- Auteur : Kazuaki Yanagisawa
- VO : Edité chez Enterbrain en 1994, 9 tomes parus (terminé) + un one shot
- VF : Edité chez Ki-oon d'aout 2006 à aout 2008, 9 tomes parus (terminé) + un one shot
Tome 1 :
Résumé :
Le lycée Karukozaka a été transporté dans le monde des enfers. Depuis, plus personne n’a eu de nouvelles des élèves et des enseignants qu’il contenait. Six mois plus tard, l’affaire a été totalement classée par les autorités, faute d’explications. Pourtant, deux élèves ont réussi à s’échapper des ténèbres et à retourner dans le monde réel. Nobu, un jeune garçon à l’esprit rebelle, tente de se réintégrer dans son nouveau lycée. Yumi, quant à elle, s’est refugiée dans un pensionnat et essaie d’oublier tant bien que mal son passé… Néanmoins, ils ne se doutent pas que le monde est en proie à une menace plus grande encore, et qu’ils sont les pièces maitresses des évènements à venir…
Un peu d'histoire...
Pour les amateurs de RPG, le nom Megami Tensei évoquera à coups sur une des séries de jeux vidéos les plus populaires au Japon, mais bien connues en France, faute de traductions, du fait d’une censure omniprésente. La saga s’est en effet bâti sur des caractères assez sulfureux : on y trouve à chaque fois un univers contemporain ou post-apocalyptique, et de nombreuses références mythologiques, démonologiques ou religieuses. Une réputation qui a pu susciter la polémique, comme dans la récente série des Persona. Quoiqu’il en soit, une série aussi prestigieuse avec un univers aussi dense devait forcément obtenir diverses adaptations mangas digne de ce nom !
En France, c’est l’éditeur Ki-oon qui nous offre cette série. Pari risqué pour l’éditeur, car le public français ne saura pas forcément au fait des multiples références faites au jeu vidéo, et certains points du récit ne pourront être compris à leur juste valeur. Toutefois, le récit est présenté avec suffisamment de clarté pour plaire aux néophytes. De nombreuses intrigues se placent très rapidement autour des héros, et de nombreux personnages gravitent autour, en gardant encore de nombreux mystères. Il est simplement dommage que l’histoire démarre 6 mois après les évènements du jeu original, car les personnages se connaissent déjà et le lecteur peut être rapidement perdu. Fort heureusement, il sera possible de procéder à une piqûre de rappel avec « Shin Megami Tensei : If »., préquelle de la série en un tome, également disponible.
Bon, mais sinon ça vaut quoi ?
Mais étudions la série en elle-même : nous suivons principalement les traces de Nobu, qui revient des enfers et rattrapé par son destin. Rapidement, il fait la connaissance de Reiko, une camarade de classe qui va découvrir à ses dépens le monde sordide qui les entoure. Un rôle féminin pas vraiment original, mais qui offre un regard innocent qui permet de décrire l’univers. Notre héros devra alors combattre divers démons, sans pouvoirs spécifiques, muni d’un seul pistolet… et pourtant il s’en sort plutôt bien. Les combats restent ainsi presque à échelle humaine, du moins dans les séquences de combats. Pour le reste, la série n’épargne pas grand-chose aux lecteurs dans le macabre, avec même un fan-service pas forcément nécessaire, mais qui contribue à une ambiance malsaine et glauque.
Le trait de Kazuaki Yanagisawa (que l’on découvrira également avec l’adaptation de Guin Saga) a également de quoi dérouter : on ressent certaines maladresses, des visages souvent très mal équilibrés, des scènes d’actions pas toujours claires… mais se révèle diablement efficace dans les scènes d’horreurs, pas la froideur et le détachement qu’il procure. Le design des protagonistes reste sommaire, mais compensé par celui des différentes créatures. L’éditeur Ki-oon nous offre également les quatre premières pages en couleur et une très bonne qualité d’ensemble, comme à son habitude. Seule la sur-couverture, qui opte pour un léger gaufrage, se révèle fragile et peut s’abimer facilement.
Conclusion :
Au final, là où d’autres adaptations de licences célèbres se cassent la figure, ce premier tome de Shin Megami Tensei : Kahn est une bonne surprise. Il retranscrit une ambiance très malsaine, propre à la série vidéoludique, tout en restant accessible aux lecteurs qui ne connaissent pas le support originel. Loin de s’ancrer dans une linéarité digne d’un jeu vidéo, le scénario propose de nombreuses pistes et intrigues qui donneront envie d’en connaître d’avantage. On peut regretter quelques maladresses, mais l’ensemble est plutôt satisfaisant. Cette série n’est étrangement pas une des plus mises en avant chez Ki-oon. Dommage !
Shin Megami Tensei : If… est la préquelle de Kahn et se propose d’apporter les éléments d’informations qui pouvaient manquer à la lecture de cette série. On découvre les évènements qui se sont déroulés 6 mois auparavant dans le lycée Karukozaka, le jour où il a basculé dans les ténèbres, et on retrouve ainsi les héros que nous côtoyons dans Kahn, notamment Nobu, Yumi, et Pixie, le démon familier. Mais au final, on apprend que très peu de choses sur eux, car le récit ne prend pas le temps de s’intéresser à leur psychologie !
En effet, SMT : If… se contente de suivre une structure narrative propre au jeu vidéo d’origine : les deux héros affrontent des adversaires de plus en plus forts et terrifiants, Nobu trouve des armes de plus en plus dangereuses (couteau, puis épée…), Yumi acquiert des pouvoirs et peut invoquer une créature qui lui est attachée… bref, contrairement à SMT : Kahn qui ouvre de nombreuses pistes, la linéarité de ce one-shot laisse perplexe. Le jeu entier étant résumé en un seul opus, l’auteur ne prend pas le temps de développer tous les évènements, et on enchaine les étapes sans souffler, jusqu’à l’ultime affrontement. Au final, le couple de héros n’a pas l’air d’avoir affronté tous les enfers… mais cette impression est souvent partagée dans les adaptations de jeux vidéo.
Au final, SMT : If a d’avantage une valeur anecdotique qu’autre chose, au mieux informative. Elle permet de placer le contexte des évènements futurs de Kahn, mais ne va pas assez loin pour pouvoir être considéré indépendamment. La lecture de ce tome unique n’est donc pas vraiment indispensable pour la compréhension de son aînée, et sa lecture ne laissera pas un souvenir impérissable. Dommage, car on pouvait attendre beaucoup plus de sa part !
Pour aller plus loin :
-Un dossier sur la saga Megami Tensei, disponible sur le site de Ki-oon
-Un autre dossier tout aussi intéressant, qui montre le caractère sulfureux de la saga et de certains de ses ennemis (avec un certain guest star moustachu... )