Comparer
Ashita no Joe et
Hajime no Ippo semble inévitable. Vouloir les opposer à tout prix paraît en revanche ridicule, d'une part parce que l'une est un hommage à l'autre, d'autre part, parce que, paradoxalement, les deux séries ne sont pas à classer dans le même genre. Ce deuxième argument est assez discutable, et pourtant j'y tiens et je vais essayer de le défendre.
Hajime no Ippo est un pur manga de sport, dans la lignée de ce qui s'est fait du milieu des années 80 jusqu'à maintenant. Manga d'apprentissage qui met en avant courage, amitié, don de soi et autres valeurs essentielles plébiscitées par les lecteurs de
shônen de l'époque, il s'inscrit, avec brio, dans une réalité commerciale assez contemporaine. Il reprend pas mal d'éléments d'
Ashita no joe : le
cross-counter, le
cork screw, la référence d'Alehas dans le post prcédent… On ne les compte plus. Pourtant, Morikawa s'affranchit de sa référence pour en créer une nouvelle, dans un genre plus actuel. Les entrainements sont beaucoup plus didactiques, les combats plus précis et plus longs ; on a le droit à des focus sur des personnages autres que le héros (qui ne se privent pas pour lui voler la vedette), etc.
Ici, on rit souvent aux éclats face aux pitreries des différents protagonistes et on frisonne devant l'intensité physique et la chorégraphie des combats.
Ashita no Joe lorgne davantage vers des thèmes sociaux. Et même si les combats de boxe occupent une place non négligeable dans le titre, ils ne véhiculent pas tout à fait les mêmes valeurs. Époque oblige, en 1968,
Shueisha n'avait pas encore sollicité les suffrages de son jeune public pour établir les commandements du
shônen à succès (procédé démagogique au possible, mais hors-sujet ici). En 1968, nous sommes aussi aux prémisses de la démocratisation du
gekiga et nous sommes 4 ans après les J.O. de Tokyo. C'est pourquoi, en relisant les premières pages du premier volume, le ton est donné : les auteurs opposent la mégalopole encore éclairée du feu olympique à ses taudis qui n'ont jamais vu la lumière. Encore avant, dès la première page, on ne trouve pas une seule fois dans la préface de Chiba le mot « boxe ». Et si on arrache cette page du manga pour la faire lire à une personne lambda, jamais il ne lui viendrait l'idée que ces écrits concernent un manga de boxe. En fait, on suit ici le parcours d'un jeune moins-que-rien, porte-drapeau d'une classe sociale, qui veut trouver un sens à sa vie incandescente.
Joe poursuit une quête de sens de la vie, Ippo une quête de sens de la force.
Ici, on rit quelquefois des facéties de Joe et des siens hors du ring et on vibre devant la dramaturgie des combats.
Pour finir, même si ça n'intéressera personne, j'ai un gros faible pour
Ashita no Joe à la lecture (par rapport à
Ippo version papier) et un petit pour
Hajime no Ippo en
anime (comparé à
Ashita no Joe 2). Ne me demandez pas pourquoi, c'est trop personnel.
