Et hop, gros up, le dernier message datant d'il y a plus de deux ans et demi, soit un peu avant la sortie du volume 2. Le tome 3 vient de paraître, et c'est une lecture toujours aussi agréable, pour ma part
Tome 3:
Chaque volume des Mystères de Taisho nous arrive avec une telle lenteur (2 ans et demi se sont écoulés depuis la parution du tome 2 en France) que l'on se doit de savourer au maximum chacun des nouveaux opus de la série. Fort heureusement, la tâche n'est pas trop rude, tant on replonge facilement dans la peinture immersive que nous offre Kei Toume du Japon des années 20, des années folles, de l'ère Taisho.
Ici, nous avons à nouveau droit à deux enquêtes assez longues (une grosse centaine de pages chacune) menées par le flegmatique détective Matsunomiya et sa jolie mais énigmatique assistante Maya, une disparition et une apparition.
Dans la première, il sera question de la disparition dans la nature d’Umezane, ami de Matsu depuis l'université, alors qu'il effectuait des recherches pour une amatrice d'art près d'un village soi-disant peuplé de descendants de samouraïs disgraciés, et qui abriterait quelques trésors artistiques cachés.
Dans la deuxième, nos enquêteurs devront résoudre l'énigme de l’apparition du fantôme d'une femme apparemment sortie d’une peinture d'époque...
Deux enquêtes poursuivant la série comme elle a commencé. On y retrouve le ton assez distant des enquêtes menées par notre duo d'enquêteurs toujours aussi posé, entre un détective restant neutre en toute circonstance, et son assistante énigmatique et incapable d'exprimer la moindre émotion vive. Ne vous attendez donc pas à la moindre trace d'action: ici, tout est calme. Quant à l'aspect surnaturel qui aurait éventuellement pu apporter quelque tension, il s'estompe au fil de la progression des enquêtes pour laisser place à des réponses plus terre à terre, et souvent peu originales.
Mais la poursuite des enquêtes, comme toujours, n'est pas le principal intérêt. Ici, tout est question d'ambiance. Une ambiance très posée, de par la personnalité assez taciturne de la poignée de personnages, de par l'omniprésence du thème de l'art (ressortant bien à travers la présence récurrente de Tôko), et surtout de par le portrait de l'époque dressé par la mangaka. Partagé entre les domaines artistiques plutôt traditionnels (kakemono, binjinga...) et les évènements de l'époque (le mouvement anti-bouddhisme), le récit se complaît dans une peinture réaliste et immersive de cette poignée d'années voyant le Japon hésitant profondément entre ses traditions et les modernités de l'Occident. Une opposition ressortant fort bien à travers la mise en parallèle entre Maya, plutôt traditionnelle dans sa façon d'être, et Matsu, plus occidentalisé. Pour tout ça, le style de Kei Toume fait des merveilles. Décors et costumes sont très joliment retranscrits (on pourra dévorer des yeux à l'infini la superbe couverture de ce tome pour s'en convaincre), et l'aspect "tranches de vie", quotidien, apporte beaucoup.
Malgré tout, un fil rouge reste bien présent, en la personne de Maya, dont les parents sont de retour au Japon après de nombreuses années d'absence, et souhaitent repartir avec leur fille. Le problème, c'est que Maya n'a, étrangement, aucun souvenir de ses parents, et, en plus de ne pas parvenir à dire à l'avance à Matsu qu'elle va devoir partir, a beaucoup de mal à avouer qu'elle ne souhaite pas partir. Tout ceci apporte dans le récit quelques précisions sur le passé de Maya, mais le tout reste vague, très vague, et la jeune fille continue plus que jamais de faire flotter son aura mystérieuse tout au long du volume.
Ne cherchez pas d'enquêtes élaborées dans les Mystères de Taisho. Ici, tout est question d'ambiance, et malgré la superficialité des intrigues et la lenteur dans l'avancée du fil rouge, Kei Toume n'a pas son pareil pour nous offrir une ambiance réussie, grâce à une peinture convaincante de l'époque, que ce soit artistiquement ou historiquement. C'est là toute la force de la mangaka. Et les nouveautés de Kei Toume sont devenues si rares en France qu'il paraît impossible pour un fan de bouder son plaisir.