Tome 7: Arc de Conan Edogawa (7/18)
Affaire 17: Un alibi indiscutable (2ème Partie)
Conan confronte le romancier Norikazu Sasai pour le meurtre de son ami Satoru Imatake. Quel est le secret de la photo lui servant d'alibi ?
Affaire 18: Une invitation pour l'Île au Clair de Lune
L'agence de détective Mouri a reçu une lettre d'un certain Keiji Aso demandant au détective de résoudre une affaire pour lui sur une île au large des côtes. Ses honoraires ont déjà été réglés alors que Kogoro n'a jamais rencontré son client ou accepté son affaire.
N'ayant guère le choix, Kogoro part pour l'Île au Clair de Lune en compagnie de Ran et de Conan. A leur arrivée, ils découvrent que Keiji Aso est le nom d'un célèbre pianiste, né sur l'île et qui s'y est suicidé avec femme et enfant en mettant le feu à son manoir il y a 12 ans de cela. La légende veut qu'alors que le manoir périssait dans les flammes, Keiji Aso ait continué à jouer sur son piano la fameuse Sonate au Clair de Lune de Beethoven, comme habité par une force inconnue.
Pour en savoir davantage sur ce Keiji Aso, les Mouri se rendent à la salle des fêtes où se tient la cérémonie de commémoration de la mort d'Isamu Kameyama, l'ancien maire décédé depuis deux ans. Ils y rencontrent le Dr Narumi Asai, médecin de l'île, et les trois candidats à la mairie: Tatsuji Kuroiwa, le maire actuel, Hideo Kawashima, le favori de l'élection, et Masato Shimizu, un homme droit et idéaliste. La campagne fait rage, troublant le calme et la quiétude habituels de l'île, et les candidats sont prêts à tout pour remporter l'élection.
Dans la salle des fêtes se trouve un vieux piano. La légende veut que ce piano soit celui où Keiji Aso a joué son dernier concert et où l'ancien maire Kameyama a été trouvé mort d'une crise cardiaque. Dans les deux cas, l'air joué ces soirs-là était la Sonate au Clair de Lune. Depuis, la légende veut que ce piano soit maudit et les habitants n'osent pas en approcher.
Durant la cérémonie de commémoration, la Sonate au Clair de Lune se fait soudainement entendre. En se précipitant dans la salle du piano, Conan et Kogoro découvrent le cadavre du candidat Kawashima, mort sur le piano qui continue à jouer.
Pour les habitants, la malédiction du piano vient de faire une nouvelle victime. Pour Conan et Kogoro, quelqu'un se sert de la légende et des deux morts précédentes pour commettre une série de meurtres. La lettre, envoyée de toute évidence par le meurtrier, annonçait ses intentions, tel un défi lancé au détective Mouri. Le premier mouvement de la sonate a fait sa victime, il en reste encore deux.
Conan arrivera t-il à faire cesser cette série de meurtres et à arrêter le coupable avant que le troisième mouvement ne résonne et que la vérité sur cette sombre affaire ne disparaisse à jamais ?
Affaire 19: La petite amie de Shinichi (1ère Partie)
Une jeune lycéenne nommée Ryoko Akagi se présente à l'agence de détective Mouri. Elle désire retrouver son petit-ami disparu. A la grande surprise de Conan et de Ran, elle prétend être la petite-amie de Shinichi Kudo, le détective lycéen. Il n'en faut pas plus pour attiser la jalousie et la colère de Ran, convaincue que Shinichi lui a menti en disant être sur une affaire complexe et qu'il passe en réalité son temps avec une autre fille. Conan, quant à lui, s'interroge sur les intentions de Ryoko. Pourquoi leur ment-elle ainsi ?
Pour découvrir la vérité et confronter Shinichi sur ses infidélités, Ran s'invite chez Ryoko et force Conan à venir avec elles. Dès leur arrivée, Conan remarque qu'il y a quelque chose d'étrange dans cet appartement. Les événements sont d'autant plus étranges que Ryoko ne parle quasiment pas, restant sur la défensive et ne leur révélant pas la véritable raison pour laquelle elle voudrait rencontrer Shinichi. Conan devine néanmoins qu'il se passe quelque chose de grave, quelque chose dont elle ne peut parler ni à la police, ni même à un détective.
Commentaires
Passée la conclusion (sans grande surprise) de l'affaire débutée dans le volume précédent, ce tome 7 de Détective Conan entre ensuite rapidement dans le vif du sujet: l'affaire de la Sonate au Clair de Lune, grosse intrigue qui occupe à elle seule la majorité du tome et présentée dans son intégralité.
