Bah, tiens, je ne l'ai pas encore fait alors un petit récapitulatif des films de Superman jusque là.
A l'origine, le réalisateur Richard Donner avait été engagé pour réaliser le film Superman à partir d'un scénario signé Mario Puzo (l'auteur du roman Le Parrain et co-scénariste de la trilogie avec Francis Ford Coppola). Dû à la longueur exhorbitante du script, le projet a finalement été scindé en deux films qui devaient être réalisés conjointement, étant les deux parties d'une même histoire.
Le premier film sort en salles en 1978 (alors que le tournage continuait pour compléter les scènes du deuxième film) et est un succès au box-office. La vision mythologique et poétique de Richard Donner, le charisme de l'interprète principal Christopher Reeve et les effets spéciaux novateurs pour l'époque (la mise au point de la technique des câbles pour les scènes de vol) sont salués. Une version longue du film sort aussi plusieurs années plus tard, en 2001.
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Fort du succès du premier film, Richard Donner continue sur sa lancée avec le deuxième film. Mais les dépassements de budget, les délais et les tensions grandissantes avec les producteurs finissent par avoir raison de lui: il est viré avant d'avoir fini de compléter les scènes du deuxième film, malgré le tournage bien avancé. Richard Lester, un réalisateur de comédies réputé pour s'en tenir au budget et au temps de production alloués, est engagé pour le remplacer et finir le film.
Seulement, pour pouvoir effacer le crédit de Richard Donner en tant que réalisateur et que Richard Lester devienne le seul réalisateur reconnu du film, il faut qu'il ait tourné personnellement plus de 50% du film. Pour cela, les producteurs décident que de nombreuses scènes déjà tournées soient retournés par Lester. Entretemps, ils doivent faire face à d'autres complications qui vont sérieusement leur compliquer la tâche. Plusieurs acteurs ne sont pas satisfaits du sort réservés à Richard Donner et menacent de quitter le tournage, comme Margot Kidder (Lois Lane), Gene Hackman (Lex Luthor) et Jack O'Halloran (Non). Gene Hackman quitte définitivement le tournage sans avoir fini toutes ses scènes (une doublure fut utilisée de dos pour certains plans, d'autres scènes furent abandonnées), les autres finissent par rester après en avoir discuté avec Richard Donner. Marlon Brando (Jor-El, le père biologique de Superman), qui avait déjà tourné toutes ses scènes, réussit néanmoins à faire interdire l'usage de son image dans le deuxième film en avançant des questions de salaire. Les producteurs décidèrent en urgence de remplacer son personnage par celui de la mère, incarnée par Susannah York, dans toutes les scènes où il apparait. Plusieurs autres scènes furent également modifiées pour coller davantage à la vision humoristique du nouveau réalisateur.
Au bout du compte, le film sortit tant bien que mal en 1980. Il fut un succès au box-office, bien que n'égalant pas la performance du premier, et beaucoup regrettaient que la magie et l'ambition visuelle aient disparues de cette suite au profit d'un humour nettement plus présent et de moyens plus modestes.
Plus de 25 ans plus tard, à l'occasion de la sortie au cinéma de Superman Returns (qui était autant un revival qu'une sorte de suite aux deux premiers films), Richard Donner accepta finalement de participer à un projet visant à remonter intégralement le film à partir des archives retrouvées et qui contenaient la quasi-totalité des rushes qu'il avait tourné à l'époque. Il put ainsi remonter le film au plus proche de celui qu'il voulait faire à l'origine (incluant les scènes avec Marlon Brando, récemment décédé, avec l'accord de ses héritiers), mais le tournage était inachevé et il dut compléter soit à partir de prises tournées lors des essais et qui n'auraient normalement jamais dues être utilisées, soit à partir des scènes tournées par son remplaçant qu'il voulait éviter autant que possible (le strict minimum nécessaire à la narration fut utilisé). Le montage final, sorti sous le nom de "Superman II: The Richard Donner Cut" est donc un film imparfait dont la seule intention est de se rapprocher au plus près du film qu'il devait être à l'origine. Cela n'empêcha pas les spectateurs et les critiques de juger ce nouveau montage comme supérieur au précédent.
