cadre, le trait d'Aki Shimizu fait des merveilles, malgré une narration trop basique, sans grosse ampleur sur cette fin.

On reste un peu circonspect face à la conclusion du Coffre aux esprits. Après un début de série envoûtant et très intrigant, qui laissait volontiers le lecteur se régaler en émettant toutes sortes d'hypothèses, la suite ne fait que balancer de manière linéaire un nombre incalculable de révélations, en se basant sur des théories qui ont régulièrement un arrière-goût d'inutile, et via un seul protagoniste qui, de par ses blablas incessants et peu clairs, tend à alourdir l'oeuvre tout en reléguant au statut de figurants des personnages qui s'annonçaient pourtant complexes au départ (Kiba...).
Très maladroite, l'oeuvre est pourtant loin d'être mauvaise, s'avère même assez unique en son genre et globalement captivante pour ceux qui ont vraiment accroché et pourraient avoir envie de relire d'une traite toute la série pour tenter de comprendre un peu mieux certaines choses (préparez un doliprane, au cas où). Cela, on le doit principalement à une intrigue qui n'a pas peur d'aller loin, et au trait délicieux de Shimizu.
Le Coffre aux esprits a tout d'une série casse-gueule en France, et malgré les problèmes de traduction, on remerciera les éditions Soleil pour les nombreuses pages couleurs, et surtout pour avoir pris le risque de la publier dans leur politique de suivi de Shimizu. A présent, malgré les risques, on ne peut qu'espérer voir débarquer Kyoukotsu no Yume, adaptation du troisième roman de la saga de Natsuhiko Kyogoku (le Coffre aux esprits était une adaptation du deuxième roman).
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