Il s'agit tout simplement d'une des meilleures affaires de la série. Ici, on atteint des sommets d'excellence. Déjà parce que l'intrigue permet aux héros d'aller dans un environnement insolite, cette petite île perdue au milieu de nulle part où vivent une petite centaine d'habitants. Ensuite par son atmosphère particulière portée par une aura particulière, entre histoire fantastique et intrigue policière, qui donne à cette affaire un charme certain.
Au centre du mystère, une étrange malédiction, un piano qui tue et une sublime mélodie qui hante littéralement les événements du récit, devenant à la fois une présence fantomatique et une faucheuse qui annonce l'heure de la mort. D'ailleurs, sur ce point, l'adaptation animée de cette intrigue (qui avait donné lieu à un épisode spécial d'une heure) bénéficiait d'un gros plus par la présence de la Sonate au Clair de Lune qui donnait corps à ce "fantôme", d'autant qu'elle était remarquablement employée: sa présence était véritablement menaçante et elle écrasait littéralement les personnages, comme si elle possédait sa propre voix qui venait les narguer en continuant à jouer. Est-ce là le fantôme de Keiji Aso ?
Bien sûr, une bonne intrigue, c'est avant tout une bonne histoire, une bonne construction d'intrigues et de bons personnages. A ce niveau, cette intrigue s'en tire de manière vraiment admirable. Le mystère est prenant, les personnages sont parfaitement "incarnés" avec une personnalité marquée et des intentions fortes, et l'intrigue est remarquablement menée, multipliant les rebondissements et les fausses pistes de manière très convaincantes.
Il y a beaucoup plus dans cette intrigue qu'une simple affaire de meurtres. Beaucoup d'autres éléments se superposent dessus, employés comme des fausses pistes. Ce qui est génial, c'est que ces fausses pistes sont néanmoins parfaitement complémentaires du mystère principal et que la plupart des personnages possèdent du coup un rôle clairement défini. Il y a peu de suspects "gratuits", la plupart sont impliqués d'une manière ou d'une autre dans l'affaire. Cela la rend d'autant plus difficile et complexe que ce ne sont pas les attitudes douteuses et les témoignages suspects qui manquent, plusieurs personnages ayant des choses à cacher. Il s'agit alors de deviner la place de chacun au sein de ce gigantesque puzzle pour finir par trouver le meurtrier.
Et l'une des grandes réussites de cette intrigue, c'est bien le personnage du meurtrier. Tout le long de l'affaire, il possède une véritable présence qui le distingue des criminels habituels, d'abord par son attitude audacieuse à l'égard du détective Mouri, et ensuite parce que l'auteur arrive à nous faire sentir vraiment ce personnage derrière les enjeux de l'intrigue. Sans même le voir, on sent un criminel déterminé et audacieux, qui agit en coulisses, qui est soumis à des difficultés à mesure de l'enquête qui le forcent à se surpasser et qui est aussi capable de paniquer et de faire des erreurs. Et surtout, c'est quelqu'un d'extrêmement intelligent et compétent qui oppose vraiment une adversité formidable à Conan. Un criminel qui va s'avérer très dur à coincer.
Et lorsque le masque tombe, que le criminel se dévoile et qu'on découvre la nature de ces intentions, c'est une réelle bombe qui explose à la face du lecteur.
[spoiler]Alors qu'on s'imaginait un être impitoyable, on découvre à l'inverse un personnage qui s'avère plutôt positif et qui nous a été introduit précédemment sous une lumière sympathique et attachante. On comprend ses motivations, on comprend ce qu'il a enduré et, en dépit de l'horreur, on comprend également comment il a pu en arriver là. Ce n'est pas fondamentalement une mauvaise personne, mais les circonstances et ce monde pourri peuvent corrompre même la plus pure des personnes et en faire un monstre.
Loin du défi lancé qu'on imaginait, la lettre était surtout un appel à l'aide, une volonté de la part d'un criminel dominé par un démon appelé vengeance à être arrêté avant que la rédemption ne soit plus possible. Les enjeux étaient clairement posés, ses intentions aussi, il s'agissait maintenant d'arrêter cette série de meurtres atroces avant que le criminel ait accompli son oeuvre.