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Avec le succès du second film, Richard Lester fut embauché pour tourner le troisième pour une sortie en 1983. Sans les contraintes auxquelles il avait dû faire face sur le tournage du deuxième opus, Lester put donc partir sur les bases qu'il voulait, à savoir une vision plus humoristique. Christopher Reeve partage cette fois l'affiche avec le comédien Richard Pryor dont le personnage lui vole aisément la vedette et qui en fait des caisses. Passée l'histoire mythologique des deux premiers films, Superman doit cette fois faire face à un génie de l'informatique déluré et maladroit qui est capable de tout faire depuis un ordinateur. Digne des plus grands navets, le scénario est une horreur et s'achève par un affrontement contre un ordinateur géant autonome. Le casting change aussi: Margot Kidder (l'interprète de Lois Lane) fait les frais de son support affiché à Richard Donner sur le second film et doit se contenter d'une simple apparition, vite remplacée par Annette O'Toole qui incarne Lana Lang, l'intérêt amoureux de Clark Kent dans le film. Véritable désastre, le seul élément qui trouve grâce aux yeux des spectateurs est la prestation de Christopher Reeve, amené au cours de certaines séquences à jouer une version négative de son personnage et qui semble y avoir pris plaisir. Sa prestation culmine lors d'une scène d'affrontement entre Clark Kent et le mauvais Superman où il est amené à jouer les deux personnages (la scène la plus réussie du film, en grande partie grâce à lui).
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Suite à ce très mauvais film, Christopher Reeve et la plupart des comédiens commencèrent à se lasser de la franchise. Les producteurs décidèrent alors de réaliser à la place un spin-off sur Supergirl totalement anecdotique, réalisé par Jeannot Szwarc et avec Helen Slater dans le rôle-titre. Ce film se centre sur la cousine de Superman, arrivée plus tard sur Terre et qui se trouve confrontée à une sorcière incarnée par Faye Dunaway (la seule bonne actrice du film). Les producteurs voulaient affirmer l'appartenance de ce spin-off à la saga avec une apparition de Christopher Reeve, mais celui-ci déclina. C'est finalement Marc McClure (l'interprète de Jimmy Olsen) qui sert de lien avec le reste de la saga, campant le petit ami de Lucy Lane, la soeur de Lois. Sorte de Twilight avant l'heure, entre romance niaise et méchantes sorcières, le film sortit dans les salles en 1984 et s'avéra être un nouveau désastre de l'ampleur de Superman 3.
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La franchise ayant perdu tout son prestige avec les deux derniers films, les producteurs vendirent finalement les droits à la Cannon (sic), spécialiste des séries B et des films d'action avec Chuck Norris, pour faire Superman 4. Réticent à participer de nouveau, Christopher Reeve finit par accepter après s'être vu proposer l'écriture du scénario. Il décida ainsi d'une histoire où Superman détruirait les missiles nucléaires de la planète pour mettre fin à la Guerre Froide et créer un monde de paix. Les comédiens principaux des deux premiers films acceptèrent de revenir, y compris Gene Hackman (Lex Luthor). Sidney J. Furie fut engagé pour réaliser le film.
Malheureusement, malgré les demandes du réalisateur et des acteurs, la Cannon était investie sur plusieurs projets simultanés et refusa de mettre dans le film les moyens nécessaires pour faire les choses correctement. A un scénario peu captivant s'ajoutent alors une réalisation vache maigre, des effets spéciaux horribles dignes d'un très mauvais téléfilms et l'absence d'autorisation pour tourner dans les lieux voulus (le siège des Nations Unies étant en réalité une bibliothèque). Les comédiens n'y croient plus et seul Gene Hackman semble ne plus trop prendre les choses au sérieux et s'en amuser à la place.
Ce qui devait arriver arriva: le film (sorti en 1987) est plus qu'un désastre, c'est une catastrophe atomique à lui tout seul. Alors qu'on voyait difficilement comment il était possible de faire encore pire que les deux films précédents, Superman 4 l'accomplit brillamment. Ce film est une horreur absolue, indigne d'être appelé un film d'ailleurs tellement c'est mauvais à tous les points de vue, et la saga est enterrée pour de bon cette fois. Il faudra attendre presque 20 ans avant que Superman ne revienne sur le grand écran.
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La suite est simple: Superman disparut du grand écran pour longtemps, remplacé quelques années plus tard par Batman. Après deux excellents films par Tim Burton, cette franchise sombra à son tour avec les deux films suivants réalisés par Joel Schumacher. Entretemps, l'intérêt du grand public pour Superman s'était progressivement ravivé sur le petit écran avec le succès des séries Lois & Clark et Smallville. Plusieurs tentatives de ramener le personnage sur grand écran, dont un projet mené par Tim Nurton avec Nicolas Cage dans le rôle-titre, échouèrent.
Vers le milieu des années 2000, alors que Smallville était toujours en cours, Bryan Singer, fâché avec la Fox, abandonna le projet X-Men 3 (repris par son ami Brett Ratner) et décida de faire Superman Returns à la place. Grand admirateur des films de Richard Donner (si on compte le Superman 2 de l'époque comme tel), il décida de faire un film hommage à ces derniers et s'inscrivant dans leur continuité tout en étant un revival de la saga. Superman disparait ainsi pendant un temps et, à son retour, le monde a changé et il doit tout refaire depuis le début, à savoir redevenir Superman et retrouver sa place dans ce monde différent. Voulu comme un film plus intimiste avec un héros plus sensible, Superman Returns tente une approche plus existentielle du personnage. Bryan Singer pensait pour cela avoir trouvé l'interprète parfait avec Brandon Routh, sosie (?) de Christopher Reeve, récemment décédé, et dont il pensait qu'il pourrait inspirer la nostalgie des premiers films. Il inclua pour les mêmes raisons dans le film certains des rushes avec Marlon Brando tournés à l'époque par Richard Donner.
Superman Returns sortit dans les salles en 2006. Le film divisa profondément le public, entre ceux qui clamaient que c'était un excellent film et les nombreux déçus. La vision très personnelle de Bryan Singer sur le héros ne fit pas l'unanimité et le succès du film resta relativement modéré. Sans être un échec, la Warner était déçue des résultats là où elle avait misé de grands espoirs sur le film et Superman Returns échoua ultimement à relancer la saga, le projet de suite "Man of Steel" de Singer étant annulé au profit du reboot du même nom.
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Voilà, je pense avoir à peu près résumé la chose pour chacun des films. Personnellement, du lot, je retiens surtout le premier Superman et le Superman 2 de Richard Donner qui sont des films au charme certain, pleins de poésie et portés par une histoire à la fois belle et ambitieuse. Le Superman 2 de Richard Lester n'est pas mal non plus (sympathique), mais quand même nettement inférieur et c'est surtout l'autre version qui permet de recomposer l'histoire telle qu'elle avait été conçue à l'origine, avec les deux éléments des deux films qui entrent en totale cohérence et qui permettent enfin à l'oeuvre intégrale de retrouver son vrai sens mythologique et thématique ("Le fils devient le père et le père devient le fils.").
N'empêche, Superman 2, ils avaient vraiment fait fort à l'époque. C'est devenu l'un des exemples les plus célèbres d'une production chaotique de film avec Blade Runner, un vrai cas d'école. Je ne pense pas que les producteurs pensaient que cette controverse prendrait une telle ampleur avec le recul.