Malheureusement, Conan échoue à l'arrêter avant qu'il n'ait achevé son oeuvre et que le troisième mouvement de la sonate ne se fasse entendre. Conan parvient à résoudre l'affaire et à démasquer le coupable, mais il est déjà trop tard. Trop tard pour sauver son âme qui a déjà dépassé le stade de la rédemption.
Bien au-delà du vulgaire criminel habituel qui tente de se défendre ou de se justifier, le coupable a pleinement conscience de ses actes et il a l'honnêteté de les assumer et d'en payer le prix. Gosho Aoyama a vraiment construit ici un personnage magnifique, un véritable anti-héros tragique qui pousse un cri à l'aide et qui, perdu, décide d'expier par lui-même ses fautes, sachant qu'il n'a plus le droit de vivre. Ne pouvant se résoudre à passer les menottes à un personnage aussi digne, il lui accorde une fin digne de ce nom, véritablement magnifique et qui conclut admirablement cette affaire en mettant un terme symbolique à la malédiction du piano. La boucle est bouclée et l'affaire s'achève donc sur une note éminemment triste.[/spoiler]
Une conclusion que je trouve tout simplement magistrale. Au final, pour moi, cette intrigue est vraiment parfaite, remarquablement construite et menée de bout en bout avec une histoire formidable et des personnages fascinants. Détective Conan à son meilleur niveau !
Cette intrigue aura par ailleurs un certain impact sur le personnage de Conan, sortant de cette affaire complètement ébranlé et démoralisé. Cette sombre histoire continuera de le hanter pendant longtemps comme le plus grand échec de sa carrière, se rappelant à son souvenir lors des périodes de doutes et l'encourageant alors à persévérer jusqu'au bout pour que de tels événements ne puissent plus se reproduire. C'est peut-être bien le plus bel hommage que Conan pouvait rendre au coupable, auquel cas cette finalité n'aura pas été vaine.
Après une affaire aussi excellente et sensationnelle, où le lecteur a bien du mal à se remettre de ses émotions, on enchaîne ensuite immédiatement sur une affaire malheureusement plus décevante.
Après Ran qui soupçonnait la véritable identité de Conan dans le tome 3, voici à présent Ran en mode "jalousie furieuse", ce qui n'augure rien de bon avec une ceinture noire de karaté capable de tout défoncer sur un coup de colère. Le motif: elle croit avoir découvert que Shinichi, qui a disparu depuis quelques temps, entretient une liaison avec une autre fille et, dès lors, sa jalousie prend le pas.
Cela donne lieu à une intrigue franchement plus axée sur le fan-service (le jeu du chat et de la souris entre Ran et Conan/Shinichi) que sur l'affaire elle-même (servant presque de prétexte). Si l'idée de base est sympathique de prime abord, malheureusement Gosho Aoyama succombe à toutes les lourdeurs et toutes les concessions pour la faire fonctionner. En d'autres termes, pour faire simple, Ran est devenu un personnage complètement bête qui cesse de raisonner de manière logique et rationnelle (autrement, elle comprendrait immédiatement que quelque chose cloche dans cette histoire et, potentiellement, que Conan et Shinichi sont la même personne).
Le traitement de Ran sur cette intrigue est un massacre. Le personnage passe complètement pour une idiote, aussi bête qu'insupportable. C'est là qu'on sent le plus que Gosho Aoyama ne maîtrise pas encore vraiment le personnage de Ran au début de la série, mettant plus tard davantage de temps pour la développer et pour la rendre plus intéressante et plus complexe. Là pour le moment, on est en plein dans les pires stéréotypes.
Pour ajouter à ce grand n'importe nawak, Gosho Aoyama a jugé bon d'introduire un nouveau gadget et, alors là, il a eu une telle idée de génie que ce gadget va devenir la risée des fans et n'apparaitra plus jamais dans la série, tandis que l'introduction de nouveaux gadgets abracadabrants va progressivement disparaître (ouf !). Le gadget en question: un fax portatif déguisé en panier repas (comestible). Je crois que là on a touché le fond pour de bon...
Pour terminer, je précise que cette intrigue trouvera sa conclusion dans le tome suivant... mais sans le fax cette fois.

Malheureusement, Ran est toujours là.
Bref, une intrigue pas vraiment intéressante qui plombe malheureusement l'intérêt d'un tome jusque là porté par l'extraordinaire affaire de la Sonate au Clair de Lune. Mais rien que pour cette dernière, ce tome 7 vaut amplement le coup et s'impose comme l'un des incontournables de la série.
Verdict: Très bon.